Le président de la Fédération espagnole de football (RFEF), Luis Rubiales, suspendu par la FIFA pour avoir donné un baiser forcé à l’internationale espagnole Jenni Hermoso, a annoncé, dimanche 10 septembre, qu’il démissionnait de son poste.
« A propos de ma démission : oui, je vais le faire, oui, parce que je ne peux pas continuer mon travail », a-t-il dit dans un entretien accordé au journaliste de télévision anglais Piers Morgan. M. Rubiales a ajouté que son entourage proche lui avait dit : « Luis, tu dois te soucier de ta dignité et poursuivre ta vie. Sinon, tu vas faire du mal aux gens que tu aimes et au sport que tu aimes ».
Sa démission a été notifiée à 21 h 30, selon une lettre signée de M. Rubiales et publiée par les médias espagnols, trois semaines exactement après le début de l’affaire.
« Il en a informé la fédération dans une lettre adressée à Pedro Rocha Junco [président intérimaire]. Il a également démissionné de son poste de vice-président de l’UEFA », a déclaré la Fédération espagnole de football dans un communiqué. Celle-ci va désormais entamer un processus pour désigner le remplaçant de M. Rubiales.
« A la suite de ma rapide suspension de la FIFA et aux procédures ouvertes à mon encontre, il est évident que je ne pourrai pas retrouver mon poste », a écrit Luis Rubiales dans cette lettre. « Je ne veux pas que le football espagnol puisse subir les préjudices de cette campagne tellement disproportionnée », a-t-il encore dit.
Il « a fait ce qu’il devait faire »
« L’ancien président de la RFEF a fait ce qu’il devait faire, je pense que c’est ce que tous les citoyens espagnols lui demandaient », a commenté le secrétaire d’Etat chargé des sports, Victor Francos, au micro de la radio Cadena SER.
Sur le réseau social X (anciennement Twitter), la ministre de l’égalité, Irene Montero, a simplement écrit « Se Acabo » (« C’est fini »), reprenant un slogan que Jenni Hermoso et ses coéquipières de la sélection avaient utilisé pour exprimer leur protestation.
« Le pays féministe avance de plus en plus vite », a souligné de son côté Yolanda Diaz, deuxième vice-présidente du gouvernement espagnol. « La transformation et l’amélioration de nos vies sont inévitables. Nous sommes avec toi, Jenni, et avec toutes les femmes », a-t-elle ajouté sur X.
Le foot espagnol plongé dans le chaos
Le 20 août, quelques minutes après le sacre mondial de la « Roja » féminine à Sydney, le patron du football espagnol, âgé de 46 ans, avait embrassé sur la bouche par surprise Jenni Hermoso, provoquant l’indignation internationale. Refusant de démissionner pour « un petit bisou consenti », il avait attaqué, lors d’un discours retentissant le 25 août, un supposé « faux féminisme » et argué qu’il avait obtenu l’autorisation de la joueuse avant de l’embrasser.
Une version démentie par Jenni Hermoso, qui avait dit s’être « sentie vulnérable et victime (…) d’un acte impulsif et sexiste, déplacé et sans aucun consentement de [sa] part ». Elle a porté plainte mercredi. Depuis une récente réforme du code pénal espagnol, un baiser non consenti peut être considéré comme une agression sexuelle, catégorie pénale regroupant tout type de violence sexuelle. Les peines encourues vont de l’amende à quatre ans de prison.
Cette affaire, qui a entraîné la suspension temporaire de M. Rubiales par la FIFA, a plongé le foot espagnol dans le chaos et éclipsé le sacre mondial de l’équipe nationale féminine. Le premier ministre socialiste espagnol, Pedro Sanchez, avait dénoncé le 22 août « un geste inacceptable », des excuses « insuffisantes » et avait estimé que Luis Rubiales devait « aller plus loin ». Les condamnations s’étaient multipliées, émanant de l’Association des footballeurs espagnols (AFE), mais aussi d’entraîneurs, de dirigeants de club, ou encore de joueuses.
Depuis trois semaines, les langues se sont déliées à propos des agissements du patron démissionnaire du football espagnol. Il a ainsi été accusé d’avoir organisé des orgies avec l’argent de la fédération en septembre dernier. Tamara Ramos, l’une de ses anciennes collaboratrices du temps où il officiait comme président de l’AFE, a décrit sur la chaîne de télévision Telecinco « les humiliations et les insultes », dont certaines à caractère sexiste, qu’elle avait subies de la part de M. Rubiales.
Inculpation pour « agression sexuelle » demandée par le parquet
Après avoir serré les rangs autour de Luis Rubiales, les présidents des fédérations régionales avaient réclamé, le 28 août, sa démission immédiate et s’étaient prononcés pour « une restructuration profonde » de la fédération, « afin d’ouvrir la voie à une nouvelle étape de la gestion du football espagnol ».
Critiqué par ses propres joueuses, le sélectionneur, Jorge Vilda, un proche de Luis Rubiales, a été limogé mardi par la fédération et remplacé par son ancienne adjointe, Montse Tomé. Son homologue de la sélection masculine, Luis de la Fuente, a dû, pour sa part, demander « pardon » la semaine dernière pour avoir applaudi, comme de nombreux membres de la fédération, le discours de Luis Rubiales, le 25 août.
Le parquet espagnol a demandé vendredi l’inculpation de M. Rubiales pour « agression sexuelle ». Un juge du tribunal madrilène de l’Audience nationale, compétent lorsque les faits se déroulent à l’étranger, sera désormais chargé d’admettre la requête du parquet ou de la classer sans suite. S’il l’admet, il confiera l’enquête à un juge d’instruction.
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