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Porcs fracassés au sol, castrés à vif, cadavres qui s’entassent: un élevage de la Marne au cœur d’un nouveau scandale de maltraitance animale

Castrations à vif, queues coupées à la chaîne, porcelets tués la tête fracassée au sol, cadavres dévorés par des chats… Dans une nouvelle vidéo choc, l’association L214 dénonce les pratiques d’un élevage du sud de la Marne, contre lequel elle a porté plainte mercredi.

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Les images sont quasi insoutenables. Une femme attrape un porcelet par les pattes arrière et lui éclate la tête contre le sol en béton, à plusieurs reprises. Puis elle en saisit un autre. Trois connaissent le même sort. Ils ne meurent pas sur le coup. Agitée de soubresauts, leur agonie peut durer quelques minutes. Un chat qui erre dans le couloir attrape un cadavre et file le dévorer. Les asticots font le reste.

Attention, les images qui suivent sont très dures.

Dans cet élevage intensif, qui compterait près de 4 000 porcs, les animaux vivants sont parfois guère mieux lotis. Des images éprouvantes montrent une truie et un petit victimes d’une descente d’organes, des entrailles à l’air, mais toujours vivants. Des bébés tètent à côté d’un cadavre. Dans une cage, une truie est frappée avec une truelle pour qu’elle se redresse, afin de retirer un petit mort sous sa mère.

Des porcelets morts sous leur mère.
Des porcelets morts sous leur mère.

Claqués à mort, castrés à vif

Ces images, filmées « entre mai et septembre 2023 » selon L214, ont été publiées cette nuit par l’association de protection animale, dans un format court (une minute) sur Internet, mais beaucoup plus long (18 minutes) dans le film adressé aux médias. Créée en 2008, L214 est connue pour ses enquêtes coups de poing contre les « dérives » de l’élevage intensif. En décembre 2021, elle avait visé un élevage tout proche, dans l’Aube (lire par ailleurs). Cette fois, c’est le GAEC Les Grandes vignes, à Corbeil, entre Vitry-le-François et la limite auboise, qui est ciblé.

Malgré son nom très viticole, l’exploitation marnaise fait moins dans le raisin que dans le boudin : elle travaille pour la coopérative Cirhyo, basée dans l’Allier, un des leaders français du marché, regroupant plus de 500 adhérents et 60 000 truies. Les viandes tirées de l’élevage marnais finissent en magasin, essentiellement sous la marque Herta.

Contacté plusieurs fois, le gérant de l’élevage marnais n’a pas donné suite. Président de la FDSEA de la Marne, et éleveur de porcs lui-même, Hervé Lapie, depuis le Sommet de l’élevage à Clermont-Ferrand, a déclaré qu’il ne pouvait « rien dire sans avoir vu les images ». Mais il a pris ses distances avec L214, « des personnes qui veulent du mal à l’agriculture française ».

Mais sur la foi des images collectées, L214 assume et parle, à Corbeil, de « manipulations violentes et illégales ». Outre le « claquage à mort contre le sol », sont dénoncées la « castration chirurgicale sans anesthésie ni analgésiant », ainsi que la « coupe routinière des queues ».

Ces deux points apparaissent dans une autre séquence de la vidéo. Alors que les couinements sont de plus en plus aigus, deux salariés saisissent des porcelets dans deux boîtes : le premier cale l’animal entre ses cuisses, tête vers le bas et fesses vers le haut, et le castre avec un ustensile ; l’autre personne attrape ensuite le porcelet et lui coupe la queue d’un coup sec, à l’aide d’une sorte de sécateur.

Plainte pour «sévices graves» et «mauvais traitements»

L214 met en avant des « pratiques interdites »  : elle souligne que la castration à vif est « illégale depuis janvier 2022 », que la « caudectomie » systématique (coupe des queues) l’est depuis vingt ans, et que « la mise à mort par percussion de la boîte crânienne n’est pas une méthode d’abattage autorisée ». « Comment cette pratique atroce peut-elle perdurer ?, questionne Sébastien Arsac, cofondateur de L214. Si elle concernait des chatons, elle conduirait les auteurs en prison ! Voir ces porcelets se faire fracasser le crâne est insoutenable. »

Trois porcelets morts après avoir eu la tête fracassée au sol, dans l’élevage de porcs de Corbeil (Marne).
Trois porcelets morts après avoir eu la tête fracassée au sol, dans l’élevage de porcs de Corbeil (Marne). - Images L214

Aussi l’association a-t-elle lancé une pétition destinée au ministre de l’Agriculture (lire par ailleurs), mais aussi porté plainte pour « sévices graves » et « mauvais traitements ». Céline Fassey, vice-procureure de Châlons-en-Champagne, confirmait, ce mercredi, « la réception et l’étude de cette plainte ». Un film de près d’une heure a été joint à la plainte.

En attendant de connaître l’issue donnée, la coopérative Cirhyo, dont dépend le GAEC, admet « des images choquantes », mais « partielles ». La direction accuse L214, qui « nourrit des ambitions anti-élevage », d’avoir sciemment mis en avant les pires. « On est en attente des rapports des services vétérinaires de l’État, pour savoir si les actes pratiqués répondent à la réglementation ou pas. »

Sollicitée à plusieurs reprises, la préfecture de la Marne n’a pas pu répondre à nos questions.

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