Invités, huis-clos, plateau-repas : à quoi va ressembler "l'initiative politique d'ampleur" d'Emmanuel Macron

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Invités, huis-clos, plateau-repas : à quoi va ressembler "l'initiative politique d'ampleur" d'Emmanuel Macron

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La maison de la Légion d'honneur vue depuis la basilique de Saint-Denis, en 2014 [photo d'illustration].
La maison de la Légion d'honneur vue depuis la basilique de Saint-Denis, en 2014 [photo d'illustration].
© Maxppp - PHOTOPQR/LE PARISIEN/Jean-Gabriel Bontinck

Ce sont les rencontres de Saint-Denis. Emmanuel Macron reçoit mercredi à Saint-Denis les chefs de partis pour participer à des tables-rondes autour de trois thèmes. Avec cette "initiative politique d'ampleur", le chef de l'État espère arriver à des compromis. Voici à quoi cela va ressembler.

Sur invitation du président, la plupart des chefs des partis représentés au Parlement se retrouvent à la maison d'éducation de la Légion d’honneur à Saint-Denis, ce mercredi, pour échanger pendant plusieurs heures. En les conviant à ce qu'il a appelé dans un premier temps une "initiative politique d'ampleur", et qui sera officiellement baptisé "les rencontres de Saint-Denis", Emmanuel Macron veut tenter de trouver des compromis sur certains textes.

Quels partis sont invités ?

Le chef de l'État, dans en entretien à l'hebdomadaire Le Point publié la semaine dernière, a annoncé vouloir réunir "toutes les forces politiques représentées" au Parlement. Renaissance, le Modem, Horizons, le Parti radical, l'UDI, les Républicains et le Rassemblement national participeront à cette journée de discussion.

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Invités, les quatre partis de la Nupes (LFI, PS, PCF, EELV) ont fait savoir mardi dans un courrier commun qu'ils se rendraient à cet évènement mais sans "illusion". Ils échangeront lors des tables-rondes mais ne prendront pas part au dîner prévu ensuite, refusant de "participer à nouveau à une mise en scène médiatique".

Par ailleurs, Yaël Braun-Pivet, présidente de l'Assemblée nationale, et Gérard Larcher, président du Sénat, seront également sur place, tout comme Thierry Beaudet, président du Conseil économique, social et environnemental.

En revanche, le groupe Liot, composé de 21 députés centristes, d'Outre-mer, des nationalistes corses et des dissidents PS, n'est pas invité. Selon le groupe Liot, cela fait suite à la motion de censure qui a failli renverser le gouvernement lors de la réforme des retraites : "Nous regrettons cet ostracisme qui apparaît comme une mesure de rétorsion à notre opposition à la réforme des retraites et au dépôt d'un motion de censure, en mars dernier", dénonce le groupe dans un communiqué. Generation.s, le parti de Benoît Hamon, n'a pas non plus été convié.

Comment ça va se dérouler ?

Le programme prévoit une après-midi de travail à partir de 15 heures. Elle sera organisée autour de trois tables-rondes, puis un dîner. La première table-ronde portera sur les relations internationales et la place de la France dans le monde. La deuxième sur les institutions et la troisième sur "comment faire nation" et l'autorité de l'État.

Afin de poursuivre les échanges durant le dîner, celui-ci sera donné sous la forme d'un plateau-repas.

Y aura-t-il des images de ces rencontres inédites ?

L'intégralité de la journée se déroulera à huis clos. Pendant les échanges, aucun collaborateur ne sera admis à l'intérieur de la salle et les participants devront laisser leurs téléphones à l'entrée. Il y aura de toute façon des "brouilleurs téléphoniques installés dans la salle", indique l'entourage de Jordan Bardella, président du Rassemblement national.

Il n'y aura aucune image des échanges. Aucune caméra et aucun photographe seront présents.

D'où vient cette idée ?

En l'absence de majorité absolue au Parlement, Emmanuel Macron et le gouvernement disent chercher depuis juin 2022 à dépasser les clivages politiques. Cela a pris dans un premier temps la forme du Conseil national de la refondation, lancé en septembre 2022, et qui sera de nouveau convoqué le mois prochain.

