L’Espagne punit dorénavant les “harceleurs” anti-IVG. Ce jeudi 14 avril, une loi organique modifiant le Code pénal entre en vigueur sur le territoire espagnol et sanctionne toute personne qui essaie d’entraver le droit à l’interruption volontaire de grossesse. Le texte prévoit des peines allant de trois mois à un an d’emprisonnement, ou des travaux d’intérêt général (de 31 à 80 jours).

Comme le rappelle El País, la loi a obtenu le feu vert de tous les partis au Congrès des députés, “à l’exception du PP [droite] et de Vox [extrême droite]. Puis le Sénat espagnol l’a adoptée le 6 avril, “à 154 voix pour, 105 contre et aucune abstention”, précise ce quotidien madrilène historiquement proche des socialistes espagnols.

L’Espagne a dépénalisé l’IVG dès 1985, mais seulement pour trois motifs (viol, risque de malformation du fœtus et risque pour la santé physique ou mentale de la mère), ajoute la journaliste Isabel Valdés. La grande majorité des avortements y sont réalisés en clinique privée.

Ce pays était allé plus loin en 2010 en dépénalisant l’IVG sans justification médicale, jusqu’à la 14e semaine de grossesse et jusqu’à la 22e en cas de malformation du fœtus. En France, le délai de recours à l’IVG a été allongé de douze à quatorze semaines par une loi datée du 2 mars dernier.

Un répit pendant la pandémie

El País indique que la nouvelle loi organique espagnole “propose d’apporter une sécurité juridique tant aux femmes qui souhaitent interrompre une grossesse qu’aux professionnels concernés”. Car, selon le journal, la société espagnole est “déchirée entre la promotion de la liberté sexuelle et reproductive des femmes et sa culture catholique et conservatrice”.

La journaliste Isabel Valdés cible en particulier la campagne “40 días por la vida” (“40 jours pour la vie”), une branche espagnole de l’organisation américaine pro-life “40 Days for Life”. En 2021, des partisans de cette campagne s’étaient rassemblés pour prier devant des cliniques espagnoles habilitées à pratiquer l’IVG et convaincre les femmes souhaitant avorter d’y renoncer.

D’après un dernier rapport de l’ACAI (une association de cliniques espagnoles pratiquant l’IVG), daté de 2018, 89 % des femmes ayant souhaité avorter se sont senties “harcelées”, et 66 % “menacées”. “La seule chose qui a arrêté le harcèlement pendant un moment, c’est la pandémie, le confinement”, renchérit El País.