Emmanuel Macron retourne à l'Élysée : "nouvelle ère" ou continuité ?

Emmanuel Macron a remporté le 2d tour de la présidentielle, le 24 avril 2022 au Champ-de-Mars à Paris ©AFP - Ludovic Marin
Emmanuel Macron a remporté le 2d tour de la présidentielle, le 24 avril 2022 au Champ-de-Mars à Paris ©AFP - Ludovic Marin
Emmanuel Macron a remporté le 2d tour de la présidentielle, le 24 avril 2022 au Champ-de-Mars à Paris ©AFP - Ludovic Marin
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Le président réélu (fait inédit sous la Ve république, hors période de cohabitation) a promis hier soir une "méthode refondée".

Vous souvenez-vous de cette prophétie de Michel Houellebecq sur le "monde d’après" la pandémie : "il sera exactement le même, en un peu pire" prévoyait l’écrivain.

Cette prédiction s'appliquerait-elle au nouveau monde politique, accouché par cette élection présidentielle ? Le même, en un peu pire ? 

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Le président sortant reste à l’Élysée. Il réalise une performance politique inédite. Emmanuel Macron est le premier à se succéder à lui-même depuis 1962, hors période de cohabitation. Mais  avec un score plus serré qu’il y a cinq ans. Dans ces conditions, impossible de compter sur un état de grâce. L’élan donné par cette victoire - nette - est donc le même, en un peu pire.

Des opposants identiques  

Les opposants, eux aussi, resteront les mêmes. Hier soir, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon ont martelé qu’il faudrait compter avec eux. Tous deux avaient pourtant laissé entendre, au cours de la campagne, que celle-ci serait leur dernière.

“Plus que jamais, je poursuivrai mon engagement” a insisté la candidate du Rassemblement national hier soir. Autrement dit, je reste. Même message pour le dirigeant insoumis, qui a une nouvelle fois évoqué la possibilité de devenir Premier ministre, si le sort des urnes lui est favorable lors des législatives de juin.

LFI et RN, deux oppositions musclées, sabre au clair et verbe haut. Plus vindicatives que LR et le PS, ces cinq dernières années, qui ont souvent pratiqué une contestation modérée, parfois ambiguë. Du point de vue d’Emmanuel Macron, les oppositions seront donc les mêmes, en un peu pire.

Pourtant hier soir, le président sortant a essayé de tendre la main…

Emmanuel Macron a reconnu qu’une partie de ses suffrages étaient en fait des votes de barrage à son adversaire. Il a aussi promis que le quinquennat qui vient "ne sera pas la continuité de celui qui s’achève".

Mais comment raccommoder ces morceaux de France ? Certes, Emmanuel Macron n’est pas le président "le plus mal élu de la Ve République", contrairement à ce qu’a affirmé Jean-Luc Mélenchon hier soir. Cependant, avec un peu moins de 19 millions de voix et 39% des inscrits, si l’on prend en compte les bulletins blancs et nuls, l’assise n’est pas large.

Bien sûr, le président réélu pourra toujours rétorquer qu’avec ce mode de calcul, Marine Le Pen représente 27% des inscrits et Jean-Luc Mélenchon 16% des inscrits au premier tour. Il n’empêche, Emmanuel Macron doit faire ce qu’aucun de ses prédécesseurs n’a réussi avant lui.

**Pratiquer l’ouverture, en intégrant des idées et des forces politiques minoritaires. Sans se renier.  **Et sans verser dans le débauchage stérile de quelques personnalités, comme ce fut le cas en 2007 avec les ministres d’ouverture de Nicolas Sarkozy.

Au soir du premier tour, Emmanuel Macron avait promis d’”inventer quelque chose”, pour réunir, pour dialoguer au-delà de son camp, en changeant de méthode. Démarche indispensable, même si encore floue.

D’autant que la période qui s’ouvre juste après les législatives, c’est une période sans élection. Un long désert démocratique. Pas de scrutins intermédiaires avant 2026, hormis les européennes de 2024.  Il y a donc nécessité, d’ici là, de sortir de la posture solitaire - et de la conflictualité inféconde.

Soyons ici d’un optimisme mesuré : puisse la politique française devenir… la même, en un peu mieux.

Frédéric Says

La Question du jour
8 min

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