“L’épidémie de coups d’État continue de se propager sur le continent africain”, note le quotidien burkinabè Le Pays. Des militaires ont destitué mercredi 30 août le président sortant gabonais, Ali Bongo Ondimba (ABO), plaçant à leur tête le chef de la garde républicaine, le général Brice Oligui Nguema, rapporte le site d’information Gabon Media Time. Dans la soirée, le nouvel homme fort du pays a été officiellement nommé “président de la transition”, après avoir été porté en triomphe par des centaines de soldats.

Les putschistes ont annoncé le coup d’État à la télévision juste après la proclamation, mercredi, de la victoire d’Ali Bongo Ondimba à la présidentielle, avec 64,27 % des voix, contre 30,77 % pour son principal rival, Albert Ondo Ossa, qui dénonçait des fraudes massives.

“Comme au Niger, c’est celui-là même qui est chargé de veiller à la sécurité d’ABO qui l’a déposé”, remarque Aujourd’hui au Faso. Le journal burkinabè émet deux hypothèses : il pourrait s’agir, comme le pensent certains, d’un “‘coup d’État arrangé’ entre le clan Bongo et le général Oligui, fidèle de la famille présidentielle depuis le pater familias, […] pour ne pas avoir à proclamer l’opposant Ossa vainqueur de la présidentielle du 26 août”.

L’autre possibilité, c’est que le chef de la garde républicaine et ses hommes n’ont pas “pu avaler les résultats de la mascarade électorale proclamés à 4 heures du mat’”. Pour Aujourd’hui au Faso, le coup d’État de mercredi met en tout cas “fin à la monarchie Bongo, vieille de cinquante-cinq ans”.

“Alternance démocratique verrouillée”

“Il faut le dire, les conditions pour un coup d’État militaire étaient réunies dans ce pays il y a bien longtemps, analyse Le Pays. La dynastie Bongo […] avait verrouillé toutes les possibilités d’alternance démocratique […]. Toutes les institutions de la République étaient inféodées au prince régnant, avec pour finalité principale d’assurer un règne sans partage et à vie à la famille Bongo.” Mais pour le quotidien burkinabè, “la communauté internationale” porte elle aussi sa part de responsabilité “dans ce putsch militaire au Gabon”, car elle a “toujours fermé les yeux sur les agissements de la dynastie Bongo au point de lui conférer une immunité face à ses hold-up électoraux”.

Après l’annonce du coup d’État mercredi, les réactions internationales n’ont pas tardé : l’ONU et l’Union africaine ont condamné le putsch et appelé les militaires à garantir l’intégrité physique d’Ali Bongo et de ses proches. Washington a de son côté exhorté l’armée gabonaise à “préserver le régime civil”, tandis que la France, ex-puissance coloniale, a “condamné le coup d’État militaire”.

Pour Le Soir, l’“irruption des militaires sur la scène politique ne signifie pas seulement la mise en cause des élections. Elle vise aussi Le ‘système Bongo’, qui était devenu le symbole – sinon la caricature – de la Françafrique, cette relation particulière nouée par la France avec ses anciennes colonies dès le lendemain des indépendances, dans les années 1960.”

“Alors que la France dispose d’une base avec 350 militaires au Gabon”, l’association française Survie, qui milite contre la Françafrique, a demandé mercredi à l’Élysée de ne pas intervenir au Gabon pour tenter de restituer le pouvoir au président Ali Bongo, rapporte le site d’information sénégalais Sene. News. Les militaires français “doivent rester dans leurs casernes et se préparer à quitter le pays”, a estimé le porte-parole de l’association, Thomas Borrel.