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Tribune

Le quiet quitting, « la » solution pour sauver la planète ?

TRIBUNE // Et si le quiet quitting était l'occasion pour repenser le travail, en le mettant au service de la transition écologique et sociale ? Fabien Sécherre, porte-parole de la plateforme jobs_that_makesense*, explique en quoi ce phénomène qui angoisse les recruteurs rebat les cartes du monde du travail.

Le quiet quitting : une opportunité pour réorienter le marché de l'emploi au service de la transition écologique et sociale ?
Le quiet quitting : une opportunité pour réorienter le marché de l'emploi au service de la transition écologique et sociale ? (DR)

Par Fabien Sécherre, porte-parole de jobs_that_makesense

Publié le 8 déc. 2022 à 08:00

Le quiet quitting , littéralement « la démission silencieuse », pourrait se traduire par l'implication minimale d'un·e salarié·e au sein de son entreprise. Ce « quiet quitter » va par exemple faire le choix de ne pas faire d'heures supplémentaires, de se limiter au strict cadre de ses missions sans prendre de projets additionnels, de refuser d'avoir des responsabilités s'il ne souhaite pas en avoir. Cela peut aussi passer par le choix de ne pas s'impliquer émotionnellement dans la vie de l'entreprise (événements, afterworks ).

Il s'agit donc de faire son travail, ni plus, ni moins, sans se mettre en faute professionnelle et sans s'impliquer davantage.

Quelles sont les causes du quiet quitting ?

Les jeunes générations s'emparent du phénomène qui a explosé en tendance sur TikTok cet été. Hunter Kaimi, dont la vidéo à par exemple fait 1,6 million de vues. Elle met en avant deux réalités qui pour lui traduisent ce phénomène de ras-le-bol à l'origine du quiet quitting.

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D'une part, il y a cette envie de ne pas en faire trop lorsqu'on travaille pour des personnes qui ne se préoccupent pas de la santé de leurs salariés : « La réalité c'est que beaucoup de gens de mon âge travaillent pour des employeurs qui ne nous considèrent pas en tant qu'être humain », dit le TikTokeur.

Cette remise en question du rapport humain au travail est amplifiée par un certain épuisement face à un rythme de travail de plus en plus intense. Après le premier confinement, le baromètre Empreinte Humaine révèle que 2,5 millions de salariés étaient en état de burn-out sévère. On semble donc assister à un contre phénomène face à la hustle culture, ou productivité toxique, qui consiste à se dévouer totalement à son travail, parfois jusqu'au burn-out .

Selon Malakoff Humanis cité par Le Parisien , 42 % des salarié.e.s se sont fait prescrire un arrêt de travail en 2022. Les motifs psychologiques sont à l'origine d'un arrêt sur cinq, et constituent la première cause d'arrêt long. Ces statistiques sont notamment « tirées » par les femmes et les jeunes, plus exposés au travail précaire, au déséquilibre vie pro-vie perso et à l'épuisement professionnel.

La quête de sens et l'éco-anxiété

D'autre part, il y a cette absurdité à faire des heures supplémentaires pour s'assurer un futur des plus incertain, toujours selon le même TikTokeur : « Pourquoi je voudrais acheter une maison, alors que le monde ne sera peut-être plus vivable dans 50 ans ? »

Cette éco-anxiété impacte aussi la relation au travail : selon une étude publiée par Audencia et Jobs that makesense en mars 2022 , 57 % des actifs souhaitent contribuer aux enjeux de la transition écologique et/ou sociale dans le cadre de leur travail.

Et selon le baromètre Talents du BCG de janvier 2020 , six jeunes sur dix sont prêts à refuser un poste dans une entreprise qui manque d'engagement.Il nous semble que ce phénomène de quiet quitting est en réalité une formidable opportunité de réorienter le marché du travail. En particulier, deux axes nous semblent indispensables pour reconstruire un rapport au travail sain et durable.

Une opportunité pour repenser le sens et le temps au travail

Tout d'abord, il s'agit de (re) donner du sens au travail . Cette notion de « sens » peut prendre différentes réalités en fonction des personnes, mais il ressort de notre étude précédemment citée quelques grandes aspirations.

Selon les répondants, trois actions sont prioritaires pour renforcer le sens au travail : renforcer l'impact positif de l'entreprise sur la société et/ou la planète (58 % des répondants, et 65 % chez les 18-24 ans) ; être exemplaire par rapport à ses engagements (38 % des répondants, et 46 % chez les 45 ans et plus) ; proposer une flexibilité du temps de travail (36 % des répondants, et 44 % chez les 25-34 ans). Nous constatons la traduction de ces aspirations sur notre plateforme, avec un doublement des recherches d'emploi à impact positif dans les douze derniers mois.

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Même Sundar Pichai, le PDG du groupe Alphabet , le disait dans une récente interview pour Bloomberg : « Quand je regarde la jeune génération, les gens qui sont aujourd'hui adolescents, je ne les vois pas faire le choix de travailler pour une entreprise qu'ils jugent polluante. »

Ensuite, comme le montre également le 3e point de l'étude citée plus haut, ce phénomène est l'occasion de redéfinir l'aménagement du temps de travail.

Semaine de 4 jours (payés 5) pour tous ?

La généralisation du télétravail, les expérimentations autour de la semaine des 4 jours , sont autant de tendances de fond qui vont dans la bonne direction.

Sur jobs that makesense, 80 % des entreprises sont ouvertes au télétravail : 12 % en télétravail total ; 41 % en télétravail partiel (2 à 3 jours par semaine) ; 27 % plus ponctuellement. Autre chiffre significatif : plus de la moitié des 18-24 ans (53 %) déclarent être prêts à démissionner s'il est impossible de télétravailler dans leur entreprise, selon l'étude Workforce View », publié ce mercredi 13 juillet par l'ADP Research Institute. Un chiffre qui les différencient nettement de l'ensemble des Français qui, eux, se disent à 38 % à l'aise avec l'idée de retourner au bureau à plein temps.

Les entreprises doivent prendre en compte ces nouvelles demandes si elles souhaitent retenir et motiver leurs salariés de manière durable.

* jobs_that_makesense référence une centaine de nouveaux emplois à impact positif chaque jour, sur un total de plus de 25.000 offres et plus de 2.000 entreprises et associations qui recrutent.

À noter

Cette tribune a été rédigée par un contributeur extérieur à la rédaction. Les Echos START ne le rémunère pas, et ce dernier n'a pas non plus payé pour publier ce texte. Le choix de le publier s'est donc fait uniquement sur des critères éditoriaux.

Fabien Sécherre

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