Ce sont des données venues des confins du monde. Peut-être aussi des signes précurseurs d’un changement d’ère. Le 10 septembre, à la fin de l’hiver austral, la banquise antarctique a atteint son maximum annuel. Ce jour-là, les satellites n’ont recensé que 16,96 millions de kilomètres carrés. Il s’agit de la surface la plus faible de l’histoire des relevés, quasiment deux millions en dessous de la moyenne 2011-2020. La suite d’une tendance.
En février, à la fin de l’été dans l’hémisphère Sud, la banquise autour du pôle Sud avait beaucoup fondu, atteignant son minimum historique, avec 1,792 million de kilomètres carrés. « Il est de plus en plus évident que le système de glace de mer de l’Antarctique est entré dans un nouveau régime, caractérisé par une influence beaucoup plus forte des eaux océaniques chaudes », a analysé l’institut américain National Snow and Ice Data Center dans une note du 4 octobre.
Une étude publiée jeudi 12 octobre dans la revue Science Advances est aussi alarmante. Grâce aux satellites, des chercheurs de l’université de Leeds ont scruté 162 plates-formes de glace qui entourent l’Antarctique. Continuité de la calotte glaciaire du continent, ces banquises sont des lieux névralgiques, agissant comme un bouchon entre les glaciers et la mer. Selon eux, 71 d’entre elles, notamment celles situées à l’ouest du continent (barrière de Getz, glacier de l’île du Pin), ont vu leur volume diminuer entre 1997 et 2021. La stabilité ou la croissance de celles situées à l’est n’a pas compensé cette perte, aboutissant à un rejet net de 7 500 milliards de tonnes d’eau de fonte dans les océans sur cette période. « Cette perte de masse est due à la fois à l’amincissement de la base et au retrait de l’extrémité de ces plateformes », peut-on lire dans l’étude.
L’énigme de l’Antarctique
Ces nouveaux indices sont-ils des signes de l’influence du réchauffement climatique d’origine humaine, ou le début d’un changement de cycle dans la variabilité naturelle ? Pendant de nombreuses années, l’Antarctique a été une énigme. Alors que l’Arctique se réchauffe deux à trois fois plus vite que le reste du monde et que la banquise du pôle Nord inquiète tous les scientifiques, la zone du pôle Sud semblait réagir différemment. La glace qui l’entoure n’a cessé de s’étendre jusqu’à un niveau très haut, en 2016. Comme si le train de grandes dépressions et de courants océaniques (le Southern Annular Mode) qui ceinture le continent blanc contribuait à isoler un peu plus ces terres extrêmes.
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