L'entreprise française Decathlon a utilisé une « société-écran » pour continuer à vendre des vêtements en Russie après l'invasion de l'Ukraine, d'après une enquête du média d'investigation « Disclose ». Elle avait pourtant annoncé suspendre son activité.
Les affaires sont les affaires. Le groupe français d'articles de sport et de loisirs Decathlon a continué à livrer des vêtements au repreneur russe de ses magasins en passant notamment par une « société-écran » à Dubaï, selon une enquête publiée le 19 décembre par le média Disclose. Decathlon a par exemple livré aux magasins russes Desport des vestes de jogging Kalenji, de vestes de ski Wedze ou des pantalons et chaussures Quechua, pour un total d'au moins 12 millions de dollars (environ 11 millions d'euros).
A LIRE AUSSI : Le hijab de Decathlon, le voile et la défaite de la pensée
Pourtant, la plupart des groupes occidentaux ont quitté le pays après le début de la guerre en Ukraine. L'invasion russe de l'Ukraine, le 24 février 2022, avait déclenché des sanctions sans précédent et un exode de sociétés étrangères. L'exportation d'armes, d'articles de luxe ou de biens pouvant contribuer au renforcement des capacités industrielles russes sont interdites par l'Union européenne. Mais les articles de sport ne sont pas concernés par ces mesures. Le groupe Mulliez, propriétaire de Decathlon, est l'un des rares groupes français à avoir maintenu ses activités en Russie. Il y a notamment conservé Auchan, qui y réalise plus de 10 % de ses ventes.
Decathlon a menti
Problème : quelques semaines après le début de la guerre, Decathlon avait annoncé suspendre les activités commerciales de ses magasins et de son site internet en Russie. Plus d'un an après, à l'été 2023, le distributeur avait finalement reçu l'aval des autorités locales pour revendre 36 magasins à une société russe, ARM. Mais à leur réouverture en novembre, des produits Decathlon étaient disponibles dans ces magasins.
A LIRE AUSSI : Auchan, Lactalis, Dessange… Ces entreprises françaises justifient le maintien de leur présence en Russie
Selon les documents consultés par Disclose, le groupe a commandé en urgence des marchandises à ses fournisseurs asiatiques. Pour éviter que les cargaisons ne soient bloquées à la douane, une filiale de Decathlon domiciliée à Singapour les a achetées et faites transiter par Dubaï. La direction de Decathlon, qui n'a pas souhaité s'exprimer lundi soir, a affirmé à Disclose mettre « tout en œuvre pour faire cesser la revente, sur le territoire de la Fédération de Russie, de [ses] produits ». L'UE a adopté lundi un douzième paquet de sanctions contre la Russie, qui comprend notamment l'interdiction des importations de diamants russes sur le territoire européen.