haut les cœursUn cœur greffé après douze heures de vol, ça change quoi concrètement ?

Un cœur greffé après douze heures de vol, ça change quoi concrètement ?

haut les cœursUn homme de 70 ans a pu être transplanté d’un cœur ayant voyagé pendant douze heures. La responsable de cet exploit : une machine de perfusion cardiaque développée par la société suédoise Xvivo
Avion, perfusion cardiaque en continu... Un coeur greffé douze heures après est synonyme de double espoir pour les malades en attente, grâce à une machine développée par la société suédoise Xvivo.
Avion, perfusion cardiaque en continu... Un coeur greffé douze heures après est synonyme de double espoir pour les malades en attente, grâce à une machine développée par la société suédoise Xvivo.  - Canva / Canva
Lise Abou Mansour

Lise Abou Mansour

L'essentiel

  • En janvier, un homme de 70 ans en insuffisance cardiaque a pu être transplanté d’un cœur ayant voyagé pendant douze heures à bord d’un vol entre les Antilles et Paris. Une première mondiale.
  • La responsable de cet exploit qui pourrait permettre d’accéder à davantage de greffons : une machine de perfusion cardiaque développée par la société suédoise Xvivo.
  • « Grâce à une petite pompe, cette machine va perfuser le cœur en continu avec du sang, de l’oxygène et différents produits permettant de le protéger », explique Guillaume Lebreton, chirurgien cardiaque et professeur à la Pitié-Salpêtrière et à la Sorbonne Université à l’origine de cette étude clinique. « Grâce à cela, le niveau de préservation est très étendu. »

Un espoir pour les personnes en attente d’une transplantation cardiaque. En janvier, un cœur a voyagé pendant douze heures à bord d’un vol entre les Antilles et Paris avant d’être transplanté avec succès sur un homme de 70 ans en insuffisance cardiaque. Une première mondiale qui pourrait apporter de nouvelles perspectives dans un contexte de pénurie d’organes.

Guillaume Lebreton, chirurgien cardiaque, est à l’origine de cette étude clinique. Le professeur à la Pitié-Salpêtrière et à l’université de la Sorbonne explique à 20 Minutes en quoi consiste cette nouveauté technologique qui pourrait révolutionner l’avenir de la transplantation cardiaque.

En quoi consiste cette machine ?

Tous les organes ont besoin d’oxygène pour vivre et le cœur, se contractant en continu, en est particulièrement demandeur. Afin de préserver cet organe, après prélèvement, les médecins l’arrêtent et le refroidissent. « En diminuant son métabolisme, il ne consomme plus beaucoup d’oxygène, explique le professeur de chirurgie cardiaque. C’est un peu comme s’il était en hibernation. » Avec cette technique de conservation actuelle, le greffon peut tenir jusqu’à quatre heures dans une glacière.

La machine de perfusion ex vivo, fabriquée par la société suédoise Xvivo, contenant le greffon de coeur et traversant l'Atlantique.
La machine de perfusion ex vivo, fabriquée par la société suédoise Xvivo, contenant le greffon de coeur et traversant l'Atlantique. - The Lancet

Mais ça, c’était compter sans la création d’une machine de perfusion ex vivo fabriquée par la société suédoise Xvivo. « Grâce à une petite pompe, cette machine va perfuser le cœur en continu avec du sang, de l’oxygène et différents produits permettant de le protéger, poursuit le médecin. Grâce à cela, le niveau de préservation est très étendu. »

Qu’est-ce que ça change concrètement ?

En passant de quatre à six voire douze heures de conservation, davantage de cœurs pourraient être greffés. « Cela nous permettrait d’avoir accès à des greffons auxquels on n’a pas accès actuellement car les durées de transport sont rédhibitoires. » En Guadeloupe et en Martinique, par exemple, il n’existe aucun programme de transplantation cardiaque et les cœurs qui auraient la possibilité d’être greffés sont donc, pour l’instant, perdus. « Les greffons pourraient traverser l’Atlantique et bénéficier à un patient en métropole, sachant que les Antillais sont transférés dans l’Hexagone pour être transplantés. »

Au 1er janvier 2024, 21.866 personnes étaient en attente d’une greffe d’organe, tout organe confondu. Parmi elles, se trouvaient 11.422 patients en liste d’attente active, selon l’agence de la biomédecine.

Ce gain de temps pourrait aussi donner lieu à une mutualisation des prélèvements. « On pourrait imaginer une équipe locale qui prélève le cœur, le met dans la machine et l’envoie par TGV ou par avion », se projette le professeur. Enfin, dernier avantage : avoir le temps de s’organiser. « Cela nous permettrait d’organiser les transplantations dans de meilleures conditions notamment pour des transplantations très compliquées. »

Quelles sont les prochaines étapes ?

Pas d’emballement toutefois, il s’agit pour l’heure d’études cliniques. Si la machine est en cours de marquage CE (conformité européenne) pour une conservation de six heures, Guillaume Lebreton souhaite aller plus loin avec ce premier cas clinique. « Des expérimentations animales avaient montré que c’était possible d’aller au-delà et c’est ce qu’on essaie de prouver avec cette étude », insiste-t-il.

A terme, le but est de conserver, dès que possible, le cœur pendant douze heures et que cela devienne le processus standard. Détail non négligeable : une étude vient d’être réalisée et montre que ce processus permettrait en plus d’améliorer la qualité des résultats de transplantation. Un double espoir.

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