Accéder au contenu principal
épidémie

Choléra à Mayotte : ce que l’on sait de la situation sanitaire

Le nombre de cas de choléra à Mayotte, département d'outre-mer de l'océan Indien, a doublé, passant de 13 à 26 en deux jours, ont rapporté dimanche la préfecture et l'Agence régionale de santé. France 24 fait le point sur la situation sanitaire de l'archipel, où le système de santé est déjà très fragile et où la pénurie d’eau potable persiste.

Des femmes collectent des bouteilles d'eau potable à un point de distribution dans le quartier de Majicavo à Mamoudzou, sur l'île de Mayotte dans l'océan Indien, le 19 février 2024.
Des femmes collectent des bouteilles d'eau potable à un point de distribution dans le quartier de Majicavo à Mamoudzou, sur l'île de Mayotte dans l'océan Indien, le 19 février 2024. © Julien de Rosa, AFP
Publicité

En seulement deux jours, le nombre de personnes malades a doublé. L’épidémie de choléra gagne du terrain à Mayotte, où 26 cas ont été signalés contre 13 deux jours plus tôt, selon un dernier bilan communiqué dimanche 28 avril par la préfecture et l’Agence régionale de santé (ARS). Une nouvelle "unité choléra" a été mise en place dans un centre médical pour faire face à cette situation.  

Le choléra, caractérisé par une diarrhée aiguë, est causé par une bactérie généralement transmise par la consommation d'eau ou d'aliments contaminés. Selon le médecin épidémiologiste Antoine Flahault, "la grande majorité des patients demeurent asymptomatiques ou présentent des symptômes de gastro-entérite bénigne qui se résolvent spontanément." Dans de rares cas, il peut provoquer une déshydratation rapide et peut être mortel en l'absence de traitement. 

  • Un premier cas confirmé en mars 

Le 18 mars, un premier cas de choléra a été confirmé à Mayotte. Il s'agissait d'une personne en provenance des Comores, archipel situé à 70 kilomètres de Mayotte, où une épidémie de choléra fait rage. D'après le ministère de la Santé de l’Union des Comores, 205 nouveaux cas et quatre nouveaux décès ont été signalés sur son territoire rien que pour la journée du 28 avril. Jusqu'à cette date, depuis le début de l'épidémie en début d'année, un total de 3 244 cas et 67 décès ont été recensés dans cet archipel, qui compte 870 000 habitants, dont 45 % vivent sous le seuil de pauvreté. 

"L’habitat précaire des migrants débarquant à Mayotte, en quête de subsistance depuis les Comores voisines, favorise la propagation du choléra qui est une maladie du sous-développement et de la très grande pauvreté", analyse Antoine Flahault. "Il est de la responsabilité de l’État que le choléra ne se propage pas sur son territoire." 

Malgré les efforts des autorités pour réagir rapidement, dix autres cas importés des Comores ont été recensés à Mayotte dans les semaines qui ont suivi. Le 26 avril, la situation sanitaire a connu un tournant avec l'annonce de trois premiers cas de choléra "autochtones" dans la commune de Koungou, au nord de Mamoudzou, par l'ARS. 

Ces nouveaux patients, une femme, un homme et un nourrisson, sans lien biologique, n’avaient pas quitté l’île. Olivier Brahic, directeur général de l'ARS, a avancé lors d'une conférence de presse que la source probable de contamination serait "une personne malade (qui) ne s'est pas présentée au Samu". Deux jours plus tard, le nombre de cas confirmés a explosé pour atteindre 26. 

  • Une campagne de vaccination et de dépistage 

Face à ce nouveau bilan, une "deuxième unité choléra", au sein du centre médical de référence de Dzoumogné, a été ouverte. La première unité, conçue pour accueillir jusqu'à 14 personnes au centre hospitalier de Mayotte (CHM), a atteint sa capacité maximale et ne peut plus accepter de nouveaux patients. 

