Espionner des suspects via leur smartphone : l'Assemblée approuve le principe des portables "mouchards"
Les députés ont donné leur feu vert mercredi soir à une disposition sensible du projet de loi justice d'Eric Dupond-Moretti : la possibilité d'activer à distance des téléphones portables pour écouter et filmer à leur insu des personnes visées dans certaines enquêtes. La gauche s'inquiète de dérives.
"Pente très dangereuse" ou "adaptation technologique"? Une majorité de l'Assemblée a en tout cas approuvé l'article 3 du projet de loi justice porté par le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, par 80 voix contre 24, ce mercredi soir.
Les députés du camp présidentiel, de LR et du RN ont voté pour. Ceux de la Nupes ont voté contre, comme le président du groupe Liot, Bertrand Pancher.
"Des dizaines d'enquêtes par an concernées"
L'article permet l'activation à distance de téléphones portables, ordinateurs et autres objets connectés dans deux cas distincts.
Le premier dispositif autorise la géolocalisation pour suivre en temps réel les déplacements de personnes visées dans le cadre d'une enquête pour crime ou délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement.
Le second volet permet de capter à distance son et images de personnes visées cette fois dans des affaires de terrorisme ainsi que de délinquance et criminalité organisées. La captation concerne seulement "des dizaines d'affaires par an", insiste Eric Dupond-Moretti. Pour le ministre, "il y a des gens dont on va sauver la vie. On est loin du totalitarisme de 1984", le roman de George Orwell.
Plus facile que d'installer des micros ou poser des balises
Le camp présidentiel souligne les "garanties" apportées. La captation serait réservée aux affaires les "plus graves" et autorisée 15 jours renouvelables une fois par le juge des libertés et de la détention, et deux mois renouvelables par un juge d'instruction jusqu'à une durée maximale de six mois.
Eric Dupond-Moretti la compare à la "vieille technique" de micros ou de caméras posés chez des suspects. Autre argument : le déclenchement à distance d'appareils connectés est déjà utilisé par "les services de renseignement", sans l'autorisation du juge, qui sera ici indispensable.
En commission, les députés avaient renforcé des "garde-fous" avec davantage de professions "protégées" de ces techniques d'enquête : médecins et journalistes s'ajoutant aux avocats, magistrats et parlementaires.
Un risque de dérives ?
La gauche est vent debout contre ces dispositions "d'intrusion dans la vie privée", LFI évoquant une "dérive autoritaire" et rappelant les critiques d'avocats ou d'ONG.
Des associations comme La Quadrature du Net craignent que tout objet connecté ne devienne un potentiel mouchard, comme les télévisions, les assistants vocaux, les montres, les babyphones, les trottinettes, les frigos, ou même... les sex-toys.
Le député (LFI) Ugo Bernalicis a interpellé le Garde des Sceaux à ce sujet, dans une intervention à l'Assemblée. Mais l'amendement pour exclure les objets sexuels connectés du dispositif a été rejeté.
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