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Énergies renouvelables : "La guerre en Ukraine a accéléré la transition verte en Europe"

La part d’électricité produite par les énergies renouvelables a massivement augmenté en 2022 en Europe, dépassant pour la première fois celle du gaz naturel, selon un nouveau rapport du groupe de réflexion Ember publié mardi. Une situation accélérée par la guerre en Ukraine, dans un secteur où l’Europe et la France ont encore du retard.

Panneaux solaires dans un champ de tournesols à Moutiers, dans l'ouest de la France, le 29 novembre 2022.
Panneaux solaires dans un champ de tournesols à Moutiers, dans l'ouest de la France, le 29 novembre 2022. © Damien Meyer, AFP
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La guerre en Ukraine va-t-elle marquer un tournant décisif pour la transition verte européenne ? Alors que le conflit avec la Russie a fait bondir les prix de l’énergie et que l’Europe tente de réduire sa dépendance au gaz et au pétrole russe, les énergies renouvelables ont fortement progressé en 2022 sur le continent.

Selon une étude publiée mardi 31 janvier par le thinktank Ember, spécialiste des questions énergétiques, la part d’électricité produite par les énergies solaire et éolienne dans l’Union Européenne a atteint l’année dernière 22 % de la production totale de courant, dépassant pour la première fois la part du gaz naturel.

Cette montée en puissance des énergies renouvelables s’explique par la croissance de la production des éoliennes (+ 8,5 %) mais surtout par une augmentation record des installations photovoltaïques (+ 47 %). Selon l’étude, la production d’électricité par le solaire aurait permis à elle seule d’éviter l’achat de 49 milliards d'euros de gaz, à l’échelle de l’UE.

Pour mieux comprendre cette évolution et ses conséquences, France 24 s’est entretenu avec Vincent Jacques le Seigneur, président de l'Observatoire des énergies renouvelables.

France 24 : Quel impact la guerre en Ukraine a-t-elle eu sur la progression des énergies renouvelables ?

Vincent Jacques le Seigneur : La progression du solaire et de l’éolien s’inscrit dans une tendance qui précède l’invasion russe. Ce que nous observons aujourd’hui est avant tout le résultat du paquet énergie-climat, un accord contraignant adopté par l’UE en 2008, qui a permis de faire passer la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique européen à 22 % en 2020. Mais il est vrai que la guerre en Ukraine a accéléré la transition verte. Elle a clos le débat entre États sur l’importance de réduire les importations de gaz et a suscité une réelle prise de conscience sur l’importance des renouvelables. Alors que l’objectif était de pousser leur part énergétique à 32 % en 2030, l’UE mise désormais sur 40 %.

Enfin, à cela s’est ajoutée la prise de conscience citoyenne avec l’incroyable boom du photovoltaïque. Depuis la guerre en Ukraine de très nombreux foyers touchés au portefeuille par la crise énergétique ont équipé leurs domiciles de panneaux solaires comme indiqué dans l’étude de Ember.

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a proposé mercredi de faciliter les aides d’État pour soutenir l’industrie des énergies vertes, face à la concurrence américaine et chinoise. L’UE est-elle à la traîne ?

Du point de vue manufacturier, l'Europe est très dépendante de l’Asie et notamment des Chinois qui ont massivement investi dans les énergies renouvelables sans que l’UE ne prenne de mesures pour protéger sa propre industrie. Des filières existaient mais elles ont disparu car nous avons été envahis par du matériel moins cher.

L’avantage c’est qu’il est possible de relancer une industrie très rapidement car nous maîtrisons totalement la technologie. L’UE produit déjà la quasi-totalité des matériaux nécessaires comme le ver, l’acier, le silicium. Nous avons juste quelques difficultés sur certains métaux comme le cuivre mais rien d’insurmontable. Il s’agit donc d’une décision purement politique, il faut investir. Si l’Europe ne choisit pas cette option, elle sera avalée par les Américains et leur gigantesque plan de subvention.  

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Focus © France 24

 

Où se positionne la France sur cette question ? L'Assemblée nationale a adopté un projet de loi pour accélérer le déploiement des énergies renouvelables. Dans le même temps, le consortium EurObserv’ER, dont vous êtes le président, estime que la France n’atteindra pas ses objectifs de déploiement en 2023. Pourquoi ?

La France est bien sûr très loin des bons élèves comme la Finlande et la Suède, très en pointe sur l’hydroélectricité et la bioénergie. Mais même lorsqu’on la compare à l’Allemagne, dont les caractéristiques sont plus proches, on se rend compte que la France possède quatre fois moins d’installations éoliennes et solaires. On pourrait dire que l’Allemagne a plus de vent, notamment au nord, mais elle a moins de soleil que chez nous. Cet écart traduit donc bien une différence de volonté politique. Pendant longtemps, l'électricité était moins chère en France du fait des centrales. Mais la guerre en Ukraine a fait exploser son prix car il est indexé sur le gaz. Il est donc urgent de rattraper ce retard.

Le plus souvent, ce retard est dû à des raisons administratives et non à un manque d’investissement ou de compétences techniques. L’analyse des dossiers prend trop longtemps car la France manque de personnel dans ses préfectures. Les recours en contentieux peuvent durer des années, c’est pourquoi le gouvernement tente aujourd’hui de mieux les encadrer pour accélérer les procédures. Ces retards sont d’autant plus dommageables qu’avec leur progression rapide et les avancées technologiques, les énergies renouvelables sont devenues beaucoup plus compétitives. Avec l'envolée des prix énergétiques, elles représentent aujourd’hui une manne financière très importante pour l’État. 

>> À lire aussi : mauvaise élève des énergies renouvelables, la France passe au rattrapage

 

 

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