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Environnement

Les États-Unis disent oui au poulet de synthèse cultivé en laboratoire

Le ministère de l'agriculture américain a accordé l'autorisation aux principales entreprises de viande artificielle de commercialisation du poulet de laboratoire dans les restaurants. Cette pratique qui suscite de nombreuses questions n'est pas pour demain sur le continent européen.

Après le poulet d'élevage, bientôt le poulet de "culture"? Le ministère américain de l'Agriculture a donné son feu vert mercredi à deux entreprises qui produisent de la viande de poulet de synthèse.

Upside foods et Good Meat, les principales actrices du secteur, ont salué cette décision et indiqué vouloir rapidement les commercialiser dans des restaurants.

Des cellules d'animaux passées par un bioréacteur

Cette nouvelle n'est pas une surprise alors que l'agence chargée de la sécurité alimentaire aux États-Unis (FDA) avait déjà donné son feu vert en novembre dernier. Jusqu'ici, seul Singapour avait autorisé la commercialisation de viande artificielle en 2020.

"Cette autorisation va fondamentalement changer la manière dont la viande atterrit sur nos tables", s'est réjoui le patron d'Upside foods dans un communiqué de presse.

Très différent des substituts d'origine végétale comme les "steaks" de tofu et de soja, la viande artificielle implique un processus particulier. Des cellules sont prélevées sur des animaux, puis cultivées en laboratoire dans des bioréacteurs pour se multiplier et enfin aboutir à une escalope ou une cuisse de poulet après le passage par un moule dans des formes prédéfinies.

Un impact environnemental plutôt flou

Pour gagner en notoriété, les deux compagnies misent beaucoup sur des restaurateurs courus. La cheffe étoilée Dominique Crenn qui tient un restaurant à San Francisco a déjà passé commande, tout comme le chef américain José André qui dirige des établissements à Washington DC.

Si les partisans de la viande artificielle mettent en avant un moindre impact carbone par rapport à de la véritable viande - l'élevage est responsable à lui seul de 14,5% des émissions mondiales de gaz à effet de serre -, ses conséquences environnementales restent pour l'instant très floues.

Des études suggèrent qu'il pourrait être supérieur sur le long terme à celui de l'élevage. Contrairement aux travaux précédents, ceux-ci ont pris en considération non seulement la nature des gaz émis, mais aussi le coût énergétique des infrastructures nécessaires.

Un coût élevé

Les entreprises productrices défendent également la réduction des risques sanitaires dans la mesure où les antibiotiques ne sont pas utilisés dans l'élaboration de viande de synthèse. Une bonne nouvelle alors que les animaux d'élevage consomment chaque année plus d'antibiotiques que les humains, amenant à une résistance de plus en grande à ces médicaments.

Mais une question éthique continue de se poser: celle du processus qui nécessite des hormones de croissance Jusqu’ici, le plus utilisé, mais aussi le plus controversé, consiste à ajouter du sérum de veau fœtal, prélevé sur des vaches en gestation envoyées à l’abattoir. Toutefois, les entreprises cherchent à développer des solutions alternatives.

Quant à son coût, il reste pour l'instant relativement élevé. Future Meats a ainsi déclaré pouvoir produire un kilo de poulet cultivé pour 15 dollars, loin des 10 dollars pour de la "vraie" viande. Le prix pourrait cependant décroître avec de nouvelles méthodes et l'élargissement du marché.

Le marché européen encore loin

La viande de laboratoire n'est de toute façon pas pour demain en Europe. "La mise sur le marché des nouveaux aliments dépend d’un examen validé par les autorités sanitaires de chaque État membre. On en est encore loin", explique ainsi Jean-François Hoquette, directeur de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) auprès de Ouest France.

Le gouvernement italien a déjà déclaré vouloir interdire la production et la vente de viande synthétique dans le pays en se fondant sur le principe de précaution.

MPB