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Mort de Nahel : pourquoi Florian M., le policier auteur du tir, a été libéré après une détention provisoire record

DÉCRYPTAGE - Soupçonné d’être l’auteur du tir qui a tué le jeune Nahel, le fonctionnaire de police a été remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire ce mercredi.

Florian M., 38 ans, a été remis en liberté par un juge d’instruction de Nanterre, ce mercredi 15 novembre. Soupçonné d’être l’auteur du tir qui a tué le jeune Nahel après un refus d’obtempérer en juin dernier, il a été mis en examen pour «homicide volontaire» et placé en détention provisoire. Il est désormais placé sous contrôle judiciaire et a, à ce titre, interdiction de se rendre à Nanterre, de détenir une arme, ou d'entrer en contact avec une personne constituée partie civile ou un témoin.

Les réactions pleuvent depuis, notamment de la part des syndicats de police où l’on affirme que la détention provisoire de Florian M. était injustifiée voire abusive. Mais que dit le droit à propos de cette mesure au caractère exceptionnel ?

La détention provisoire consiste à incarcérer une personne, présumée innocente, pour les besoins de l’enquête. Concrètement, elle «ne peut être ordonnée que s’il est démontré qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire», dispose l’article 144 du Code de procédure pénale (CPP). À savoir : conserver les preuves ou indices matériels, empêcher une pression du mis en cause sur les témoins ou victimes de l’affaire (dans le cas de Florian M., éviter le risque d’une concertation entre le mis en cause et ses collègues présents au moment des faits, NDLR), prévenir une récidive de l’infraction et garantir le maintien de la personne mise en cause à disposition de la justice. Le juge des libertés et de la détention tranche sur celle-ci lors d’un débat contradictoire en présence des avocats, qui font souvent valoir qu’une mesure de contrôle judiciaire strict permet le respect de ces critères.

«Paix sociale»

Depuis juillet, Florian M. avait fait plusieurs demandes de remise en liberté par la voix de son avocat, Me Laurent-Franck Liénard, toutes refusées jusqu’ici. Plus de quatre mois après son placement en détention provisoire, les juges d’instruction ont finalement estimé «que les critères légaux de la détention provisoire du policier incarcéré depuis le 29 juin 2023 n'apparaissaient plus remplis à ce stade de l'instruction», a fait savoir le parquet de Nanterre mercredi.

Reste que, comparée à de précédentes affaires de refus d’obtempérer incriminant des policiers, la détention provisoire de Florian M. s’avère «inédite par sa longueur», pointe Christophe André, maître de conférences en droit à la faculté de droit et de science politique de l'Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Comment l’expliquer ? «Dans le cas de ce policier, étant donné que la détention provisoire vise à préserver la sérénité de l'instruction, la justice a estimé qu'il y avait un vrai risque de concertation [entre le mis en cause et ses collègues, NDLR], mais aussi qu'il fallait préserver la paix sociale. Le risque que les émeutes ne fassent à nouveau flamber le pays ou que le policier puisse être en danger s'il était remis en liberté était réels», détaille-t-il. D’après lui, elle résulte aussi d’«un durcissement progressif de la loi ces dernières années, qui a fait de la détention provisoire -comme de la garde à vue- des mesures coercitives.» Jean-Éric Schoettl, conseiller d'État honoraire, va plus loin : «Quatre mois et demi de détention, c’est un record pour un policier. Cela montre une grande sévérité de la justice à l’égard de la profession, qui utilise de plus en plus la détention provisoire pour des policiers, tout comme le chef d’accusation d’homicide volontaire.»

En juillet dernier, alors que les cendres des violentes émeutes étaient encore chaudes, l'affaire Hedi avait déjà fait resurgir le débat sensible de la détention provisoire pour les policiers. Le fonctionnaire de police, soupçonné d'avoir gravement blessé un jeune homme d'un tir de LBD à Marseille dans la nuit du 1er au 2 juillet, avait été mis en examen pour «violences en réunion par personnes dépositaires de l'autorité publique» et été placé en détention provisoire. Dans la foulée, le directeur général de la police nationale Frédéric Veaux avait affirmé qu'«avant un éventuel procès, un policier n'a pas sa place en prison». Parallèlement, un mouvement de contestation avait traversé la profession via le dépot d'arrêts maladie. Quarante jours plus tard, le policier avait été remis en liberté et placé lui aussi sous contrôle judiciaire.

«Statut d’exception»

Dans les colonnes du Figaro , Jean-Éric Schoettl avait alors plaidé pour un «traitement pénal adapté» à l’égard des policiers compte tenu de leur profession : «Les policiers ne sont pas au-dessus de la loi», affirmait-il alors, mais «l'égalité entre policiers et citoyens ordinaires devant la loi pénale n'exclut pas la prise en compte de la nature spécifique des missions confiées aux forces de l'ordre et des conditions concrètes de leur exercice». Un «statut d’exception» que conteste Christophe André : «Il y a une égalité de tous devant la loi, il ne peut y avoir de statut exceptionnel qui protège les policiers. De la même façon, la présomption de légitime défense que revendiquent certains syndicats est une idée dangereuse.»

Et si la détention «peut s’apparenter à une pré-condamnation», il faut cependant revenir au droit, insiste-t-il : «Ce policier [Florian M., NDLR] a fait un peu plus de quatre mois de détention, ce qui est parfaitement dans les clous du point de vue de la justice» puisque dans le cas d’un «homicide volontaire», le CPP prévoit que la détention provisoire peut durer deux ans maximum. «Sa détention provisoire ne préjuge pas du fait qu'il sera condamné. C'est les preuves présentées au procès qui le détermineront. On verra donc à l'audience si celles-ci sont avérées ou non», conclut-il.

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86 commentaires
  • Bob44

    le

    Parce qu'il n'a fait que son travail. renvoi des parents de Nahel et de tous les émeutiers qui en sont originaires en Algérie

  • Styrnikov

    le

    Protéger la vie du mis en cause constitue un motif légal pertinent, mais certainement pas le maintien de la paix sociale.
    Sinon on finira par embastiller ceux qui déplaisent aux émeutiers sans aucune raison.

  • cocolaray

    le

    -je ne cmprends pas que l'on parle de NAEL à ce niveau......ce gosse de 17ans connaissait parfaitement ce qu'il l'attendrait si il y avait un problême , 17 ans ,,,,,?? MAIS IL N'avait pas le droit de conduire à son âge il est passé outre alors il aurait fallu faire les choses dans les règles

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