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Inégalités et émissions de CO2: «La grande supercherie des chiffres d’Oxfam»

«Le débat sur le climat mérite mieux que cette statistique-spectacle.»
«Le débat sur le climat mérite mieux que cette statistique-spectacle.» Nick Ansell

FIGAROVOX/TRIBUNE - Dans un rapport, l’ONG écrit notamment que «les 10% les plus riches sont responsables de 50% des émissions mondiales». Mais la méthodologie utilisée pour parvenir à ces chiffres présente de graves faiblesses, argumentent Philippe Charlez et Olivier Babeau, de l'Institut Sapiens.

Philippe Charlez est expert en questions énergétiques à l'Institut Sapiens.

Olivier Babeau est président de l'Institut Sapiens.


Les ONG telles qu'Oxfam, les Amis de la Terre ou Greenpeace ont un talent particulier pour la production de chiffres frappants servant à marquer les esprits. Leur communication est efficace: ces chiffres sont souvent repris tels quels par les médias peu regardants et deviennent des références indiscutées. Leur méthodologie présente pourtant souvent de graves faiblesses: pensons à la confusion entre revenus et valeur des actifs (autrement dit entre flux et stock) utilisée pour dénoncer le niveau trop bas d'imposition des plus riches. Il en est de même des chiffres issus du rapport d'Oxfam sur «les inégalités des émissions en 2030», publié en novembre 2021 : «Les 10% les plus riches sont responsables de 50% des émissions mondiales» et «les 1% les plus riches émettent davantage que la moitié la plus pauvre». Tournant en boucle sur les réseaux sociaux, les chiffres de l'ONG sont maintenant repris dans le dernier rapport du Giec destiné aux décideurs mais aussi dans un article récent de l'Agence mondiale de l'énergie!

Pourtant l'analyse montre rapidement que quelque chose cloche. Utilisons le compteur de l'Ademe qui permet à chacun d'estimer ses émissions annuelles. En l'appliquant à un cadre supérieur fictif gagnant annuellement 150.000 € (soit 12.500 €/mois) possédant deux voitures dont un gros SUV, un pavillon de 250 m², effectuant annuellement 5 vols intérieurs et trois vols longue distance, prenant régulièrement le train, on obtient 13 tCO2/an (contre 9 tCO2/an en moyenne pour le Français). En forçant le trait on n'arrive pas à dépasser les 20 tCO2, soit 6,5 fois moins que les 130 tCO2 annoncées par Oxfam pour le top 1. Ça ne colle pas.

Les émissions des entreprises ne dépendent en aucune façon de leur structure de propriété: si toutes les entreprises polluantes étaient propriété des États, faudrait-il accuser ces États et suggérer… que la solution est de les supprimer?

Philippe Charlez et Olivier Babeau

Comment expliquer des chiffres tellement éloignés de ceux annoncés à cor et à cri ? Quand on s'intéresse à la méthodologie utilisée, on s'aperçoit avec stupéfaction qu'aux classiques «émissions de consommation» sont ajoutées des «émissions financières» liées à la détention d'actifs. En d'autres termes, si vous détenez des actions de TotalEnergies, de Saint-Gobain ou autre Lafarge, les émissions liées à la fabrication et la vente de leurs produits vous sont attribuées. Ainsi quand un citoyen gabonais fait le plein d'essence ou achète un sac de ciment à Libreville, c'est à l'actionnaire d'assumer les émissions associées. Résultat, pour Oxfam, les émissions françaises se décomposent en 408 MtCO2 d'émissions de consommation (valeur officielle publiée par le ministère de l'Écologie pour 2022) et 654 MtCO2 d'émissions financières déduites des émissions de consommation des plus pauvres. Le rapport Oxfam confirme que plus de «70% des émissions des plus riches sont des émissions d'actifs». En procédant de la sorte il n'est pas surprenant que les émissions se corrèlent parfaitement à la richesse et gomme tout impact démographique. Rappelons pourtant que les pays émergents (82% de la population mondiale) sont responsables des deux tiers des émissions mondiales ; ils consomment plus de 80% du charbon et 60% du pétrole.

L'image ainsi donnée de la répartition des émissions est non seulement erronée mais reporte de façon absurde la responsabilité sur la propriété. Les émissions des entreprises ne dépendent en aucune façon de leur structure de propriété: si toutes les entreprises polluantes étaient propriété des États, faudrait-il accuser ces États et suggérer… que la solution est de les supprimer? Avec cette logique, ne devrait-on pas aussi attribuer aux propriétaires des logements les émissions liées au chauffage et à la consommation électrique des locataires? La logique du chiffre d'Oxfam reporte la responsabilité d'une part significative des émissions sur le seul propriétaire, et dédouane implicitement le consommateur. On ne décarbonera par en passant les plus riches par les armes, mais en suscitant les investissements et les innovations nécessaires pour baisser les émissions.

Une fois de plus, on habille des oripeaux de l'écologie ce qui n'est qu'une énième tentative d'attiser la haine des riches. Le débat sur le climat mérite mieux que cette statistique-spectacle: il a besoin de rigueur et de transparence pour guider au mieux nos décisions.


DROIT DE RÉPONSE D'OXFAM FRANCE

« Le 19 septembre 2023, le site internet du Figaro Vox a publié une tribune de Messieurs Philippe CHARLEZ et Olivier BABEAU remettant en cause la méthodologie utilisée par Oxfam pour évaluer les inégalités d'émissions dans notre rapport intitulé « Les inégalités des émissions en 2030 », publié le 5 novembre 2021. Notre association entend répondre aux critiques exposées sur la méthodologie de notre étude.

Il est inexact de dire que la méthodologie utilisée consisterait à ajouter aux « émissions de Consommation » des « émissions financières » liées à la détention d'actifs. Notre méthodologie ne prend en compte que les émissions de consommation, c'est-à-dire les émissions territoriales moins les émissions d'export plus les émissions d'import. Si notre rapport écrit bien, dans un encadré à part, que « 70% des émissions des plus riches sont des émissions d'actifs », c'est pour citer une étude de Lucas Chancel qui montre que les émissions de consommation sont sous-estimées. La conclusion de notre rapport n'intègre pas ces données laquelle résulte d'une méthodologie prenant en compte exclusivement les émissions de consommation ».

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50 commentaires
  • al core

    le

    Oxfam est la retraite dorée des déchus écolo gauchistes du gouvernement Hollande avec a sa tête l'extrémiste Cécile Duflot, la quintescense de l'idéologie totalitaire et mensongère. Cette ONG reçoit de l'argent public évidemment.

  • Anonyme

    le

    Le co2 vous en expirez toutes les minutes

  • Anti pastèque

    le

    Excellent et pas étonnant, on s'en doutait.

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