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Laurent Berger va quitter la direction de la CFDT le 21 juin prochain

Le patron du syndicat va laisser la place à sa numéro deux, Marylise Léon, annonce-t-il dans un entretien au Monde.

L'annonce était attendue, mais la date restait à préciser. En première ligne dans le conflit contre la réforme des retraites, le patron de la CFDT, Laurent Berger, a annoncé ce mercredi dans un entretien au Monde son départ prochain de la direction du syndicat. «J'avais dit, lors de notre congrès en juin 2022, à Lyon, que je m'en irai en cours de mandat [...]. Je souhaite tout simplement respecter des règles collectives et une forme d'éthique personnelle, liées au fonctionnement démocratique de la CFDT», se justifie le responsable syndical au quotidien.

Son départ est donc prévu le 21 juin prochain. Il sera, à cette date, remplacé par sa numéro deux, Marylise Léon. Celle-ci est engagée de longue date à la CFDT : ancienne déléguée fédérale de la fédération Chimie-énergie du syndicat, elle a été secrétaire nationale confédérale, avant de devenir bras droit de Laurent Berger, en juin 2018. Elle a suivi, comme son chef, les questions d'emploi, au sein du syndicat. Signe de son rôle de plus en plus central dans l'organisation, elle était aux côtés du numéro un à chaque manifestation parisienne contre la réforme des retraites, depuis janvier. Discrète, mais toujours présente.

Laurent Berger ne tarit d'ailleurs pas d'éloge sur sa dauphine : «Elle est dynamique, elle a une compréhension du monde du travail qui est forte, parfois plus fine que la mienne [...]. Elle s'est battue avec énergie lors des négociations sur l'assurance-chômage et elle est convaincue que la transition écologique doit s'effectuer de façon juste sur le plan social. Elle est appréciée au sein de la maison, elle est proche des gens, humaine», énumère-t-il au Monde. De son côté, le patron de l'Unsa, Laurent Escure, salue au Figaro une «militante de talent».

C'est peu dire que les relations entre le leader syndical et le président de la République se sont distendues ces derniers temps. Emmanuel Macron a toutefois tenu à témoigner du «respect» à l'endroit de Laurent Berger, en marge d'un déplacement en Alsace ce mercredi, avant d'ajouter : «oserais-je dire de l'amitié». Le chef de l'État a également assuré que sa relation avec le premier syndicaliste de France ne se résumait pas au seul désaccord sur la réforme des retraites. Les deux hommes se connaissent depuis de nombreuses années.

Arrivé fin 2012 à la tête du syndicat, Laurent Berger aura passé plus d'une décennie à son poste, prenant ainsi la suite de François Chérèque (2002-2012) et Nicole Notat (1992-2002). Réélu à son poste en juin dernier, il avait prévenu d'emblée qu'il partirait avant la fin de son deuxième mandat : «Chez nous, il y a une règle. On est secrétaire général pour une dizaine d'années, plus ou moins deux ans», déclarait-il ainsi, l'an dernier, face à l'Association des journalistes de l'information sociale (Ajis). Il aurait, en réalité, souhaité partir plus tôt, dès juin 2022, mais l'épidémie de Covid-19 et la période de gros temps qui s'annonçait l'ont poussé à rester. «C'est une décision mûrement réfléchie et prise avant le congrès de 2022. Ce n'est pas un coup de tête et ce n'est pas lié à l'actualité. C'est la vie normale d'une organisation démocratique comme la nôtre», commente un proche de Laurent Berger au Figaro.

Une action saluée

Sous la férule de celui qui est aussi patron de la Confédération européenne des syndicats, la CFDT est devenue le premier syndicat de France, fin 2018, devant la CGT. Son organisation est également en pointe dans le conflit opposant l'intersyndicale au gouvernement, devant la centrale de Montreuil. Un rôle salué, la CFDT ayant enregistré «31.000 adhérents en plus depuis le début de l'année», notamment grâce à sa place dans le mouvement social, souligne son représentant. Un rôle renforcé ces dernières semaines, au moins en apparence, par les tensions interpersonnelles bien connues entre Emmanuel Macron et Laurent Berger : le premier a attaqué le second lors de ses prises de parole, et le syndicaliste a concédé ironiquement qu'il ne «partirait pas en vacances» avec le chef de l'État. Reste à voir si l'arrivée de Marylise Léon réchauffera les relations avec le pouvoir.

Rapidement, des responsables ont salué l'action et la décision de Laurent Berger. Celui-ci a «largement fait ses preuves, comme personne très engagée et militant de très haut niveau», commente auprès du Figaro le patron de l'Unsa, Laurent Escure. Et d'envoyer «bravo, merci pour l'engagement et à très vite» à son homologue. Au sortir du conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement a également rendu hommage au patron de la CFDT : «Il est libre de décider du moment où il arrête son mandat et ça aura été un partenaire sérieux, exigeant, parfois coriace, nous l'avons vu, et avec lequel nous avons pu obtenir des avancées importantes pour notre pays en matière de droits sociaux ou d'évolution du travail», a noté Olivier Véran.

Le départ prochain de Laurent Berger ne doit pas être vu comme un signal de l'affaiblissement de l'intersyndicale contre les retraites, avertissent par ailleurs les opposants. «C'est horrible de constater que, dans notre pays, passer la main peut être vu comme un abandon ou un renoncement. Ce qui devrait être valorisé, c'est justement le fait de passer la main à la tête d'une organisation collective, car d'autres sont capables d'assumer cette fonction», observe le principal intéressé. L'intersyndicale est «autre chose qu'une aventure de quelques personnes», ajoute de son côté Laurent Escure. Il n'empêche, les plus radicaux pourraient être tentés de profiter de ce bouleversement pour reprendre la main sur un mouvement social en perte de vitesse.

Ce départ signe également un autre changement majeur : les deux premiers syndicats de l'Hexagone seront désormais dirigés par des femmes, Marylise Léon, d'un côté, et Sophie Binet, de l'autre. Une petite révolution.


Laurent Berger va quitter la direction de la CFDT le 21 juin prochain

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150 commentaires
  • benedict75

    le

    La grande idée de la CFDT, les 35 heures, plombe l'économie française depuis une vingtaine d'années.
    La volonté de ce syndicat de salariés, c'est "gagner plus en travaillant toujours moins"...cela mérite d'être salué en effet.

  • Afz

    le

    A lire les commentaires il n'y a pas que des adeptes, c'est vrai que celui ci ne va pas laisser de traces profondes dans l'histoire. Sans regrets...

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