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"Une défiance permanente": la macronie craint une explosion sociale qui échapperait aux syndicats

Elisabeth Borne et Emmanuel Macron

Elisabeth Borne et Emmanuel Macron - AFP

À quelques jours de la présentation de la réforme des retraites et d'un appel à manifester des Gilets jaunes, la majorité présidentielle doit gérer un contexte social explosif. "Ce qui nous inquiète, ce sont les colères qu'on n'aurait pas forcément vu venir", reconnaît un conseiller ministériel.

Des grèves ces dernières semaines qui ont ajouté à l'inquiétude du gouvernement liée à la réforme des retraites. Dans une atmosphère inflammable, entre inflation et hausse des factures d'électricité, la majorité présidentielle observe la météo sociale comme le lait sur le feu. Avec une crainte: ne pas voir venir la prochaine crise à quelques jours d'une manifestation des Gilets jaunes à Paris.

"On sent beaucoup de tension sur le terrain et on le fait remonter. On peut donner les sommes qu'on veut à certaines revendications corporatistes, on voit bien que les colères restent", reconnaît auprès de BFMTV.com le député Guillaume Karasbian (Renaissance) qui dirige la commission des affaires économiques à l'Assemblée.

"Un sentiment de défiance permanent"

Le diagnostic est partagé par le patron des sénateurs macronistes François Patriat qui évoque un "sentiment de défiance permanent des Français".

Ces dernières semaines, la tension sociale est encore montée d'un cran avec la grève des chefs de bord de la SNCF, organisée via un groupe Facebook, très loin des syndicats. La grève des médecins généralistes a eu lieu de son côté sous l'égide d'un collectif qui se dit apolitique.

Autant dire que si Élisabeth Borne continue de recevoir les partenaires sociaux pour les convaincre sur l'allongement de l'âge de départ à la retraite, ils semblent de plus en plus dépassés par ces mobilisations hybrides.

"Une colère qu'on n'aurait pas forcément vu venir"

De quoi empêcher de possibles négociations en cas de mouvement social d'ampleur et inquiéter en haut lieu sans vraiment croire à un retour d'ampleur des Gilets jaunes.

"Ce n'est pas le premier appel à reprendre les ronds-points qui n'aboutirait pas ces dernières années. Non, ce qui nous inquiète plutôt, ce serait plutôt une colère qu'on n'aurait pas senti déboucher sur des manifestations", reconnaît un conseiller ministériel.

Preuve que le gouvernement prend au sérieux une potentielle étincelle qui pourrait enflammer la situation: sa rapidité à répondre aux inquiétudes de boulangers, durement touchés par la hausse des prix de l'électricité.

Macron appelle ses ministres à "rester à l'écoute"

En moins d'une journée, alors que cette profession a prévu de se réunir à Paris le 23 janvier prochain, elle a obtenu l'étalement des impôts et des cotisations sociales ainsi la résiliation de son contrat sans frais en cas de hausse de prix "prohibitive".

"Nous n'avons pas peur d'une explosion sociale mais nous avons un sujet: celui d'entendre les revendications et de soutenir les Français et les professions qui pourraient mettre la clé sous la porte", veut convaincre de son côté la députée et porte-parole du groupe Renaissance, Prisca Thévenot.

Alors que seuls 21% des Français se disent favorables à l'allongement de l'âge de départ à la retraite d'après un sondage Elabe pour BFMTV, le gouvernement veut temporiser. Emmanuel Macron a ainsi demandé à son gouvernement lors du premier Conseil des ministres de l'année ce mercredi de "rester à l'écoute des Français". Suffisant pour apaiser un pays qui devrait affronter une inflation qui dure?

"Notre chance, c'est qu'il n'y a pas de mot d'ordre global"

"Dès qu'on propose une réforme, on nous parle d'explosion sociale, de retour des Gilets jaunes. On doit informer de toutes les aides, et rassurer. On va y arriver", tente de convaincre un conseiller ministériel.

"On a une chance, souligne un cadre du parti. C'est que pour l'instant, les médecins, les boulangers, les contrôleurs ont des demandes précises qui ne concernent que leur métier. On n'a pas de mot d'ordre global", souligne encore un cadre du parti.

Comme pour afficher sa sérénité, la préfecture de police ne montre pas d'inquiétude particulière à l'approche de la journée de mobilisation des Gilets jaunes ce samedi.

Marie-Pierre Bourgeois