C’est un retour en catimini et par la petite porte qu’a fait Adrien Quatennens à l’Assemblée nationale, après sa condamnation pour violences conjugales. Le député, élu sous la bannière de La France insoumise (LFI) mais qui siège désormais comme non-inscrit, participait, mercredi 11 janvier, à une commission des affaires étrangères, comme on pouvait le constater en suivant ses travaux. Son président, le député du MoDem Jean-Louis Bourlanges, a d’ailleurs salué « l’arrivée dans [la] commission d’un nouveau collègue, M. Quatennens ».
A sa sortie, le trentenaire était attendu par une nuée de caméras. « J’exerce mon travail de parlementaire, j’applique et respecte la décision prise par mon groupe politique », a-t-il déclaré, accompagné par l’« insoumis » Carlos Martens Bilongo. Ce retour, après trois mois d’absence, n’avait pas été annoncé. Lundi 9 janvier, son avocate Jade Dousselin, faisait savoir au Monde qu’« aucune date n’avait été fixée », mais ne laissait pas entendre qu’il était aussi imminent. Surtout, il devait faire l’objet d’une communication. Samedi 7 et dimanche 8 janvier, aucun député « insoumis » contacté par Le Monde ne savait quand M. Quatennens avait l’intention de revenir au Palais-Bourbon. Les parlementaires de LFI ont été prévenus mercredi dans la foulée du retour de leur collègue par un message de Mathilde Panot sur une boucle interne. « Pour information, Adrien Quatennens est revenu aujourd’hui à l’Assemblée nationale, a écrit la présidente du groupe. Surtout, si on vous interroge, merci de ne pas ouvrir le feuilleton (…). Si on pouvait éviter les avis personnels de chacun, alors que la bataille des retraites commence, ça serait bien. »
Le député du Nord, condamné à quatre mois de prison avec sursis pour violences conjugales, et suspendu pour la même durée de la formation de Jean-Luc Mélenchon et du groupe parlementaire, avait annoncé, lors d’un entretien accordé à BFM-TV, le 14 décembre, qu’il reviendrait « probablement en janvier ».
Débat pas ouvert au sein de LFI
Cette interview, au cours de laquelle le député justifiait son comportement envers son ex-compagne, malgré sa condamnation, a créé un malaise au sein des membres de LFI, qui venaient juste de prendre une sanction à l’égard de leur camarade. Certains jugent qu’il a porté préjudice au combat contre les violences sexistes et sexuelles, au cœur du combat du mouvement, en s’exprimant auprès de BFM-TV et souhaitent désormais un alourdissement de la sanction infligée par le parti. Pour le moment, le débat n’a pas été ouvert au sein de LFI. Mercredi, la députée de Paris Danielle Simonnet a souhaité dans une boucle interne « une clause de revoyure avant la fin des quatre mois », ajoutant : « Ou au moins, qu’on échange à ce sujet ».
Le retour d’Adrien Quatennens a provoqué la colère des féministes. « Sa place n’est pas à l’Assemblée nationale, quelle honte ! », s’est emporté le collectif NousToutes. « J’ai honte de notre représentation nationale et je suis en colère contre les politiques qui permettent cela », a corroboré la conseillère Europe Ecologie-Les Verts de Paris Raphaëlle Rémy-Leleu.
A la sortie de l’Assemblée nationale, la présidente du groupe Renaissance, la députée Aurore Bergé, a déclaré à la presse que le retour de M. Quatennens n’avait « rien de naturel, rien de banal, rien de normal ». Elle a précisé que l’ensemble des députés Renaissance déposaient mercredi une proposition de loi visant « à créer une peine complémentaire d’inéligibilité pour les personnes condamnées pour des faits de violences conjugales ou intrafamiliales ». Olivier Véran a fait observer qu’Adrien Quatennens « aurait pu faire le choix de démissionner, de se représenter devant ses électeurs pour garder de la légitimité ». Mais le porte-parole du gouvernement a remarqué que « ce n’est pas le choix qu’il a fait, ça lui appartient ».
Pour l’extrême droite, « Adrien Quatennens devrait démissionner et se faire réélire, si vraiment il voulait revenir la tête haute ». Marine Le Pen, députée du Pas‑de‑Calais et présidente du groupe Rassemblement national, a réagi lors d’une conférence de presse, et dénoncé « l’hypocrisie de La France insoumise révélée au grand jour par l’affaire Quatennens ».
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