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Face à la pénurie de conducteurs de cars scolaires, les régions craignent une rentrée sous haute tension

Tout le territoire souffre d'une pénurie de conducteurs qui s'est aggravée avec le Covid.
Tout le territoire souffre d'une pénurie de conducteurs qui s'est aggravée avec le Covid. Andy Buchanan / AFP

Le temps presse à quelques jours de la rentrée des classes : 7000 conducteurs manquent à l'appel et les régions sont contraintes de réorganiser les transports dans la précipitation.

À la question «certains élèves risquent-ils de ne pas avoir accès à leur transport scolaire cette année ?», la réponse des régions est plus qu'incertaine. Cette année plus que les autres, la possibilité que l'ensemble des transports scolaires soit perturbé cristallise les inquiétudes. Estimé à 8000 au début de l'été, le nombre de postes vacants chez les conducteurs de car est aujourd'hui d'environ 7000 selon la Fédération nationale des transports de voyageurs. Mais le temps presse et les régions, en charge de ces questions, anticipent une rentrée scolaire sous haute tension.

La pénurie de conducteurs n'est pas nouvelle : elle se profilait déjà depuis plusieurs années, mais s'est nettement aggravée depuis la crise du Covid-19. Confinements obligent, les transports scolaires ont été réduits à l'arrêt pendant de longs mois, dissuadant les candidats déjà réticents à effectuer un travail peu rémunéré et aux horaires fractionnés. Si la carence concernait jusqu'alors seules quelques régions, tout le territoire est aujourd'hui menacé. De la métropole bordelaise au Vaucluse en passant par le Loiret et l'Oise. Résultat, régions et entreprises du secteur doivent réorganiser précipitamment les circuits pour amortir le choc le jour de la rentrée scolaire.

À commencer par la modification des horaires de passage du car. «Les circuits de ramassage vont être modifiés pour s'adapter à la prise en charge de l'ensemble des enfants», explique David Valence, vice-président de la région Grand Est, en charge des transports. Dans cette région où, chaque jour, 200.000 élèves empruntent un car pour se rendre à l'école, il va par exemple être nécessaire pour certains de venir «15 minutes avant l'horaire initial du passage du car, ou 15 minutes après». Dans les communes très étendues mais avec peu d'habitants, «les 5 ou 6 points de ramassage seront rassemblés en un seul», poursuit-il.

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Boucher les trous

Autre levier concret : l'étalement des horaires de rentrée en classe par les établissements eux-mêmes. «Faire entrer en classe les lycéens à 8 heures et les écoliers en primaire à 8h45 nous permettrait d'avoir plus de temps pour qu'un chauffeur effectue plus de trajets», développe David Valence, conscient des éventuels inconvénients pour l'organisation des parents. Ces modifications exceptionnelles sont d'ailleurs surveillées de près par le ministère de l'Éducation : elles font pour l'instant l'objet d'expériences ciblées dans quelques territoires, afin de ne pas désorganiser tout le système scolaire et l'organisation parentale.

Mais ces solutions font office de pansements. Dans les Hauts-de-France, la réorganisation des circuits rassure mais ne convainc pas : «On fait tout pour boucher les derniers trous afin que chaque enfant ait accès à un car le jour de la rentrée, mais on commence l'année avec un flux extrêmement tendu», prévient Franck Dhersin, vice-président de la région chargé des transports. «À la moindre reprise du Covid, au moindre arrêt maladie ou démission... C'est la catastrophe», poursuit-il.

Car le fond du problème se trouve ailleurs : le métier n'attire plus. La faute aux horaires fractionnés (la journée d'un conducteur est marquée par une grande pause entre la tournée pour emmener les élèves à l'école et celle pour les ramener chez eux) qui induisent de maigres salaires calculés sur un temps partiel. À titre d'exemple, dans le Pays de la Loire, un conducteur est payé environ 700 euros par mois.

Conducteur maître nageur

Conscientes de cette limite, les régions ont d'abord tenté de communiquer sur les aspects positifs du métier : les vacances scolaires, le temps libre pour s'occuper de ses enfants ou encore la participation à une mission d'intérêt général. «Nous avons écrit à toutes les familles au mois de juillet pour les informer du problème, et surtout indiquer que si certains ont des proches qui cherchent un emploi, ce métier est possible», explique Roch Brancour, vice-président de la région chargé des transports, estimant que cette annonce a eu un «petit effet» sur les 500 postes qui étaient à pourvoir au début de l'été.

À échelle nationale, un certain élan de solidarité a conduit des chefs d'entreprise, des personnes retraitées ou du personnel administratif à se rendre disponible pour conduire les cars au moment de la rentrée. Un élan qui permet à Régions de France, l'institution qui représente les régions françaises auprès des pouvoirs publics, de minimiser les chiffres de la pénurie. Tandis que la Fédération nationale des transports de voyageurs évoque 7000 postes vacants, Régions de France en détermine 3750. «C'est un moyen d'être rassurant envers les parents d'élève, ce qui est normal, commente Ingrid Mareschal, présidente de la Fédération. Mais l'écart entre chiffre s'explique par le caractère provisoire et incertain de ces embauches d'urgence».

Car combler les abandons de postes ne peut se faire que sur le long terme. En réfléchissant à une augmentation du temps de travail quotidien, pour revaloriser les salaires notamment. Mais aussi en proposant des formations adaptées. De fait, les horaires fractionnés offrent la possibilité d'exercer un autre métier à temps partiel, ce qui permet surtout d'additionner deux salaires. «Nous essayons de proposer des formations doubles, comme le fait de devenir conducteur de car le matin et livreur en milieu urbain la journée ou encore conducteur et maître nageur», développe David Valence de la région Grand Est.

Pour valoriser ce secteur, pôle emploi veille également à la sensibilisation de ses conseillers. «Nous avons dressé un portrait-robot du conducteur de transport scolaire : il faut désormais que ce métier soit proposé de façon quasi systématique aux demandeurs d'emploi», encourage Ingrid Mareschal.

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8 commentaires
  • FLORENCE BELLET

    le

    Combien sont payes les chauffeurs de car?

  • PCAR2

    le

    Scoop de la soirée : Macron vient d'annoncer qu'ayant pris conscience de la gravité du problème, il a décidé que plus un seul chauffeur de car scolaire ne gagnerait moins que le SMIC horaire.
    Vous imaginez un maçon qui commencerait à construire votre maison le lundi matin à 8h00, et s'apercevrait subitement à 7h59 qu'il n'a pas de camion, plus d'ouvriers, et pas de ciment ?
    Vous pensez que ce maçon maçonnerait longtemps ?

  • chaproumi

    le

    Plus de profs, plus de chauffeur de bus, étrangement toutes ces professions ont un lien avec les gamins et leur éducation à la noix.

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