“Si le Congrès n’aide pas l’Ukraine, l’Ukraine perdra la guerre”, a déclaré Volodymyr Zelensky dimanche lors d’une visioconférence de la plateforme de collecte de fonds United24. Il a ajouté que “si l’Ukraine perd[ait] la guerre, d’autres États ser[aient] attaqués”, rapporte le Kyiv Post. “La situation à Kharkiv est très difficile”, a par ailleurs concédé le président ukrainien lors de son adresse nocturne à la nation, précisant que les “Russes [avaient] commencé à utiliser des bombes aériennes guidées contre la ville presque quotidiennement”. Il a ainsi à nouveau appelé ses alliés à lui fournir plus de systèmes de défense antiaérienne, dont “l’Ukraine manque clairement”.

Un appel notamment soutenu aux États-Unis par le comité de rédaction du New York Times, qui, dans son éditorial de samedi, exhortait les États-Unis à “aider l’Ukraine à tenir bon”. “Après plus de deux ans d’une guerre brutale et sans répit, l’Ukraine a toujours la capacité de défendre sa démocratie et son territoire contre la Russie. Mais cela ne peut pas se faire sans l’assistance militaire américaine”, constate le premier quotidien américain, qui énumère les bonnes raisons de le faire. À commencer par le renforcement de la sécurité et de la crédibilité américaines, qui sortiraient durablement ternies d’une défaite ukrainienne.

Selon un sondage mené par le Chicago Council on Global Affairs et l’institut Ipsos, près de six Américains sur dix le pensent également, et comprennent qu’aider Kiev “contribue davantage à renforcer la sécurité nationale américaine qu’à l’affaiblir”. Toutefois ce soutien a “quelque peu diminué depuis le début de l’invasion russe” et demeure “plus faible parmi les républicains”, observe le New York Times, qui presse le speaker de la Chambre, Mike Johnson, “de soumettre cet effort au vote” au plus vite, malgré les réticences de son parti.

La recherche d’un compromis à la Chambre

Malgré les ordres de Donald Trump, qui s’oppose vigoureusement au vote d’un nouveau paquet d’aide militaire à Kiev, Mike Johnson semble pour sa part hésitant, selon le Wall Street Journal. Il s’est en effet engagé à se pencher sur la question peu après la fin des vacances de Pâques, c’est-à-dire dans les prochains jours. Mais après avoir écarté en février le paquet de 95 milliards de dollars voté par le Sénat (qui incluait aussi des aides à Israël et à Taïwan), personne ne sait exactement ce que mijotent le speaker et sa très courte majorité.

Le quotidien conservateur croit néanmoins savoir qu’il “envisagerait de séparer l’aide à l’Ukraine (60 milliards) de l’aide à Israël (10 milliards), afin que les législateurs puissent voter sur chaque élément séparément”, et ainsi maximiser leur chance de passage, une fois écartés les extrémistes de chaque camp. Johnson a en outre “lancé publiquement quelques propositions qui pourraient attirer quelques voix supplémentaires ici ou là : convertir une partie de l’aide ukrainienne en prêt, confisquer les actifs russes saisis pour financer la reconstruction de l’Ukraine, ou encore lever le moratoire de l’administration Biden sur les nouveaux projets d’exportation de gaz naturel liquéfié”.

Aucune de ces conditions n’est judicieuse”, cingle le New York Times, qui estime cependant que les législateurs modérés des deux partis “ont raison de rechercher un compromis raisonnable”, afin de contrer la menace des élus républicains les plus radicaux. Parmi eux, Marjorie Taylor Greene, qui a promis de lancer une procédure de destitution si Johnson osait aider l’Ukraine.

Les plans “secrets” de Donald Trump pour l’Ukraine

Le Washington Post tente pour sa part d’y voir plus clair dans les projets “secrets” de Donald Trump pour l’Ukraine, si d’aventure il revenait à la Maison-Blanche. Et selon des confidences de proches obtenues sous couvert d’anonymat, son idée “consisterait à pousser l’Ukraine à céder la Crimée et la région frontalière du Donbass à la Russie”. S’il n’a pas assumé cette position – pourtant sans surprise – publiquement, Trump déclare “en privé” que la Russie et l’Ukraine “veulent sauver la face”, et seraient prêts à un tel compromis.

Le candidat républicain s’est largement vanté d’être en mesure de négocier un accord de paix “dans les vingt-quatre heures suivant son élection”, avant même de prendre ses fonctions. Mais il a jusqu’à présent refusé de préciser comment, et son équipe de campagne n’a pas souhaité répondre aux questions du Washington Post, préférant maintenir une certaine ambiguïté. Au sein de son entourage, certains tentent de le dissuader d’ouvrir la porte à ce genre de concessions, comme le sénateur de Caroline du Sud Lindsey Graham, qui, dit-il, “passe 100 % de [son] temps à parler de l’Ukraine avec Trump” pour le convaincre que Poutine “doit payer un prix et ne peut pas gagner à la fin”.

D’autres au contraire l’encouragent, comme Michael Whatley, le nouveau président du Comité national républicain (RNC), qu’il a lui-même choisi et qui a mis dans le même sac l’Ukraine, la Chine et l’Iran, en évoquant les adversaires “agressifs” des États-Unis dans une interview dimanche sur Fox News. Choqué, le président républicain de la Commission du renseignement de la Chambre des représentants, Mike Turner, répondant aux questions de Jake Tapper sur CNN, a admis que la propagande russe avait “infecté” une partie de son camp.