Choléra à Mayotte : ce que l’on sait de la mort d’un enfant de trois ans

Il s’agit du premier cas mortel sur le territoire français depuis la détection des premiers cas, mi-mars, de cette maladie bactérienne déclenchée par l’absorption d’aliments ou d’eau contaminé.

    « C’est une honte collective, une catastrophe sanitaire », dénonce la députée de l’île Estelle Youssouffa. L’épidémie de choléra à Mayotte a fait un premier mort, un enfant de trois ans dans la commune de Koungou, ont annoncé ce mercredi la préfecture et l’Agence régionale de santé.



    Ce premier cas mortel intervient à la veille de la visite du ministre de la Santé Frédéric Valletoux sur cette île de l’océan Indien, prévue depuis plusieurs jours. On fait le point sur ce que l’on sait de ce drame et de la situation sanitaire dans la péninsule.

    Un enfant qui se trouvait dans un bidonville

    « Un premier enfant est décédé ce jour », écrivent dans un communiqué commun la préfecture et l’Agence régionale de santé. « L’enfant habitait dans le quartier de Koungou dans lequel plusieurs cas de choléra avaient été identifiés ces dernières semaines. »

    Selon les précisions apportées sur les ondes de la radio de RTL ce jeudi par la députée Liot de Mayotte Estelle Youssouffa, la victime est un enfant qui vivait « dans les bidonvilles de Koungou ». « Ce sont souvent des Comoriens qui vivent dans ces bidonvilles », précise-t-elle. À Mayotte, en 2017, 48 % de la population était de nationalité étrangère, d’après les chiffres de l’Insee. La très grande majorité des personnes étrangères viennent des Comores.

    « L’habitat précaire des migrants débarquant à Mayotte, en quête de subsistance depuis les Comores voisines, favorise la propagation du choléra qui est une maladie du sous-développement et de la très grande pauvreté », explique pour France 24 le médecin épidémiologiste Antoine Flahault.

    Diarrhées aiguës et vomissements

    Le choléra, dont a été victime l’enfant, est une maladie bactérienne qui peut provoquer des diarrhées aiguës et entraîner la mort par déshydratation en un à trois jours. Elle est provoquée par l’absorption d’aliments ou d’eau contaminés par une bactérie, le bacille vibrio cholerae ou vibrion cholérique.

    Les trois quarts des personnes infectées n’expriment aucun symptôme. Mais quand elle se manifeste, la maladie peut être redoutable pour 10 à 20 % des cas, avec diarrhées sévères et vomissements qui provoquent une déshydratation accélérée. Il existe cependant des vaccins et des traitements efficaces.

    Des conditions sanitaires difficiles

    « Ce décès d’un enfant nous rappelle que le choléra est maladie mortelle qui en train de prendre racine dans un département français qui est désert médical », a regretté la députée, qui précise que l’île ne dispose que d’un seul hôpital et de cinq urgentistes pour près de 321 000 habitants, selon le dernier décompte de l’Insee.

    Une partie des habitants résident dans des conditions matérielles difficiles et avec un accès à l’eau très limité. « Un cocktail explosif pour une maladie mortelle », résume-t-elle.

    VIDEO. Rationnement, déshydratation, risque sanitaire… le manque d’eau devient critique à Mayotte

    « La situation au centre hospitalier de Mayotte, en termes de ressources humaines, reste très critique, aux urgences notamment », admet également Olivier Brahic, directeur général de l’ARS, auprès de France 24.

    Des cas « autochtones » depuis fin avril

    Les premiers cas de choléra à Mayotte avaient été recensés mi-mars chez des personnes revenant des Comores voisines, où l’épidémie flambe avec 98 décès selon le dernier bilan officiel.

    Les premiers cas « autochtones », diagnostiqués chez des patients n’ayant pas quitté l’île française dans l’océan Indien, sont apparus fin avril dans le département français. Depuis mi-mars, 58 cas de choléra ont été recensés par les autorités mahoraises, dont six cas actifs lors du dernier bilan en date du 6 mai.



    Un protocole élaboré en février pour éviter la propagation de la maladie prévoit la désinfection du foyer du malade, l’identification et le traitement des cas contacts et une vaccination « en anneaux », en élargissant progressivement la zone concernée autour de l’habitation du patient atteint de choléra.

    Une campagne de vaccination en cours

    Une campagne de vaccination est en cours avec plus de 4 000 personnes vaccinées à ce jour, selon l’Agence régionale de santé. Insuffisant pour la députée Estelle Youssouffa, qui demande une campagne massive de vaccination volontaire.

    Effet du changement climatique et de la multiplication des conflits, le nombre de cas de choléra explose actuellement dans le monde, souligne l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

    En France métropolitaine, cette maladie est devenue très rare et essentiellement rapportée par des voyageurs de retour de pays ou de zones infectés : on compte en moyenne zéro à deux cas par an depuis le début des années 2000, selon le ministère de la Santé.