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Aides sociales "envoyées au Maghreb": pourquoi les propos de Bruno Le Maire font polémique

Bruno Le Maire a créé la polémique mardi matin sur RMC-BFMTV en évoquant les aides sociales qui sont envoyées au Maghreb. Des propos qui ont choqué une grande partie de la gauche…

Des propos controversés qui ont choqué une partie de la classe politique. "Nos compatriotes en ont ras-le-bol de la fraude. (...) Le contribuable n'a aucune envie de voir que des gens puissent en bénéficier, le renvoyer au Maghreb ou ailleurs, alors qu'ils n'y ont pas droit", a lancé Bruno Le Maire mardi sur RMC-BFMTV, en parlant des allocations et des aides sociales que l’on ne peut pas toucher si l’on vit à l’étranger.

Par exemple, pour les allocations familiales, le RSA, il n’y a pas le droit d'en bénéficier si l’on quitte le territoire français plus de 92 jours par an, soit trois mois. On ne peut pas non plus toucher des allocations chômage si l’on quitte la France plus de 35 jours dans l’année.

Le gouvernement annonce donc des mesures pour lutter contre cette fraude. Ces aides sociales ne pourront plus être versées sur un compte bancaire à l’étranger et des contrôles vont être renforcés, notamment en sollicitant les compagnies aériennes pour tracer les déplacements des bénéficiaires de ces aides et repérer ceux qui fraudent.

Pas une mesure nouvelle

Le gouvernement annonce ces mesures comme si elles étaient nouvelles, alors qu'elles ne le sont pas. Ce sont des mesures déjà décidées et déjà annoncées. Par exemple, l'interdiction de verser des aides sociales sur un compte à l’étranger date du mois d’octobre dernier et doit entrer en vigueur en 2024.

Concernant l'ampleur de la fraude, par définition, c’est toujours difficile d’estimer le montant des triches. On ne connaît pas le chiffre global de la fraude mais on a les chiffres des redressements. C'est-à-dire de ceux qui se font prendre. Cela représente 1,6 milliard d'euros par an. La moitié étant des fraudes à l'URSSAF, c’est-à-dire des fraudes commises par les entreprises, c’est principalement le travail au noir. L’autre moitié sont des allocations indues demandées par des particuliers à la CAF ou aux assurances maladie.

Ce qui est sûr, c’est que le montant de ces fraudes aux prestations sociales est très très inférieur au montant des fraudes fiscales, dont les entreprises sont les premières coupables. La fraude fiscale est estimée à 80 ou 100 milliards d’euros, contre 7 à 14 milliards pour les fraudes sociales.

Fake news sur les pensions de retraite en Algérie

Concernant les pensions de retraite, on a le droit de les toucher quand on vit à l’étranger, que ce soit au Portugal ou au Maghreb. Mais le soupçon, c’est qu'à la mort d’un retraité, sa famille “oublie” de le déclarer et continue à toucher la pension pendant des années.

Le chiffre de 50.000 Algériens centenaires qui toucherait une retraite française est régulièrement relayé sur les réseaux sociaux. La réalité, c’est qu’il y a 687 retraités centenaires en Algérie qui perçoivent une pension française. 687 et pas 50.000. On parle d’une fraude maghrébine qui n’existe pas.

La gauche a violemment critiqué les propos de Bruno Le Maire. Olivier Faure, le patron du PS, parle des préjugés racistes du gouvernement alors que la fraude est essentiellement, selon lui, le fait des employeurs. Un député insoumis invite Bruno Le Maire à aller voir en Suisse plutôt qu’au Maghreb.

Ce qui est sûr, c’est que cette question est un marqueur politique droite/gauche très fort. Et que les déclarations de mardi indiquent bien un virage à droite du gouvernement.

Nicolas Poincaré (édité par J.A.)