C’est un hiver sans précédent. Virus de la grippe, rhinovirus et virus respiratoire syncytial (VRS), à l’origine de l’essentiel des cas de bronchiolite… Pour la première fois depuis le début de la pandémie de Covid-19 en France, en mars 2020, plusieurs autres virus respiratoires circulent en même temps que le SARS-CoV-2, à des niveaux très élevés. La levée des mesures de restriction, comme les confinements ou le port obligatoire du masque, donne l’opportunité aux habituels virus saisonniers de se propager.
Outre-Atlantique, cette cocirculation intensive a été popularisée sous le terme « tripledemic », une triple épidémie qui menace de submerger – aux Etats-Unis aussi – un système de santé déjà très affaibli par la pandémie et une crise hospitalière structurelle. « L’enjeu particulier de cette année est d’étudier l’interaction du SARS-CoV-2 avec d’autres virus », souligne Anne-Claude Crémieux, professeure d’infectiologie à l’hôpital Saint-Louis, à Paris, et autrice des Citoyens ont le droit de savoir (Fayard, 324 pages, 20 euros).
Débuts précoces
L’épidémie de bronchiolite, qui touche particulièrement les enfants de moins de 2 ans, a débuté de manière précoce dès le mois d’octobre, alors qu’elle adopte habituellement un cycle très régulier, avec un début à la mi-novembre, un pic en décembre et une fin en janvier. Après une diminution liée aux congés scolaires, les passages aux urgences et les hospitalisations sont repartis à la hausse depuis la semaine du 14 novembre et atteignent des niveaux inédits depuis dix ans. A l’origine de cette infection des bronchioles, le VRS et le rhinovirus se partagent le territoire métropolitain, l’un ou l’autre s’imposant différemment suivant les régions.
C’est un début précoce également pour la grippe, réputée pour avoir une plus grande variabilité dans le démarrage et l’amplitude de son épidémie saisonnière. Après la Bretagne, quatre autres régions sont passées en phase préépidémique, selon le bulletin de Santé publique France (SPF) du 23 novembre. Le sous-type actuellement majoritaire est le virus A (H3N2). « Qui dit H3N2 dit une épidémie assez forte, qui touche surtout les personnes à risque, souligne Vincent Enouf, responsable adjoint du centre national de référence des virus des infections respiratoires à l’Institut Pasteur. Chaque année, les épidémies de grippe font 8 000 à 10 000 morts, des chiffres qui risquent d’être dépassés si la souche majoritaire reste la grippe H3N2. » Ce virus n’est pas forcément plus dangereux que les autres, mais il évolue beaucoup génétiquement, ce qui rend plus difficile l’acquisition d’une protection immunitaire de longue durée.
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