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Dysfonctionnements

Dans le sillage de la FFF, ces autres instances du sport français dans la tourmente

JO Paris 2024dossier
Rugby, Comité olympique et sportif, sports de glace… A quelques mois de deux grands rendez-vous, d’autres fédérations voient elles aussi leur direction dans la tourmente.
par Romain Métairie
publié le 10 janvier 2023 à 8h02

Amélie Oudéa-Castéra a du boulot. La ministre des Sports doit composer avec les déboires de Le Graët, et avec lui la FFF. Mais pas que : ces derniers mois, plusieurs instances du sport français traversent des zones de turbulences plus ou moins fortes. D’autant plus inquiétant que les dysfonctionnements concernent des structures liées aux deux gros rendez-vous sportifs bientôt organisés en France : le Mondial de rugby 2023 et les JO 2024.

La FFR joue emmêlée

La Fédération française de rugby (FFR) offre en ce moment une concurrence coriace à la fédé de foot lorsqu’il s’agit d’extra-sportif. Dans une missive adressée à la ministre «AOC» la veille de Noël, le boss de la FFR, Bernard Laporte, s’est engagé à céder «l’ensemble de ses prérogatives» à un président délégué – Patrick Buisson, vice-président chargé du rugby amateur – qu’il a proposé lui-même le 6 janvier au bureau fédéral, avant de le soumettre au vote des clubs «au plus tard lors de la troisième semaine de janvier».

Ce changement de gouvernance doit sceller temporairement le feuilleton de l’affaire Laporte-Altrad. Le premier cité a été condamné le 13 décembre à deux ans de prison avec sursis en première instance pour avoir noué un «pacte de corruption» avec l’homme d’affaires et président du club de Montpellier, Mohed Altrad. Sa peine assortie d’une interdiction d’exercer n’étant pas immédiatement exécutoire, il a fallu la pression conjointe d’AOC, de la Ligue nationale de rugby (LNR) et du comité d’éthique de la FFR pour qu’il se mette en retrait jusqu’à son procès en appel, lequel ne devrait intervenir qu’après le Mondial 2023.

Le Comité olympique français se met à la lutte

Autre crise, peut-être la plus symbolique : celle que traverse le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), organe censé assurer la bonne marche du mouvement sportif français, qui plus est à un an et demi de Paris 2024. Or, depuis plusieurs mois, rien ne va à bord du vaisseau. Sa pilote, Brigitte Henriques, est fragilisée autant qu’éreintée après un épisode houleux survenu à la rentrée de septembre. Après des mois de relations conflictuelles, la présidente élue en juin 2021 a décidé de se séparer de son bras droit, Didier Séminet, avant de déposer plainte contre lui pour «violences psychologiques». Puis de faire une pause deux mois durant, remplacée à la hâte par un quatuor de dirigeants. Non sans courroucer les chefs de file des autres fédés : un front anti-Henriques s’est cristallisé autour de son prédécesseur, Denis Masseglia. Jamais depuis sa création l’institution n’avait alors connu telle situation.

L’ex-vice présidente de la FFF est revenue aux affaires début décembre. Entretemps, Didier Séminet a répliqué en portant plainte à son tour contre Henriques le 7 novembre pour «dénonciation calomnieuse» et «abus de confiance», estimant avoir vécu «un véritable lynchage médiatique». Au moins Brigitte Henriques a-t-elle eu le temps de rembourser la totalité des sommes réglées à tort par le CNOSF – 4 184 euros –, qualifiées d’«erreurs» dans un audit interne. Ils oscillent entre notes de taxis (Mediapart a révélé le cas de plusieurs trajets effectués par la fille d’Henriques), doubles facturations et dépenses dont les justificatifs étaient manquants.

La fédé des sports de glace patine

Moins exposée médiatiquement, la Fédération française des sports de glace (FFSG) charrie aussi son lot de casseroles. Sa nouvelle présidente, Gwenaëlle Noury, s’est récemment illustrée avec une intrigue aux ressorts proches de celle d’Henriques : le limogeage de son secrétaire général, Patrice Martin. Ce dernier décrivait les hautes sphères de la fédération avec les termes «copinage», «entre-soi», «méthodes d’un autre temps» et «intérêt personnel». Pour lui, la FFSG vit en «autarcie», fonctionne «sans se soucier des règles de bon fonctionnement d’une association». Il évoque des «décisions occultes», parle de «mails et infos qui disparaissent». Surtout, il évoque le fait que «beaucoup de gens» soient en contact avec Didier Gailhaguet, ex-souverain de la discipline pendant deux décennies, qui tirerait encore les ficelles de la fédération.

Sa mainmise a pris fin en février 2020, avec sa démission à la suite d’une longue bataille avec la ministre des Sports de l’époque, Roxana Maracineanu, nourrie par les révélations de la patineuse Sarah Abitbol. Dans un livre, cette dernière révélait les viols perpétrés par son entraîneur Gilles Beyer à son encontre lorsqu’elle avait entre 15 et 17 ans, Gailhaguet étant accusé de l’avoir protégé. Récemment au micro d’Europe 1, Sarah Abitbol s’est dite «très inquiète» par ce nouveau bureau fédéral. «Il y a eu du lobbying et malheureusement, [Gailhaguet] est revenu par la fenêtre.» Une inspection décidée début octobre par la ministre des Sports doit permettre de tout mettre au clair, tant la gouvernance que les aspects financiers et comptables.

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