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Le «New York Times» poursuit en justice Microsoft et OpenAI pour violation des droits d’auteur

Le grand quotidien new-yorkais accuse l’éditeur le principal investisseur de ChatGPT d’avoir utilisé des millions d’articles pour entraîner le logiciel d’intelligence artificielle sans autorisation. Il estime le préjudice subi à «plusieurs milliards de dollars»

Le patron de Microsoft, Satya Nadella (à droite), et celui d’OpenAI, Sam Altman, à San Francisco le 6 novembre 2023. — © AP Photo/Barbara Ortutay
Le patron de Microsoft, Satya Nadella (à droite), et celui d’OpenAI, Sam Altman, à San Francisco le 6 novembre 2023. — © AP Photo/Barbara Ortutay

ChatGPT remet-il en question le droit d’auteur? La question était soulevée par des artistes, traducteurs et écrivains, qui s’estimaient copiés par l’intelligence artificielle (IA) générative, c’est au tour du New York Times de porter l’affaire devant les tribunaux américains.

Le quotidien américain a lancé mercredi des poursuites, auprès d’un tribunal fédéral à New York, à l’encontre d’OpenAI, créateur du logiciel ChatGPT, ainsi que de Microsoft, son principal investisseur, pour violation des droits d’auteur.

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En cause, selon la plainte, le modèle de développement des IA génératives, et en particulier ChatGPT, qui «repose sur des modèles d’apprentissage massif construits en copiant et en utilisant des millions d’articles du Times protégés par les droits d’auteur».

Une «importance particulière» donnée aux contenus du «Times»

«Comme la plainte l’explique, Microsoft et OpenAI ont utilisé notre travail pour développer et commercialiser leurs produits d’IA générative sans avoir la permission du Times», a déclaré à l’AFP une porte-parole du quotidien estimant qu’il s’agit bien d’une «violation des droits d’auteur en termes de contenu et de travail journalistique».

Et les conséquences financières ne sont pas négligeables, estime le quotidien, qui considère que le préjudice subi, dans les faits comme d’un point de vue légal, représente «plusieurs milliards de dollars». Interrogés par l’AFP, ni Microsoft ni OpenAI n’ont pour l’heure fait de commentaire.

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Preuve, selon le NY Times, que les développeurs de ChatGPT ont parfaitement conscience de la «valeur du travail» réalisé par ses journalistes, ils «ont donné aux contenus du Times une importance particulière dans la construction de leur modèle d’apprentissage».

Or, comme le rappelle le quotidien, «pour produire du journalisme de qualité, le Times investit énormément de temps, d’argent, d’expertise et de talent, tant dans sa rédaction que dans l’ensemble des fonctions et technologie de support».

Brèche potentielle

Mais si «le Times et ses pairs ne peuvent pas contrôler l’usage de leurs contenus, c’est leur capacité à les monétiser qui sera remis en question. Avec moins de revenus, ces organisations auront moins de journalistes disponibles», entraînant une baisse tant de la qualité que de la quantité de la production rédactionnelle.

Le journal assure cependant avoir voulu éviter d’en arriver à la confrontation judiciaire avec Microsoft et OpenAI, en ayant cherché à négocier un accord permettant de «recevoir une compensation adéquate pour l’utilisation de ses contenus».

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OpenAI s’est d’ores et déjà entendu avec le groupe de médias allemand Axel Springer, cependant l’accord ne concerne pas l’utilisation des contenus des médias du groupe pour entraîner son IA générative mais l’intégration de ces contenus dans les réponses aux requêtes des utilisateurs de ChatGPT.

En l’espèce, l’action en justice du New York Times pourrait ouvrir une brèche et représenter une potentielle nouvelle source de revenus pour les médias partout dans le monde.

Course effrénée

Car les IA génératives, qu’il s’agisse de textes ou d’images produits en réponses à des requêtes écrites, comme ChatGPT ou Midjourney, sont construites sur un algorithme entraîné grâce à l’immense quantité de données disponibles en ligne, notamment via les réseaux sociaux, le plus souvent sans l’autorisation de leurs créateurs.

Or, depuis le lancement de ChatGPT, il y a un an, les géants de la Silicon Valley se livrent une course effrénée en la matière, pour développer des outils permettant de créer des textes, images ou lignes de code d’un niveau équivalent à ceux produits par des humains, augmentant de fait l’usage de ces contenus pour y parvenir.

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Des voix se sont élevées pour dénoncer l’usage de leur production afin de développer des outils capables de les créer. D’ores et déjà des illustrateurs se retrouvent concurrencés par ces IA génératives entraînées grâce à leur producteur et qui sont utilisés désormais pour illustrer des publicités par exemple.

Actions de groupe

Plusieurs auteurs de livres à succès, dont l’auteur de «Game of Thrones» George R.R. Martin, ont lancé une action de groupe contre OpenAI, l’accusant d’avoir violé leurs droits d’auteur.

Et d’autres entreprises, à commencer par les majors du secteur musical, en ont fait de même contre l’entreprise Anthropic, qu’ils accusent d’avoir utilisé les paroles de chansons pour développer son IA générative musicale.

«Les lois sur les droits d’auteur protègent notre journalisme. Si Microsoft et OpenAI veulent utiliser notre travail pour un usage commercial, la loi les oblige à demander d’abord la permission. Ils ne l’ont pas fait», a insisté une porte-parole du New York Times.