En 2022, la forêt primaire tropicale a perdu 4,1 millions d’hectares à l’échelle de la planète, soit la superficie d’un pays comme la Suisse, ou l’équivalent de onze terrains de football par minute. Ces destructions ont généré 2,7 milliards de tonnes de CO2, soit à peu près les émissions annuelles de l’Inde – sur 43 milliards de tonnes émises chaque année dans le monde.
Ces nouveaux chiffres, révélés mardi 27 juin par l’Observatoire forestier mondial du World Resources Institute (WRI) et l’université du Maryland, aux Etats-Unis, démontrent une nouvelle fois combien il est difficile de passer des paroles aux actes. En novembre 2021, lors de la conférence pour le climat (COP26) de Glasgow, au Royaume-Uni, 145 dirigeants se sont engagés à mettre un terme à la déforestation et à la dégradation des terres d’ici à 2030. Pour la première fois depuis que cette promesse a été formulée, des données, compilées sur une année complète à partir d’observations satellitaires, permettent d’évaluer les progrès.
« Après les engagements courageux de Glasgow, nous espérions voir un signe, dans les chiffres, montrant que nous étions à un tournant en termes de déforestation. Ce signe n’est pas là. Il faut nécessairement du temps pour mettre en œuvre des politiques et mobiliser des fonds, mais, collectivement, nous ne semblons pas avoir pris la mesure de l’urgence planétaire que ce problème représente », regrette Frances Seymour, spécialiste des forêts au WRI.
« Différentes promesses et engagements ont reconnu le rôle majeur des forêts et les conséquences dévastatrices de la déforestation, ajoute Rod Taylor, le directeur du programme forêts de l’organisation. Mais nous sommes loin d’être sur la bonne trajectoire et nous allons même dans la mauvaise direction. »
Réservoir de biodiversité
Les forêts, et en particulier les forêts primaires, sont un immense réservoir de biodiversité, contribuent à la régulation du climat et participent à la lutte contre le réchauffement en stockant du carbone. Elles constituent aussi une source de subsistance majeure pour une très large partie de l’humanité.
Au total, au-delà des forêts primaires (en prenant en compte les forêts secondaires et les plantations), la perte totale de couvert forestier a légèrement ralenti, diminuant de 10 % entre 2021 et 2022. Mais ce ralentissement s’explique par le fait que les incendies ont été globalement moins dévastateurs que les années précédentes, et ne traduit pas une inflexion positive. En 2021, les forêts boréales, notamment, avaient connu une saison des feux record : en Russie, la perte de couvert forestier a ainsi baissé de 34 % entre 2021 et 2022 – le pays pèse tout de même pour encore près de 20 % des pertes globales l’an dernier. « Si l’on regarde les pertes non liées aux incendies, le chiffre est quasiment identique à celui de 2021, confirme Mikaela Weisse, directrice de l’Observatoire mondial des forêts au WRI. L’hémorragie continue. »
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