L'uniforme à la mode ?

Le retour de l'uniforme à l'école ? Ici en Grande-Bretagne ©Getty - SolStock
Le retour de l'uniforme à l'école ? Ici en Grande-Bretagne ©Getty - SolStock
Le retour de l'uniforme à l'école ? Ici en Grande-Bretagne ©Getty - SolStock
Publicité

Brigitte Macron défend le port de l’uniforme à l’école, et on n’a pas fini d’en entendre parler cette année ! Car la Première dame n’a pas le monopole de cette idée…

Et son message résonne étrangement, se télescope, même, avec la niche parlementaire du jour, celle du Rassemblement National, qui va défendre sa propre proposition de loi pro-uniforme. Pendant qu’au Sénat, la droite LR vient aussi de déposer son texte (qui devrait être examiné au printemps) !

L’uniforme, politiquement à la mode, paré de toutes les vertus : Brigitte Macron, presque nostalgique (dans Le Parisien) de sa jupette et du pull bleu marine... C’était pratique, ça coûtait moins cher. Argument matériel et moral : un moyen de rétablir l’autorité. C’est déjà ce que plaidait le candidat François Fillon en 2017.

Publicité

Si 12 millions d’élèves portaient la même tenue, ce serait (nous dit-on) un vecteur d’égalité : moins de violences, de harcèlement, de racket, parce que moins de frustrations liées aux marques. Et puis ça règlerait le problème des directeurs d’établissement, parfois démunis face aux vêtements à caractère religieux (on pense évidemment aux abayas).

Cet uniforme, certains disent que ce serait le retour à une "tradition" républicaine ?

Ça c’est une énorme fake news ! Il n’y a pas de « retour à », puisque ça n’a jamais existé. Sauf pour les internes des lycées créés par Bonaparte en 1802.

Quant à la blouse d’après-guerre ? Elle n’était pas imposée par l’Etat. C’était pour protéger contre les taches d’encre ! Et mai 68 n’a rien à voir avec l'arrêt de la blouse. C’est le stylo bic et la machine à laver qui l'ont rendue caduque.

Aujourd’hui, l’uniforme est exigé dans certains établissements privés, ou militaires. Il est porté en outre-mer, en Martinique notamment, mais aussi depuis 7 ans en Nouvelle-Calédonie, Province Sud… 40 euros le kit à chaque rentrée, pour 5 polos, 2 K-Way et 1 chapeau.

On vous sent, emballé, Yael ?

Tant que ça relève d’un règlement intérieur, voté, rien n’interdit de le faire. Le ministre Pap Ndiaye rappelle cette liberté. Mais vouloir une loi, uniforme, pour tous, il est contre, car ça soulève effectivement de vraies questions.

A quoi bon l'uniforme, si c'est un cache-misère ? Dans la dernière enquête Pisa, on apprend qu’entre deux élèves de 15 ans, l’écart de niveau peut dépasser 2 ans et demi de scolarité, selon votre lycée ! Un sweat, un blazer à écusson, qu’est-ce que ça changerait ?

La laïcité, même chose : l’imagination des intégristes est débordante, d'autres signes deviendraient distinctifs. Faudra-t-il rajouter un chapeau à l’uniforme pour cacher le bandana ?

Sans parler des signes extérieurs de richesse : il y aura toujours des iphones 14 et des vieux, d’occasion, dans les poches.

Plus fondamentalement, l’adolescence est un moment de construction de soi : développer le sentiment d’appartenance à la République, il le faut, mais la République construit des individus libres, l’école apprend la diversité, ce n’est pas la police du corps.

Si vous n’êtes pas convaincu : regardez les deux villes, Béziers en 2014 (dont le maire est Robert Ménard, apparenté RN), et Provins en 2019 (mairie LR), où l’expérience a été tentée… Les tenues communes ont fini dans les greniers de la mairie.

Si on veut vraiment brasser, créer du vivre ensemble, régénérer nos valeurs républicaines, alors c’est plutôt du côté du SNU, Service national universel, qu’il faudra regarder. Le Président doit bientôt faire des annonces, moins cosmétiques (on l’espère), qu’un uniforme, tenue de camouflage des vraies injustices pour se donner bonne conscience.

L'équipe

pixel