Et si les couloirs des prestigieux immeubles de bureaux de New York ou Londres devenaient bientôt des terrains de jeu pour des enfants peu rassurants chevauchant leurs tricycles ? Selon la une datée du 26 juin et le dossier de Bloomberg Businessweek, c’est possible.

Car le magazine économique a choisi de faire figurer sur sa couverture les deux terrifiantes jumelles du film Shining de Stanley Kubrick, accompagnées d’un titre à faire avaler sa cravate : “L’immobilier commercial devient EFFRAYANT”. Tout ceci pour raconter une histoire qui fait peur :

“De Houston à Hong Kong, le film d’horreur des immeubles de bureaux vides et des dettes massives.”

Bloomberg Businessweek récapitule les différents facteurs ayant amené le secteur au bord d’un “périlleux précipice”. “Après une longue période de frénésie d’achats permise par des taux d’intérêt très bas, les propriétaires et les locataires sont aux prises avec les changements concernant la façon et les lieux où les gens travaillent, consomment et vivent, dans le sillage de la pandémie [de Covid-19]. En même temps, les taux d’intérêt plus élevés alourdissent les coûts liés à l’achat ou au refinancement des immeubles.”

En somme, avec l’avènement du télétravail, les bureaux sont beaucoup plus vides, la consommation chute dans les quartiers où ils sont nombreux, comme la City de Londres ou Wall Street à New York, donc les entreprises qui louent ces espaces rechignent à payer la facture. Ce qui laisse leurs propriétaires le bec dans l’eau. Et dans l’incapacité d’honorer leurs crédits, mais aussi de s’en sortir en vendant leurs locaux, puisque personne ne veut s’endetter – avec des taux d’intérêt hauts – pour les leur racheter.

Pour Bloomberg Businessweek, cette situation arrive “à un point critique : rien qu’aux États-Unis, 1 400 milliards de dollars de remboursements d’emprunts liés à de l’immobilier commercial sont dus cette année et la suivante”, selon une estimation. Mais quand viendra le moment de régler la note, “certains propriétaires devant des grosses sommes pourraient opter pour le défaut de paiement plutôt que d’emprunter encore pour pouvoir payer”. Avec toutes les conséquences imaginables pour les établissements bancaires.

Effet domino

Les premiers dominos sont déjà en train de tomber, avertit le magazine.

“Les propriétaires du plus grand centre commercial du centre-ville de San Francisco l’ont abandonné. À Hong Kong, un gratte-ciel flambant neuf n’est loué qu’à un quart de sa capacité.”

Ou encore : “Des propriétaires institutionnels majeurs comme [les fonds d’investissement] Blackstone, Brookfield ou Pimco ont déjà choisi d’interrompre leurs paiements pour certains immeubles.”

Désormais, pour Bloomberg Businessweek, la question est de savoir si ce chamboulement “sera assez important pour déstabiliser l’ensemble de l’économie”. Pour avoir la réponse, il faudra regarder le film jusqu’au bout, et sans se cacher les yeux.