Les avocats du président du Niger, Mohamed Bazoum, renversé le 26 juillet par un coup d’Etat ont rejeté, vendredi 20 octobre, les « accusations montées de toutes pièces » par les militaires au pouvoir concernant sa supposée tentative d’évasion, affirmant qu’il était « détenu au secret ». « Nous rejetons énergiquement ces accusations montées de toutes pièces contre le président Bazoum », a déclaré dans un communiqué, transmis à l’Agence France-Presse à Abidjan, Mohamed Seydou Diagne, coordinateur d’un collectif d’avocats de M. Bazoum.
Le régime militaire avait affirmé, jeudi 19 octobre au soir, que le président déchu, retenu prisonnier depuis le putsch, avait cherché à fuir à l’étranger, en vain. « Autour de 3 heures du matin [jeudi], le président déchu, Mohamed Bazoum, accompagné de sa famille, [de] ses deux cuisiniers et [de] deux éléments de sécurité, a tenté de s’évader de son lieu de détention », avait déclaré le porte-parole du régime, le colonel major Amadou Abdramane, à la télévision nationale.
Il avait précisé que cette tentative avait « échoué » et que « les principaux auteurs et certains de leurs complices » avaient été arrêtés. Selon lui le plan d’évasion de Mohamed Bazoum visait à d’abord l’emmener « dans une planque en périphérie de Niamey », avant d’emprunter des « hélicoptères appartenant à une puissance étrangère » en direction du Nigeria.
Plus de nouvelles de lui « depuis la nuit de mercredi à jeudi »
Me Seydou Diagne a également affirmé que M. Bazoum, « sa femme et son fils sont détenus au secret, sans accès aux avocats ni au monde extérieur ». Vendredi matin, « le médecin s’est vu refuser l’accès alors qu’il apportait de la nourriture à la famille », a-t-il précisé. « Avec cette détention au secret, c’est une nouvelle ligne rouge qui a été franchie par une junte qui continue à violer les droits fondamentaux de notre client. Elle aura à répondre de ses actes », a-t-il ajouté.
Le porte-parole de la junte n’a pas précisé où se trouvait le président déchu jeudi soir. Ce dernier jusqu’ici retenu prisonnier dans sa résidence au sein du palais présidentiel avec sa femme, Haziza, et son fils Salem.
Selon Me Diagne, l’entourage de M. Bazoum n’a plus de nouvelles de lui « depuis la nuit de mercredi à jeudi ». « Non seulement les autorités militaires doivent nous apporter la preuve que le président Bazoum et sa famille sont bien en vie, mais surtout elles doivent les libérer immédiatement », affirme un autre avocat du collectif, Reed Brody.
Par ailleurs, le communiqué explique que « les avocats nigériens de Salem Bazoum [le fils du président déchu] avaient obtenu d’un juge de Niamey » qu’il « soit libéré ». Jeudi, « ils avaient reçu l’ordonnance leur permettant de notifier l’Etat du Niger pour que la décision soit appliquée ».
Le 18 septembre, M. Bazoum avait saisi la justice ouest-africaine pour demander sa libération et le rétablissement de l’ordre constitutionnel au Niger. De nombreux pays et organisations continuent d’appeler à sa libération, mais le régime militaire au pouvoir reste pour l’heure inflexible.
Un pont aérien humanitaire vers Niamey
Jeudi, l’Union européenne (UE) a annoncé avoir mis en place un pont aérien humanitaire pour acheminer des médicaments essentiels et des fournitures médicales au Niger, frappé par des sanctions économiques internationales depuis le coup d’Etat. Quatre vols seront affrétés pour acheminer 58 tonnes de « fournitures sanitaires essentielles » en vue de « renforcer la réponse humanitaire » dans le pays, où « les stocks de produits vitaux s’épuisent rapidement », explique un communiqué de l’UE.
Le coup d’Etat a été dénoncé par de nombreux pays occidentaux, dont la plupart ont coupé leur aide au développement. Du fait des sanctions, les humanitaires opérant au Niger subissent « des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement en produits essentiels » et la population est confrontée à « des hausses de prix considérables », souligne l’UE.
Le régime militaire a annoncé en octobre une réduction de 40 % du budget national pour 2023, en raison de ces diverses sanctions qui affectent l’économie du Niger, pays très dépendant des partenaires étrangers.
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