Depuis samedi 4 mars, jour marquant le début de la semaine en Iran, les empoisonnements en série dans les établissements scolaires réservés pour la grande majorité aux filles se sont multipliés à une vitesse inquiétante. Durant la journée de dimanche, plus de deux cents écoles élémentaires, collèges et lycées, partout dans le pays, ont été la cible d’intoxications d’origine suspecte. Il est impossible d’évaluer le nombre de jeunes filles ayant été transportées à l’hôpital, et le nombre des victimes dans un état critique. Ces dernières se plaignent de difficultés respiratoires, de nausées et de maux de tête. Ces intoxications surviennent alors que l’Iran est traversé par un soulèvement inédit depuis la mort d’une jeune femme, en septembre 2022, à l’issue de sa garde à vue pour sa tenue « non appropriée ».
Les empoisonnements ont commencé fin novembre 2022 dans la ville religieuse de Qom, avant d’être observés dans plusieurs parties du pays. Les responsables de ces actes, survenus à Téhéran, Racht (nord du pays), Machhad (nord-est), Bandar-e Abbas (sud), Kermanshah (ouest), notamment, n’ont toujours pas été identifiés. Ajoutant à l’inquiétude et à l’indignation de la population, les autorités iraniennes, au lieu d’agir, dénoncent l’action de supposés « ennemis de l’Iran », ou font porter la responsabilité de cette vague aux jeunes filles qui en sont victimes, sous le prétexte qu’elles tenteraient ainsi de créer le désordre dans leurs établissements. Ces derniers mois, les jeunes Iraniennes ont été en première ligne des manifestations contre le régime. Beaucoup de vidéos et d’images ont été publiées les montrant en train de brûler le portrait du Guide suprême, Ali Khamenei, et leur foulard, obligatoire en Iran.
« Le dictateur est en colère »
Un grand nombre de citoyens estiment que le pouvoir est en réalité à l’origine de ces empoisonnements. Et la colère s’allume de nouveau à travers le pays. Durant le week-end, des parents se sont réunis dans certaines villes devant les centres gouvernementaux pour protester contre l’inaction des autorités. A Racht, les policiers ont dispersé la foule en colère, rassemblée devant le département de l’éducation de la ville, en tirant des gaz lacrymogènes. Des arrestations ont été rapportées dans plusieurs villes du pays, parfois parmi les adolescentes. Certaines de ces scènes ont été filmées et publiées sur les réseaux sociaux.
Quelques journaux iraniens tentent de couvrir les événements, non sans difficulté, les journalistes disposant de marges de manœuvre limitées. L’un d’eux, Seyyed Ali Pour Tabatabai, travaillant à Qom pour un site d’information local et ayant été le premier à rendre publics les empoisonnements dans sa ville, a été arrêté le 5 mars. Il n’est toujours pas clair si les symptômes affectant les victimes disparaissent avec le temps. A Qom, un père a indiqué que, deux semaines après avoir été exposée à un produit toxique, sa fille ne pouvait toujours pas marcher sans déambulateur et souffrait de troubles de la vision et de vertiges, d’après des sites d’information iraniens.
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