Les Etats-Unis ont bloqué, le 18 octobre, l’adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies d’une résolution sur le conflit entre le Hamas et Israël. Une décision qui montre que le président américain, Joe Biden, s’inscrit dans la continuité de la position historique américaine à l’Organisation des Nations unies (ONU), qui consiste à soutenir de manière quasi indéfectible l’Etat hébreu.
Que prévoyait cette résolution ?
Le texte, porté par le Brésil, condamnait à la fois les attaques « odieuses » du Hamas et « les violences contre les civils » perpétrées par l’armée israélienne à Gaza. Il proposait « des pauses humanitaires » pour permettre l’acheminement d’aide aux habitants de l’enclave. Mais les Américains ont finalement mis leur veto, invoquant l’absence de mention du « droit d’Israël à la légitime défense » et signalant leur volonté de privilégier la « diplomatie de terrain », en pleine visite de leur président à Tel-Aviv.
« C’est une opportunité manquée du Conseil, car c’était un bon texte », a regretté le représentant français à l’ONU, Nicolas de Rivière, qui venait de voter en faveur de la résolution. « Ce projet de résolution n’était pas du tout dangereux pour Israël : il demandait seulement un couloir humanitaire, sans condamner la colonisation israélienne », considère Joan Deas, la directrice de l’Institut de recherche et d’études Méditerranée Moyen-Orient (Iremmo) spécialiste de la question palestinienne. Deux jours plus tôt, une autre résolution portée par la Russie, demandant un « cessez-le-feu » à Gaza, avait été rejetée, non seulement par les Etats-Unis mais également par la France et par le Royaume-Uni, notamment parce qu’elle ne condamnait pas l’attaque du Hamas.
Comment les Etats-Unis peuvent-ils bloquer cette résolution ?
Au Conseil de sécurité, un texte doit recueillir l’approbation d’au moins neuf des quinze Etats membres pour être adopté. Chaque pays dispose d’une voix, qu’il peut utiliser pour approuver, rejeter ou s’abstenir sur le texte proposé.
Toutefois, les cinq membres permanents du Conseil (France, Etats-Unis, Royaume-Uni, Russie et Chine) disposent d’un droit de veto, qui permet à chacun de bloquer l’adoption du texte. C’est ce qui a permis aux Etats-Unis de bloquer la résolution du 18 octobre.
Cette attitude américaine est-elle nouvelle ?
Les Américains n’ont pas toujours bloqué les résolutions critiquant Israël. Ils ont par exemple voté la résolution 242 demandant le retrait de l’armée israélienne après la guerre des Six-Jours (1967), ou la résolution 338 réclamant un cessez-le-feu après le déclenchement de la guerre du Kippour (1973).
Le premier grand veto américain sur ce dossier intervient le 10 septembre 1972, lorsque les Etats-Unis refusent de condamner les représailles d’Israël contre des militants de l’Organisation de libération de la Palestine après l’attentat du commando palestinien Septembre noir contre des athlètes israéliens lors des Jeux olympiques de Munich.
Depuis cette date, les Etats-Unis ont usé à quarante-trois reprises de leur droit de veto pour bloquer l’adoption de résolutions critiques envers Israël, faisant à chaque fois cavalier seul, même au sein du camp occidental. Ce qui montre, selon Joan Deas, que « les Etats-Unis privilégient toujours la diplomatie bilatérale avec Israël plutôt que des négociations multilatérales et internationales ».
La position américaine a tout de même connu de brèves périodes d’inflexion. Si les Etats-Unis n’ont plus approuvé depuis longtemps de résolution critique à l’égard du gouvernement israélien, ils se sont abstenus à plusieurs reprises. La dernière occurrence remonte à la fin du mandat de Barack Obama : le 23 décembre 2016, l’abstention du président démocrate a permis l’adoption de la résolution 2334, qui condamnait la colonisation israélienne en Cisjordanie. C’est le dernier texte sur la question israélo-palestinienne adopté par le Conseil de sécurité à ce jour.
En effet, avec l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, les Etats-Unis ont renoué avec leur soutien indéfectible à Israël, mettant leur veto à deux projets de résolution critiquant la politique du gouvernement israélien, en 2017 et en 2018. Joe Biden a poursuivi la même politique en s’opposant à la résolution du 18 octobre.
Au-delà des Etats-Unis, la Chine et la Russie ont également aussi usé de leur pouvoir de blocage au sein du Conseil de sécurité, en s’opposant à plusieurs projets de résolution d’origine américaine sur la question palestinienne. Le 25 octobre, Pékin et Moscou ont ainsi mis leur veto à un texte défendu par les Etats-Unis, qui appelait à des pauses humanitaires, tout en reconnaissant à Israël le droit de se défendre face au Hamas.
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