Un adolescent de 15 ans, victime de harcèlement lors de l’année scolaire précédente, s’est suicidé mardi soir à son domicile de Poissy (Yvelines), mais la justice appelle à la prudence sur les causes du passage à l’acte. « Une enquête est en cours, mais les premiers éléments qui ont été remontés [au ministère] par ses services attestent clairement que des faits de harcèlement avaient été déclarés au cours de l’année scolaire 2022-2023 », a expliqué, mercredi 6 septembre, le ministère de l’éducation nationale.
Le nouveau ministre de l’éducation nationale, Gabriel Attal, qui a déclaré à son arrivée au ministère vouloir œuvrer à une réponse « implacable » au harcèlement, a « échangé avec la mère de la victime au téléphone et lui a témoigné son soutien absolu ». « C’est un drame qui nous endeuille tous. Notre cœur à tous souffre. Une enquête est en cours pour déterminer les circonstances de sa mort », a-t-il expliqué lors d’un point presse en fin de journée.
Le ministre de l’éducation a annoncé le lancement d’une enquête administrative. « Une cellule d’écoute et de soutien » est ouverte pour faire la « lumière » sur les faits de harcèlement dont a été victime l’adolescent. « Chaque drame est un drame de trop, qui nous rappelle que nous ne sommes toujours pas à la hauteur », a encore dit le ministre. « Ce ne sont pas des personnes évidemment que je veux mettre en cause, c’est la réponse de l’institution éducation nationale face à l’urgence du harcèlement scolaire qu’il nous faut continuer à profondément changer », a-t-il expliqué.
Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a annoncé que Brigitte Macron allait rendre visite jeudi à la famille de l’adolescent. « Quand un enfant de 15 ans en arrive à ne plus envisager d’autres solutions que celle de donner la mort, c’est une émotion qui nous oblige tous », a-t-il déclaré sur France Inter.
Nouvelles mesures décrétées cet été contre le harcèlement
« Il faut rester à ce stade très prudent » sur les causes de la mort, a précisé à l’Agence France-Presse le parquet de Versailles. Mardi, en début de soirée, les secours sont intervenus au domicile de ce garçon mais, après des tentatives de réanimation restées vaines, l’adolescent a été déclaré mort, selon une source policière.
Selon le récit de Gabriel Attal, cet adolescent était scolarisé l’an dernier en 3e prépa-métiers au lycée professionnel des métiers Adrienne-Bolland à Poissy et, depuis cette rentrée, dans un autre établissement à Paris. « En décembre 2022, le harcèlement du jeune garçon avait été signalé. Un rendez-vous avait été organisé dans l’établissement. Il était fait état de brimades et d’injures répétées de la part de plusieurs élèves nommément désignés », a-t-il retracé.
« En mars 2023, les parents ont été reçus par l’établissement. Les élèves mis en cause ont eux aussi été reçus, et leurs parents ont été contactés. Un échange de courriers a par ailleurs eu lieu courant avril entre la famille et l’institution scolaire sur la situation du jeune garçon, la famille dénonçant, dans ce courrier, l’absence de mesures suffisantes prises face à cette situation », a-t-il ajouté. Le père avait déposé une main courante pour harcèlement en avril au commissariat de Poissy, mais n’avait pas souhaité déposer plainte, a-t-on appris de source policière. Le ministre a précisé que selon l’établissement, l’adolescent avait « bénéficié d’un suivi régulier par la CPE, et ce jusqu’à la fin de l’année scolaire » et qu’« un point a été fait avec le père de ce jeune garçon » en fin d’année scolaire.
La lutte contre le harcèlement scolaire, déjà engagée par l’ancien ministre de l’éducation Pap Ndiaye, s’est intensifiée cet été, après la mort de la collégienne Lindsay, qui a mis en lumière le phénomène du harcèlement dans les établissements scolaires mais aussi sur les réseaux sociaux. Selon un décret publié mi-août, un élève responsable de harcèlement scolaire pourra désormais être transféré dans une autre école, évitant d’imposer ce changement à celui qui en est victime. Il est également prévu de pouvoir sanctionner un auteur de cyberharcèlement contre un élève d’un autre établissement.
Dans les collèges et lycées, le décret étend « le champ de la procédure disciplinaire aux cas dans lesquels des élèves commettent des actes de harcèlement à l’encontre d’élèves situés dans un autre établissement ». Au moment de la publication de ce texte, Gabriel Attal avait assuré vouloir une « tolérance zéro contre toutes les formes de harcèlement ».
Dès cette rentrée, un référent sur le harcèlement « dans chaque établissement » doit être créé. Il pourra s’agir d’une infirmière, d’un conseiller principal d’éducation ou d’un enseignant. Les établissements scolaires devront également signaler « systématiquement » aux procureurs les cas de harcèlement. En parallèle, un nouveau plan de lutte interministériel devrait être dévoilé d’ici la fin du mois de septembre.
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