Désormais l’avortement n’est plus un “délit” au Mexique, résume le quotidien mexicain El Economista. Dans une décision rendue mercredi 6 septembre, la Cour suprême mexicaine a estimé que le “système juridique qui pénalise l’avortement dans le Code pénal fédéral est inconstitutionnel” parce qu’il “viole les droits humains des femmes et des personnes en capacité de gestation”. Concrètement, cela signifie que “les institutions sanitaires fédérales doivent fournir des services de prise en charge de l’IVG [aux femmes] dans tout le pays”, précise El Economista.

En plus de garantir l’accès à l’avortement, la décision de la plus haute institution judiciaire du Mexique protège aussi les médecins pratiquant des IVG, qui ne peuvent désormais plus “être pénalisés ni poursuivis légalement”, explique Excelsior.

“Un véritable accès à l’avortement est en train de se forger”

Le jugement de la Cour suprême est “un pas de plus vers la liberté” des femmes “d’interrompre leur grossesse” après “le précédent historique de 2021”, note El País Mexico.

Il y a tout juste deux ans, le 7 septembre 2021, les juges avaient déjà estimé que la pénalisation de l’avortement était inconstitutionnelle : ils avaient à l’époque invalidé l’article du Code pénal du Coahuila (l’un des 32 états de la Fédération) prévoyant une peine de prison pour les femmes avortant volontairement. “La bataille contre la criminalisation avait été gagnée, de sorte qu’il n’y ait plus de femmes emprisonnées pour avoir avorté. Aujourd’hui, un véritable accès à l’avortement est en train de se forger”, estime l’édition mexicaine du quotidien espagnol.

Des obstacles demeurent toutefois. “La mise en œuvre reste la plus importante”, a expliqué à El País Mexico la militante prochoix Isabel Fulda. Il “existe un grand écart entre l’avortement autorisé et sa pratique”, souligne la directrice adjointe du Gire, le Groupe d’information pour la reproduction choisie, en évoquant notamment “les besoins en matière de fournitures et de formation du personnel médical”.

Pour l’édition hispanophone du New York Times, “la décision du Mexique, un pays majoritairement catholique de 130 millions d’habitants, met en évidence le leadership que les pays d’Amérique latine assument dans l’élargissement des droits reproductifs”. Outre le Mexique, des pays comme la Colombie, l’Argentine, l’Uruguay et la Guyane ont légalisé ou décriminalisé l’avortement ces dernières années, rappelle le quotidien. Une “tendance régionale” qui “contraste avec celle des États-Unis”, pays voisin dont la Cour suprême a, le 24 juin 2022, annulé son arrêt Roe vs Wade, qui garantissait depuis 1973 le droit constitutionnel des Américaines à avorter.

Deux candidates à la présidentielle opposées à la criminalisation de l’IVG

Pour le New York Times, “la décision de la Cour suprême” du Mexique reflète “de profonds changements dans la société mexicaine et au sein de certaines de ses institutions” : une “grande partie du Mexique reste culturellement conservatrice, mais des décennies de militantisme féministe ont changé la façon dont de nombreuses personnes dans le pays perçoivent les droits des femmes”.

La décision de la Cour suprême est d’ailleurs tombée quelques heures seulement avant que les Mexicains n’apprennent que deux femmes se disputeront pour la première fois la présidence en 2024. L’ex-maire de Mexico Claudia Sheinbaum a en effet été désignée mercredi candidate du parti au pouvoir, Mouvement de régénération nationale (Morena, gauche), rapporte El Universal. Elle aura pour principale adversaire la sénatrice Xóchitl Gálvez, investie candidate dimanche après avoir dominé les primaires d’un front regroupant trois partis d’opposition. Toutes deux soutiennent la décriminalisation de l’avortement, remarque le New York Times.