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Données personnelles

Pornographie: la Cnil n'est pas opposée à l'analyse faciale pour vérifier l'âge des internautes

Alors que le gouvernement entend mieux limiter l’accès aux sites pornographiques par des mineurs, le gendarme de la vie privée revient sur l’une des solutions régulièrement évoquées.

Sur le sujet du contrôle de l’accès à la pornographie en ligne, la Cnil veut être "pragmatique". Interrogée par le Figaro, sa présidente Marie-Laure Denis évoque des solutions de court-terme pour mettre fin à la consultation des sites pornographiques par des mineurs. Parmi elles, la mise en place d’un contrôle par carte bancaire, mais aussi d’un contrôle par analyse du visage.

Solution de court-terme

"La Cnil n’est pas opposée au recours à la carte bancaire, avec une transaction à zéro euro, ou aux solutions d’estimation de l’âge grâce à l’analyse des traits du visage. Ce ne sont pas des systèmes parfaits, mais ils peuvent être utilisés dès maintenant. Ne nous privons pas de ces solutions de court-terme!" explique la patronne du gendarme des données personnelles.

Concrètement, un internaute accédant à un site pornographique serait invité à activer la caméra à selfie de son smartphone ou la webcam de son ordinateur, pour se filmer pendant quelques secondes, tandis qu’une intelligence artificielle serait chargée d’estimer son âge. Un dispositif qui existe déjà pour certaines plateformes, comme Facebook.

“Ces solutions auront certes du mal à distinguer une personne de 17 ans d’une autre de 19 ans, mais elles peuvent distinguer un enfant de 13 ans d’un adulte de 20 ans” explique Marie-Laure Denis.

Aspect intrusif

Dans son avis rendu en juillet 2022, la Cnil se montrait plutôt réservée vis-à-vis de ce type de pratiques.

"Le recours à de tels systèmes, par leur aspect intrusif [...] ainsi que du fait de la marge d’erreur inhérente à toute évaluation statistique, devrait impérativement être conditionné au respect de standards de fonctionnement, de fiabilité et de performance. Ces exigences devraient être vérifiées de manière indépendante" rappelait ainsi la Commission.

Parmi les principaux risques évoqués, la collecte des enregistrements vidéo liés à la caméra du smartphone ou de l’ordinateur, pouvant donner lieu à un chantage à la webcam. Des risques qui seraient réduits si ce système était géré par un tiers, ajoutait la Cnil, qui se prononçait contre son déploiement s’il venait à être opéré directement par les sites pornographiques.

Pas de reconnaissance faciale

Comme le rappelle Marie-Laure Denis, un système d’analyse faciale n’implique en aucun cas une reconnaissance faciale: le logiciel est chargé de déterminer un âge approximatif de l’internaute, mais pas d’identifier ce dernier.

Toujours auprès du Figaro, la présidente de la Cnil précise que ces solutions, si elles étaient déployées, devraient être par la suite remplacées par un système plus pérenne, qui doit être testé dans les prochaines semaines à l'initiative du gouvernement: la vérification d’âge par la transmission d’un document anonymisé édité par sa banque, son opérateur mobile, ou tout autre fournisseur pouvant attester sa majorité.

Pour la solution d'analyse faciale comme pour la vérification par une attestation numérique, les autorités feront toutefois face à un problème de taille: convaincre un nombre suffisant de plateformes de s'y conformer, parmi les milliers de sites accessibles en ligne, en quelques clics.

https://twitter.com/GrablyR Raphaël Grably Rédacteur en chef adjoint Tech & Co