POLITIQUE - Le vote a électrisé les débats dans l’hémicycle du Parlement européen. Les eurodéputés ont fini par adopter ce mercredi 12 juillet le projet de loi de restauration des écosystèmes, un texte-phare du Pacte vert de l’UE proposé par Bruxelles qui était combattu par les élus de droite et d’extrême droite. Un texte qui a énormément fait parler, tant ses soutiens que ses opposants, au point d’être érigé en symbole de la politique environnementale de l’Union européenne.
Malgré l’opposition farouche de la droite représentée par le Parti populaire européen (PPE), mais aussi de l’extrême droite et d’une partie du centre, le texte a été adopté avec 336 voix pour, 300 eurodéputés ont voté contre et 13 se sont abstenus. Au début de la session de votes, une motion de rejet du texte proposée par les conservateurs du PPE a été écartée à une courte majorité.
Le rapporteur du texte, l’élu César Luena, a déclaré à l’issue du vote : « Merci à vous, c’est une bonne loi. Je remercie tout spécialement les scientifiques et les jeunes qui nous ont poussés pour obtenir cette voix », rapporte Ouest-France sur place.
Restaurer terres et espaces marins
Ce premier feu vert du Parlement est une victoire pour la biodiversité. Ce texte vise en effet à imposer aux États membres des objectifs contraignants de restauration des terres et espaces marins abîmés par la pollution ou l’exploitation intensive, dans la lignée de l’accord de la COP15 à Montréal. Les Vingt-Sept vont devoir instaurer d’ici 2030 des mesures de restauration sur 20 % des terres et espaces marins à l’échelle de l’UE, puis d’ici 2050 sur l’ensemble des zones qui le nécessitent.
Pollution, urbanisation, exploitation intensive... selon Bruxelles, plus de 80 % des habitats naturels dans l’UE sont dans un état de conservation « mauvais ou médiocre » (tourbières, dunes et prairies tout particulièrement), et jusqu’à 70 % des sols sont en mauvaise santé.
Ce règlement européen est aussi soutenu par plus de 3 000 scientifiques qui ont expliqué que « les plus grandes menaces pour la sécurité alimentaire étaient le changement climatique et la dégradation de la nature ». Le commissaire européen à l’environnement, Virginijus Sinkevicius, a rappelé que cette loi sur la restauration de la nature était « la première grande loi européenne sur la nature depuis trente ans et un exemple unique au monde ».
Échec de la droite et de l’extrême droite
C’est également un triomphe pour les eurodéputés de gauche et écologistes qui ont voté en grande majorité pour ce projet de loi et un échec pour les conservateurs du PPE qui avaient dénoncé un texte nuisible à la production agricole et à l’activité économique. Le Parti populaire européen, première formation de l’hémicycle, a notamment dénoncé par la voix de l’élue française Anne Sander une mise à mort « de toute production économique, industrielle, forestière et agricole en Europe ».
Bruxelles « estime que geler purement et simplement 10 % de nos terres agricoles ne représente pas un danger pour notre sécurité alimentaire », a-t-elle encore critiqué. « Nous diminuerons peut-être nos émissions mais il faudra importer notre nourriture des quatre coins du monde, où les standards de production sont bien éloignés des nôtres ».
Des arguments repris par la puissante organisation agricole Copa-Cogeca, qui manifestait son opposition mardi devant le Parlement au nom d’une approche productiviste.
Version du texte « édulcorée » pour certains écologistes
L’ambition du texte a toutefois été revue nettement à la baisse. La position du Parlement est proche de celle adoptée le 20 juin par les États membres. Certains écologistes ont dénoncé l’adoption d’une version du texte bien moins contraignante en termes de protection de la biodiversité par rapport aux propositions initiales de la Commission européenne.
L’eurodéputée écologiste Caroline Roose a reconnu une « victoire au goût amer » et a déploré « l’obstruction de la droite » aboutissant à l’adoption d’une version « largement édulcorée ».
« Le Parlement européen a voté en faveur d’objectifs juridiquement contraignants visant à restaurer les zones naturelles dégradées », s’est cependant réjoui Greenpeace, saluant « le premier texte législatif depuis 30 ans pour protéger la biodiversité dans l’UE ».
Le groupe conservateur estime quant à lui avoir défendu une ligne soutenue par de nombreux électeurs, notamment du monde agricole, hostiles à des réglementations environnementales qu’ils jugent excessives. « Je suis bien sûr déçu, mais notre engagement n’a pas été vain. Je continuerai à défendre la volonté des habitants des zones rurales », a déclaré l’élu conservateur allemand Peter Liese.
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