Dans un rapport, le Secours catholique pointe du doigt une "féminisation de la pauvreté"

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Dans un rapport, le Secours catholique pointe du doigt une "féminisation de la pauvreté"

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Le Secours catholique a accueilli plus d'un million de personnes l'an dernier [photo d'illustration].
Le Secours catholique a accueilli plus d'un million de personnes l'an dernier [photo d'illustration].
© Maxppp - IP3 PRESS

Dans son rapport sur l'état de la pauvreté, dévoilé ce mardi, le Secours catholique note une "féminisation de la pauvreté". Il met en avant que "les premières victimes de la pauvreté sont les femmes, et surtout les femmes avec enfants". Elles représentent plus d'un quart des ménages accompagnés.

Un nouveau cri d'alarme face à l'augmentation de la  pauvreté. Après les  Restos du cœur et le  Secours populaire, c'est au tour du Secours catholique d'alerter sur la situation des plus précaires en France . "Dans un contexte de forte inflation sur l’alimentation et l’énergie, nos statistiques montrent une nette aggravation de la pauvreté en 2022, qui impacte fortement les personnes accompagnées par le Secours catholique", indique l'association dans son rapport "État de la pauvreté 2023", dévoilé ce mardi. "La pauvreté s’aggrave en France. Et elle touche en premier les femmes", souligne le Secours catholique, qui a accompagné l'an dernier plus d'un million de personnes.

La part des femmes accueillies par l'association augmente années après années, constate-t-elle. Ainsi, elles représentaient "57,5 % des adultes rencontrés en 2022" contre "51 % en 1989". "Les premières victimes de la pauvreté sont donc les femmes, et surtout les femmes avec enfants", souligne le rapport.

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Plus d'un quart des ménages accueillis sont des "mères isolées"

Parmi les pistes avancées par l'association pour expliquer cette "féminisation de la pauvreté", l'association pointe la charge des enfants, qui revient dans une grande majorité des cas à la mère plutôt qu'au père. "Les ruptures conjugales, les traumatismes sont une des raisons majeures pour lesquelles des personnes se tournent vers les associations. 22 % des femmes seules et des mères isolées rencontrées au Secours catholique mentionnent ainsi une séparation, un abandon ou un divorce récent", indique l'association. Des divorces qui sont de plus en plus fréquents et "ce sont les femmes qui subissent davantage le poids des ruptures conjugales et qui assument, trop souvent seules, la charge des enfants". Ainsi, ces "mères isolées" représentent plus d'un quart des ménages accueillis par le Secours catholique, contre 3,3 % pour les pères isolés.

Ces mères isolées sont majoritairement jeunes (les deux tiers ont moins de 43 ans) et de nationalité française (63 %). Leur niveau de vie médian est de 583 euros par mois. "La pauvreté qui les touche montre que les mesures prises en leur faveur ne sont pas suffisantes. Pourtant, elles se démènent pour trouver des solutions. Elles sont plus souvent actives que d’autres catégories de ménages, mais les revenus qu’elles tirent de leur emploi (pour un quart d’entre elles) ou du chômage ne suffisent pas à subvenir aux besoins de leurs enfants", souligne le Secours catholique.

Des situations économiques plus fragiles

Le Secours catholique relève que "les enfants pèsent fortement sur l’activité professionnelle des femmes". Elles sont plus souvent "inactives" que les hommes et lorsqu'elles occupent des emplois, ceux-ci sont "relativement plus précaires" et plus souvent à temps partiel (34% contre 16% pour les hommes). Ces temps partiels sont "le plus souvent subis" et "ne permettent pas de sortir de la pauvreté", poursuit l'association. Dans un couple, la présence d’enfants impacte "plus particulièrement les femmes qui seront davantage éloignées de l’emploi que les hommes au sein de ces ménages", ajoute l'association.

Aussi, même si les ménages reçoivent des allocations familiales, "elles ne suffisent pas à compenser les charges liées aux enfants. Inversement, parmi les quelques femmes rencontrées vivant avec un niveau de vie supérieur au seuil de pauvreté, on retrouve principalement des femmes vivant sans enfants."

L'association rappelle par ailleurs que "sur un million de personnes accompagnées par l’association, 475.000 sont des enfants. Cela est inacceptable pour un pays comme la France en 2022."

Une féminisation de la population étrangère

Le Secours catholique observe aussi une féminisation de la population étrangère depuis 2019, renforcée avec la guerre en Ukraine puisque "trois quarts des personnes de nationalité ukrainienne accueillies récemment sont des femmes, le plus souvent avec enfants", note l'association.

Ces femmes étrangères "sont particulièrement touchées par le mal-logement (55 % en 2022, contre 40,9 % en 2012)" et "une majorité" d'entre elles vivent "dans des hébergements d’urgence ou des logements très précaires", même si elles ont des enfants. "Ces femmes étrangères, souvent d’âge actif, sont maintenues dans la misère, ainsi que leurs enfants, tant que leur statut administratif précaire ne leur permet pas de travailler, alors même qu’elles le souhaiteraient et que c’est une des meilleures manières de s’intégrer et de préparer l’avenir", déplore l'association.

"Ce n’est pas une société qui prend soin"

Le Secours catholique dresse une liste de recommandations pour améliorer la situation des plus précaires, et notamment des femmes. Il rappelle notamment que "l'octroi d’un revenu vital ne doit souffrir d’aucune contrepartie" et demande de "garantir une rémunération décente aux personnes en emploi", "d'indexer les minimas sociaux sur le Smic et de revaloriser et d’étendre le RSA" ou encore de "prendre toutes les mesures permettant aux parents en précarité de garantir à leurs enfants l’accès à une alimentation saine, à un logement correctement chauffé, aux vacances, aux loisirs et à la culture".

"Les associations n’ont ni les capacités, ni la vocation de suppléer les défaillances de l’action publique", rappelle le Secours catholique. "Quand 16 % des Français disent ne pas manger à leur faim, la seule réponse ne peut pas être d’augmenter l’aide alimentaire. Contraindre des millions de mères de famille à quémander un colis pour nourrir leurs enfants, ce n’est pas une société qui prend soin. N’apporter de réponse qu’à une personne sur deux qui appelle le 115 pour avoir un toit où dormir, pas davantage", ajoute l'association.

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