Pour tenter de contenir la propagation, un centre de dépistage et d’orientation, fonctionnant de la même manière que ceux mis en place lors de la pandémie de Covid-19, a également été installé à Koungou. Les personnes qui sont cas contact ou qui ont des symptômes peuvent y faire un test antigénique rapide. S’il est positif, elles sont dirigées vers un laboratoire pour effectuer un test PCR [qui permet d'identifier aussi des souches de choléra, NDLR], selon les indications fournies par l'ARS à franceinfo.  

Depuis plusieurs jours, des campagnes de vaccination sont en cours sur le terrain. Au total, 1 000 personnes ont été vaccinées sur le territoire depuis février. À partir de cette semaine, 2 600 nouvelles doses doivent s'ajouter aux 4 000 stockées sur le territoire. 

france24
france24 © france24

En parallèle, des équipes médicales se déplacent dans les zones urbaines de Mamoudzou et Koungou – où la densité de population est élevée et la présence de bidonvilles nombreuse – pour des actions sanitaires ciblées. Certains élus craignent que l’épidémie ne se propage dans les quartiers densément peuplés de la zone urbaine. Le député LR Mansour Kamardine a notamment réclamé la mise en place d’un grand plan de vaccination "accessible à tous, notamment aux enfants et aux personnes fragiles". 

  • Un manque de soignants 

Étant donné le manque de personnel soignant sur le territoire, le centre hospitalier de Mayotte a dû fermer 11 de ses 13 dispensaires répartis sur l'île, pour répondre aux prises en charge liées au choléra. Selon Olivier Brahic, directeur général de l’ARS, "la situation au centre hospitalier de Mayotte, en termes de ressources humaines, reste très critique, aux urgences notamment". Au total, 70 % des postes de praticien hospitalier ne sont plus pourvus, selon Outre-mer La Première

Une vingtaine de personnes de la réserve sanitaire métropolitaine doivent arriver en renfort à Mayotte mercredi, a précisé l'ARS à franceinfo dimanche. Une deuxième demande "à caractère urgent" a été émise, cette fois-ci pour des urgentistes, des médecins généralistes, des infirmiers et des techniciens de laboratoire biologique. 

  • Des lacunes dans l'accès à l'eau potable et à l'assainissement 

À Mayotte, environ un tiers de la population de l'île n'a pas accès à l'eau courante selon l‘Insee, tandis que les autres sont privés d'eau un jour sur trois à cause des défaillances d’alimentation. Aucun retour à la normale n'est envisagé avant 2025. 

À lire aussiÀ Mayotte, "c’est un peu la guerre pour avoir accès à l’eau potable"

Dans ce contexte difficile, les experts soulignent l'importance cruciale d'un accès à l'eau potable pour prévenir les épidémies. "L’assainissement de l’eau, la séparation, la filtration et le traitement des eaux usées permettent d’éliminer tout risque de choléra dans la population", explique Antoine Flahault. 

Ces précautions sont d'autant plus nécessaires que, selon les données de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), entre 1,3 et 4 million de cas de choléra sont recensés chaque année, entraînant entre 21 000 et 143 000 décès dans le monde. 

"Le choléra a été éliminé des pays développés grâce à l'amélioration de l'hygiène de l'eau et aux comportements adoptés par la population", rappelle Antoine Flahault. "Cependant, on ne l’a pas éradiqué de la planète et il persiste là où l'eau n'est pas correctement assainie. Nous payons ici une forme d’égoïsme des pays riches qui n’ont pas voulu ou pu financer l’éradication du choléra à l’échelle mondiale."

Le résumé de la semaineFrance 24 vous propose de revenir sur les actualités qui ont marqué la semaine

Emportez l'actualité internationale partout avec vous ! Téléchargez l'application France 24

Partager :
Page non trouvée

Le contenu auquel vous tentez d'accéder n'existe pas ou n'est plus disponible.