L'expression "initiative politique d'ampleur" est, elle, apparue le 2 août dans Le Figaro Magazine. Emmanuel Macron expliquait alors vouloir "essayer de réunir autour d'un projet clair et simple tous ceux qui veulent s'y retrouver, sans leur demander d'adhérer à tout". L'Élysée soulignait ensuite auprès de l'AFP qu'elle porterait sur des thèmes tels que l'écologie, les services publics, le travail, l'ordre, le progrès, l'immigration et que le chef de l'État proposerait "aux forces politiques de l'arc républicain une série de rencontres pour déterminer des projets sur lesquels cheminer ensemble", sous-entendant alors exclure de cette démarche le Rassemblement national de Marine Le Pen et la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon.

Vendredi dernier, le président a officialisé sa proposition en envoyant aux partis politiques son invitation. Une lettre dans laquelle il explique avoir ces derniers mois "fixé un cap d'indépendance et de justice" et "su forger des compromis utiles", dans un "esprit de dépassement et de dialogue". Aujourd'hui, "nous devons aller plus loin et franchir une nouvelle étape d'unité et d'efficacité", écrit-il aux représentants des partis. "Vous partagez entre vous de solides accords et de vrais désaccords (...) j'ai confiance dans notre capacité à converger sans renoncement ni reniement."

Pourquoi ça a lieu à Saint-Denis ?

L'Élysée organise ce grand raout à la maison d'éducation de la Légion d'honneur, à Saint-Denis. Le choix de cette école créée en 1809 et située près de la Basilique de Saint-Denis à une "valeur symbolique", la "méritocratie", a fait valoir Olivier Véran lundi sur BFMTV/RMC.

"C'est une école pour des jeunes filles dont les parents ont été récompensés par la nation pour des mérites particuliers", a-t-il expliqué. L'établissement indique effectivement accueillir, exclusivement en internat, "les filles, petites-filles et arrière-petites-filles de décorés français et étrangers de la Légion d'honneur, de la Médaille militaire ainsi que de l'ordre national du Mérite". "Et c'est à Saint-Denis, qui est un ville qui a connu des émeutes" fin juin - début juillet, a encore expliqué le porte-parole du gouvernement.

Le président du RN, Jordan Bardella, n'y sera pas en terrain inconnu puisque c'est là qu'il a passé son bac, révèle Le Parisien.

Sur quoi cela doit aboutir ?

Dans sa lettre d'invitation adressée aux partis, le chef de l'État a souligné que l'objectif était de bâtir "ensemble" des textes législatifs et d'ouvrir la voie, "le cas échéant", à des référendums. Le président est aussi "ouvert" à tester "un préférendum", a affirmé le porte-parole du gouvernement, c'est-à-dire un référendum qui demande aux votants d'établir un ordre de préférence entre plusieurs mesures et celle qui arrive le plus souvent en tête l'emporte.

Sur le fond, l'article 11 de la Constitution impose qu'un référendum ne peut concerner que l'organisation des pouvoirs publics, la politique économique et sociale, les services publics qui y concourent ou la ratification d’un traité. Il peut aussi être utilisé pour modifier la Constitution, pour introduire par exemple le droit à l’IVG. L'entourage du Président ne formule aucune hypothèse : "Tout est très ouvert." Mais "pas question d'un référendum sur les retraites ou sur l'immigration". Deux thèmes pourtant aussitôt réclamés par les opposants politiques et syndicaux : LFI et la CGT pour le premier, le RN pour le second.

Que vont proposer les partis d'opposition ?

Chacun des chefs de parti est invité à venir avec des propositions. Outre un référendum sur la réforme des retraites, les partis de la Nupes disent accepter de participer afin de pouvoir "porter des propositions dans l'intérêt du peuple", notamment les difficultés de recrutement dans l'Éducation nationale, l'augmentation du prix des fournitures scolaires, le coût de la vie étudiante, le prix de l'électricité, du carburant et l'inflation sur les produits alimentaires.

En revanche, à droite et à l'extrême droite, c'est d'immigration que les chefs de partis veulent parler. Le patron des LR, Éric Ciotti, et celui du RN, Jordan Bardella, ont l'intention de réclamer un référendum sur ce sujet.

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