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Ce que contient le pacte asile et migration adopté par le Parlement européen

Le Parlement européen a adopté mercredi une grande réforme de la politique migratoire de l'Union européenne (UE), trois ans et demi après la présentation par la Commission de ce projet qui a donné lieu à de difficiles tractations. Le pacte sur la migration et l'asile, dont les modalités de mise en œuvre devront encore être finalisées, devrait s'appliquer en 2026. 

Les eurodéputés votent mercredi une refonte majeure des lois sur l'immigration de l'Union européenne lors d'une session plénière au Parlement européen à Bruxelles, le mercredi 10 avril 2024.
Les eurodéputés votent mercredi une refonte majeure des lois sur l'immigration de l'Union européenne lors d'une session plénière au Parlement européen à Bruxelles, le mercredi 10 avril 2024. © AP - Geert Vanden Wijngaert
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Certains saluent un moment « historique », d'autres dénoncent la mort de l'Union européenne. Les ONG de défense des migrants parlent de « honte ». Le pacte asile et immigration voté ce mercredi par le Parlement européen fait couler beaucoup d'encre. Concrètement, qu'est-ce qui va changer après l'adoption des eurodéputés de cette politique migratoire durement négociée depuis des années ? RFI fait le point.

  • Contrôles renforcés

Un « filtrage » obligatoire préalable à l'entrée d'un migrant dans l'UE est mis en place. Ces contrôles d'identification et de sécurité peuvent durer jusqu'à sept jours. À l'issue de ce délai maximum, la personne est orientée vers une procédure d'asile – classique ou accélérée – ou renvoyée dans son pays d'origine ou de transit.

Les pays d'arrivée sont chargés d'entrer les empreintes digitales, la photo du visage et les documents d'identité des demandeurs d'asile et des migrants dans la base de données Eurodac, dont le champ a été élargi et qui s'applique désormais aux enfants dès l'âge de six ans.

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  • Procédure à la frontière

Les demandeurs d'asile qui ont statistiquement le moins de chances d'obtenir une protection internationale seront orientés vers une « procédure à la frontière ». Il s’agit ici des ressortissants de pays pour lequel le taux de reconnaissance du statut de réfugié – en moyenne dans l'UE – est inférieur à 20% comme le Maroc, la Tunisie et le Bangladesh.

Dans le cadre de cette procédure, il est prévu de créer quelque 30 000 places dans des centres dédiés, afin d'accueillir à terme jusqu'à 120 000 migrants par an.

Les mineurs non accompagnés faisant courir « un risque à la sécurité » et les familles avec enfants seront aussi concernés.

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La procédure impliquera vraisemblablement une détention, mais, selon l'eurodéputée française et rapporteure pour ce texte Fabienne Keller, des mesures alternatives de restriction de liberté sont aussi possibles.

La durée de la procédure aux frontières est de douze semaines pour l'examen de la demande. Peuvent s’y ajouter douze semaines pour la procédure de renvoi, soit six mois maximum au total.

Reste à savoir quelle sera l'effectivité des renvois, qui se heurtent souvent au refus des pays d'origine de reprendre leurs ressortissants. Autour de 20% seulement des migrants irréguliers recevant l'ordre de quitter le territoire européen sont renvoyés, et pour tenter de remédier à cela, l'UE signe des accords avec les pays d'origine.

Des accords polémiques pour tenter de réduire le nombre d'arrivées à ses frontières

À côté de cette réforme, l'UE multiplie les accords, controversés, avec les pays d'origine et de transit des exilés (Tunisie, Mauritanie, Egypte)  pour tenter de réduire le nombre d'arrivées à ses frontières.

L'UE fait face à une hausse des demandes d'asile, qui ont atteint 1,14 million en 2023, soit leur plus haut niveau depuis 2016, selon l'Agence européenne pour l'asile.

Les entrées « irrégulières » dans l'UE sont, elles aussi, en augmentation, 380 000 en 2023 selon Frontex.

  • Solidarité obligatoire

Le nouveau système, qui remplace le règlement Dublin III, maintient le principe général en vigueur selon lequel le premier pays d'entrée dans l'UE d'un demandeur d'asile est chargé de l'examen de son dossier. D'autres critères ont toutefois été ajoutés à ceux déjà en place, permettant la prise en charge de la demande dans un autre pays que celui par lequel il est arrivé dans l'UE.

Alors que la règle du premier pays d'entrée fait peser un poids plus important sur ceux du sud de l'Europe, comme l’Espagne, la Grèce ou encore l’Italie, un mécanisme de solidarité obligatoire est introduit pour soulager les États membres confrontés à une pression migratoire. Les autres membres de l'UE doivent alors y contribuer en accueillant des demandeurs d'asile (« relocalisations ») ou par une aide financière.

La réforme prévoit un minimum annuel de 30 000 relocalisations par an de demandeurs d'asile de pays sous pression migratoire vers d'autres pays de l'UE. La compensation financière prévue est de 20 000 euros pour chaque demandeur d'asile non relocalisé. Elle sera versée par le pays qui refuse cette relocalisation, au profit du pays sous pression migratoire. Une façon de tenter de surmonter l’opposition de la Hongrie et de la Pologne, hostiles à cette réforme.

  • Situations de crise

L'une des dispositions de la réforme prévoit une réponse en cas d'afflux massif et exceptionnel de migrants dans un État de l'UE, comme au moment de la crise des réfugiés de 2015-2016.

Sera alors rapidement déclenché un mécanisme de solidarité en faveur de l'État concerné et mis en place un régime dérogatoire, moins protecteur pour les demandeurs d'asile que dans les procédures habituelles.

Le nouveau texte prévoit également la prolongation de la durée possible de détention d'un migrant aux frontières extérieures de l'UE – jusqu'à neuf mois au total, procédure de renvoi comprise – et permet des procédures d'examen des demandes d'asile plus rapides et simplifiées pour un plus grand nombre d'exilés, afin de pouvoir les renvoyer plus facilement.

Il s'applique aussi aux situations d'« instrumentalisation », c'est-à-dire aux cas où un « pays tiers ou un acteur non étatique » utilise la migration pour déstabiliser un pays de l'UE.

  • La notion controversée de « pays tiers sûr »

Un État membre peut prendre en compte la notion de « pays tiers sûr » pour y renvoyer un demandeur d'asile. Autrement dit, il peut juger un dossier irrecevable parce que le demandeur est passé par un pays tiers considéré comme « sûr », où il aurait pu déposer une demande de protection. Il faut cependant qu'il y ait un « lien » suffisant entre la personne concernée et ce pays tiers.

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