Nombreuses écoles fermées, trains à l’arrêt, guichets baissés dans certaines administrations… En proie à une crise économique attisée par l’inflation, le Royaume-Uni connaît mercredi 1er février sa journée de grève d’une ampleur sans précédent depuis une décennie.
Jusqu’à un demi-million de Britanniques sont appelés à débrayer pour réclamer de meilleurs salaires. A la veille du centième jour du gouvernement conservateur de Rishi Sunak, la fédération syndicale TUC (Trades Union Congress – « Congrès des syndicats ») a prévenu que ce serait « la plus grosse journée de grèves depuis 2011 » avec, pour la première fois en plusieurs mois de mouvements sociaux, la participation des enseignants.
Plusieurs milliers d’écoles sont notamment fermées à l’appel du Syndicat de l’éducation nationale (ou NEU, pour National Education Union) contraignant des parents, parfois informés au dernier moment, de rester chez eux pour garder leurs enfants. Plusieurs organisations de parents d’élèves ont publié une déclaration commune dans laquelle elles disent « soutenir » le mouvement, relevant « les conséquences d’années de sous-financement » dans les écoles.
La ministre de l’éducation, Gillian Keegan, s’est dite « déçue » et « très inquiète » de ce mouvement, et a jugé « incohérent économiquement » d’accorder les hausses salaires réclamées. « Nous avons dit que nous étudierions les futurs salaires, que nous regarderions la charge de travail et la flexibilité que les enseignants demandent », tout comme les problèmes de recrutement des enseignants, a-t-elle défendu mercredi matin sur Sky News.
Au petit matin, la gare londonienne de King’s Cross, par laquelle transitent chaque jour des milliers de travailleurs, était exceptionnellement calme, la grève des employés du rail empêchant de nombreuses personnes de se rendre sur leur lieu de travail.
Malgré la grève de la police aux frontières, l’aéroport d’Heathrow à Londres est « totalement opérationnel » mercredi matin, a annoncé un porte-parole, rappelant que des militaires ont été déployés pour pallier l’absence des grévistes.
« Position intenable du gouvernement »
« Je n’aimerais vraiment rien tant (…) qu’avoir une baguette magique et vous payer tous plus », avait assuré lundi le premier ministre Rishi Sunak lors d’une visite à des travailleurs du secteur de la santé. Mais, selon lui, des hausses de salaires alimenteraient l’inflation et dégraderaient davantage les finances publiques.
Dans tous les secteurs, les grévistes demandent en priorité des salaires en ligne avec l’inflation, qui dépasse 10 % depuis des mois, entraînant des millions de Britanniques dans la pauvreté. Et selon les dernières prévisions du Fonds monétaire international, le pays devrait être cette année la seule économie majeure à subir une récession, avec une contraction de 0,6 % de son produit intérieur brut.
Les grévistes dénoncent, en outre, le projet de loi dont le but est d’instaurer un service minimal en cas de débrayages dans une multitude de services publics. Pour les syndicats, il s’agit d’une atteinte au droit de grève, d’une « attaque frontale contre les travailleurs et les syndicats ».
Le bras de fer porte aussi sur les conditions de travail, les retraites, sur fond d’un mouvement social qui dure depuis le printemps. Pour le seul mois de novembre, l’Office national des statistiques a compté 467 000 journées de travail perdues en raison des conflits sociaux, un chiffre sans précédent depuis 2011. Près d’un million de journées de grèves cumulées avaient alors été comptabilisées. Depuis juin 2022, 1,6 million de jours de travail ont été « perdus ».
Si des espoirs d’avancées sont perceptibles dans le rail, un nouveau débrayage est prévu dès vendredi, tandis que les pompiers ont voté en faveur d’une première grève en vingt ans. Les infirmières et les ambulanciers seront aussi de nouveau en grève en février. Les douaniers britanniques postés en France ont annoncé mercredi qu’ils débrayeront durant les vacances de février.
« La position du gouvernement est intenable. Il ne peut pas s’asseoir sur un mouvement de grève sans précédent et qui grossit », a réagi le secrétaire général du PCS (pour Public and Commercial Services – « Services publics et commerciaux »), le syndicat de l’administration, Mark Serwotka, sur Sky News, l’appelant à « une attitude beaucoup plus réaliste ».
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