TribunalA la barre, les prévenus cités pour cyberharcèlement nient leur implication

Procès Magali Berdah : « Ce n’est qu’un message »… Cités pour cyberharcèlement, les prévenus nient leur implication

TribunalAu deuxième jour du procès, trois prévenus soupçonnés de cyberharcèlement ont dû expliquer à la barre les messages adressés à Magali Berdah
Magali Berdah : 28 personnes jugées pour cyberharcèlement
Lina Fourneau

Lina Fourneau

L'essentiel

  • Lors du procès des personnes soupçonnées d’avoir cyberharcelé Magali Berdah, qui se tient jusqu'au 5 décembre, treize prévenus doivent expliquer s’ils reconnaissent ou non avoir harcelé l’agente d’influenceurs.
  • Pourtant, pour la plupart, il est difficile de qualifier le terme « cyberharcèlement ». Certains justifieront ces messages par « de la colère » contre les influenceurs. D’autres avanceront « des problèmes personnels ».
  • Pour rappel, le cyberharcèlement est défini comme « un acte agressif, intentionnel, perpétré par un individu ou un groupe d’individus au moyen de formes de communications électroniques ».

Dans les couloirs du très moderne tribunal de Paris, un prévenu vient à notre rencontre à la fin d’une longue journée de procès. « Moi je n’ai rien fait, j’ai juste envoyé un simple message », certifie-t-il. Lui est actuellement – et ce jusqu’au 5 décembre – jugé dans l’affaire de cyberharcèlement contre Magali Berdah. Un « simple message » qui, si son caractère antisémite n’a pas été retenu, faisait allusion à une sombre période de l’Histoire en lien avec la religion juive de la partie civile. Parmi les treize prévenus cités pour cette affaire de cyberharcèlement, beaucoup auront des explications très différentes, mais peu réaliseront au moment des faits l’action de « cyberharcèlement ». Déni ou simple effet de groupe, l’enfer du cyberharcèlement, c’est souvent les autres.

Ce mardi 28 novembre en est le parfait exemple. A la barre de la 10e chambre correctionnelle, trois prévenus ont défilé pour raconter et justifier leur propre vision des messages envoyés pendant la période concernée par l’affaire, entre mai et septembre 2022. Pour Nicolas L., trentenaire travaillant dans le secteur du BTP, il y avait la colère. Les messages auraient été envoyés « sous le feu de l’action » pour critiquer ce qu’il appelle « la culture du vide ». « J’avais des problèmes personnels à ce moment-là », ajoutera-t-il. Son message aurait été envoyé « pour avoir des explications » sur le milieu de l’influence qu’il semble détester. « Si je l’avais croisé dans la rue, je n’aurais pas dit "grosse conasse". J’aurais demandé des explications ». Pourtant, à la question de savoir s’il réalise avoir participé à un cyberharcèlement de groupe, aucune réponse ne sera réellement prononcée. « Je ne pensais pas que mon message serait considéré comme harcèlement et menace de mort. Ils ont été envoyés soudainement, à une certaine heure ».

« Te finir », un langage courant sur Twitter

Arrive le tour de Mathias D., ancien coach sportif de 34 ans reconverti dans le marketing. Sur la même période, il aurait envoyé des menaces de mort à Magali Berdah : « On veut juste te finir ». Lui explique n’avoir été au courant de rien de l’affaire Booba-Berdah. Mais il aurait été victime d’une arnaque de plus de 1.000 euros de la part de l’influenceur de Marc Blata. « J’avais un sentiment d’impuissance, plus que de la méchanceté ». Ses excuses seront timides. Comment expliquer le lexique utilisé dans ses messages envoyés à Magali Berdah ? « J’estime que c’est un langage dans la vie de tous les jours qui n’est pas adapté, un langage Twitter utilisé assez fréquemment. L’expression "finito" est souvent utilisée sur Twitter ».

En fin de journée, Martin H., 31 ans, s’avance finalement à la barre. Il se décrit lui-même comme « humaniste » et sera le seul pour l’instant à demander pardon. « J’aimerais présenter mes plus plates excuses à Madame Berdah. Il n’y a pas de fondements réels à aux propos envoyés ». Le gestionnaire de patrimoine Parisien ne trouvera toutefois aucune justification à donner pour expliquer ses messages : « Tu vas mourir, toi et ton nazi de mari. Pauvre pute. On va écarteler ». Ce dernier terme viendrait, selon Martin H., d’une chanson de Booba – qui s’il a toute son importante ce procès, n’a pas été cité comme prévenu. « J’assume ce que j’ai fait par contre je ne peux pas être capable d’expliquer ce que j’ai dit », expliquera Martin H. lors du procès, avouant même s’être écarté des réseaux sociaux depuis son interpellation. Lui aussi justifiera « une période personnelle un peu compliquée » entre une reconversion professionnelle et des problèmes dans son couple.

« Je ne me sens pas concerné »

Mais parmi les trois prévenus, aucun n'admet avoir participé à un cyberharcèlement de groupe. Aucune intention violente n’a été démontrée. « Je n’ai jamais vécu de cyberharcèlement. Après avoir réfléchi, je me suis dit que c’était un message de plus », soulignera Nicolas L. avant d’expliquer qu’il ne reconnaît pas le terme cyberharcèlement dans son cas. « Ce n’était pas un message répété. Je ne me sens pas concerné ». S’il n’a souhaité « aucune dégradation physique ou mentale », Mathias D. précise qu’il n’était au courant de rien de la vague de haine en ligne. « Je ne justifie pas le fait que les influenceurs reçoivent des menaces de mort, mais ça fait partie du métier de recevoir des messages ».

Enfin Martin H., lui, n’avait pas pris conscience que ses messages puissent « faire mal et atteindre ». Il ne se souvient plus réellement d’ailleurs de ses messages et se questionnera même sur le fait d’en être l’émetteur. « Des communications, on en envoie beaucoup. Je ne me souviens juste pas avoir envoyé ce type de messages ».

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