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Espagne: les députés votent une "loi transgenre" qui permet de changer librement de genre dès 16 ans

Des manifestants pour la défense des droits des personnes transgenres à Madrid (Espagne), le 4 juillet 2020.

Des manifestants pour la défense des droits des personnes transgenres à Madrid (Espagne), le 4 juillet 2020. - PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP

Ce projet de loi, qui va être adopté ce jeudi, divise depuis de longs mois la classe politique espagnole.

Le texte divise la gauche au pouvoir comme le mouvement féministe. Les députés espagnols ont adopté jeudi en première lecture un projet de loi permettant de changer librement de genre dès 16 ans.

Cheval de bataille du parti de gauche radicale Podemos, allié des socialistes au sein du gouvernement de Pedro Sanchez, ce texte a été soutenu par 188 députés tandis que 150 ont voté contre et 7 se sont abstenus.

S'il est, comme prévu, adopté définitivement par le Sénat dans les semaines à venir, il permettra à l'Espagne de rejoindre les quelques pays au monde autorisant l'autodétermination du genre via une simple déclaration administrative. En Europe, le Danemark a été le premier pays à accorder ce droit aux personnes transgenres en 2014.

"Les femmes trans sont des femmes"

Concrètement, ce texte doit permettre aux personnes transgenres de faire changer leur nom et leur genre sur leurs papiers d'identité lors d'un simple rendez-vous auprès de l'administration. Et ce, sans fournir de rapports médicaux ou de preuve d'un traitement hormonal suivi durant deux ans, comme c'est le cas aujourd'hui pour les personnes majeures dans le pays.

"Cette loi répare une dette historique de l'Etat à l'égard des personnes transgenres" et les "'dépathologise'", a déclaré mercredi, devant les députés, la ministre de l'Égalité, Irene Montero, porte-étendard de cette loi.

"Les femmes trans sont des femmes", a insisté cette responsable de Podemos, en dénonçant la "transphobie".

Baptisé "loi trans", ce texte permettra aussi aux 14-16 ans de changer librement de genre à l'état civil, à condition qu'ils soient accompagnés dans la procédure par leurs tuteurs légaux. Les 12-14 ans devront eux obtenir le feu vert de la justice. Actuellement, tous les mineurs doivent obtenir cette autorisation judiciaire.

Dans tous les cas, un délai de trois mois est prévu entre le dépôt de la demande et sa validation par le requérant afin qu'il puisse confirmer sa décision de changer de genre.

Le texte interdit par ailleurs les thérapies de conversion, visant à changer l'orientation sexuelle des personnes LGBT+, avec des amendes pouvant aller jusqu'à 150.000 euros.

Fracture à gauche

Adopté en Conseil des ministres il y a plus d'un an, ce projet de loi a provoqué une fracture entre Podemos, qui en a fait un pilier de son action gouvernementale et réclamait une adoption express, et les socialistes, qui ont tenté de modifier le texte en vain.

Il a aussi profondément divisé le mouvement féministe, entre les partisans d'Irene Montero et des militantes historiques, en guerre ouverte contre ce texte."Revendiquer le genre comme étant au-dessus du sexe biologique (...) me semble être un recul" pour les femmes, a ainsi dénoncé l'ancienne numéro deux du gouvernement Sanchez, Carmen Calvo, dans un entretien publié par le quotidien El Mundo en septembre.

"L'État doit donner une réponse aux personnes transgenres mais le sexe (biologique) n'est ni volontaire, ni optionnel", a-t-elle ajouté, en mettant en avant les risques juridiques induits par cette loi.

Ces féministes historiques craignent notamment que des personnes de sexe masculin s'auto-identifiant comme femmes puissent participer à des compétitions sportives féminines ou se faire incarcérer dans des prisons pour femmes par exemple.

T.P. avec AFP