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Gaz, Ukraine… Ce qu’il faut retenir de la visite du président chinois Xi Jinping en Russie

Dans "Apolline Matin" ce mercredi sur RMC et RMC Story, Nicolas Poincaré se penche sur la visite du président chinois Xi Jinping en Russie, où il a été reçu en grande pompe par Vladimir Poutine.

Le président chinois Xi Jinping achève une visite de trois jours en Russie. Et les deux pays ont célébré leur amitié de façon spectaculaire. Rien à voir avec la première visite d’un dirigeant chinois communiste à Moscou. C’était au début des années 1950. Mao était venu de Pékin en train et Staline l’avait fait poiroter cinq jours avant de daigner le rencontrer. Histoire de bien montrer qui était le patron.

Mais 70 ans plus tard, les choses ont bien changé. Xi Jinping a été accueilli avec tous les égards et les honneurs. Vladimir Poutine l’a reçu deux fois en deux jours et plusieurs heures à chaque fois. Les deux présidents ont porté des toasts à "l’amitié sans limite", à la coopération entre les deux grandes puissances voisines. Et plus concrètement, ils ont signé des accords économiques.

Notamment pour la construction d’un gazoduc géant supplémentaire qui reliera la Sibérie à la Chine et qui permettra de livrer des milliards de mètres cubes de gaz. A terme, les Russes pourront vendre aux Chinois tout le gaz qu’ils ne vendent plus aux Européens. A l’inverse, pour prendre un seul exemple, la part des voitures chinoises vendues en Russie va passer de 7% à 60%, depuis que les constructeurs européens comme Renault ont quitté le pays…

Mais c’est surtout sur le plan diplomatique que les deux pays se rapprochent. Xi Jinping vient d'être réélu pour un troisième mandat de président de la Chine, à l’unanimité des membres de l'assemblée nationale populaire. Il a aussitôt nommé un nouveau ministre des affaires étrangères, Qin Gang, connu pour ses positions anti-américaines. C’est ce que l'on appelle en Chine un "loup", qui n'hésite pas à parler de la guerre contre les Etats-Unis comme d’une probabilité à laquelle la Chine doit se préparer.

La Chine veut peser sur le monde

Ce nouveau discours chinois, beaucoup plus agressif vis à vis des Américains, ne peut que plaire à Vladimir Poutine, lui-même en guerre contre l’Otan. C’est à la naissance d’un bloc anti-occidental que l’on a assisté cette semaine à Moscou. Avec tout de même une ligne rouge qui n’a pas été franchie: il n’a pas été question que la Chine vende des armes à la Russie. En tout cas, pas ouvertement…

D’autant que la Chine voudrait servir de médiateur dans le conflit avec l’Ukraine. Xi Jinping est arrivé à Moscou avec un plan de paix en 12 points qui se veut équilibré. La Chine propose un cessez-le-feu et des négociations dès que possible en vue d’un règlement global. Mais Pékin ne précise pas sur quelle base, ni de quelles frontières on va discuter. C’est une posture, une apparence de neutralité alors qu’en réalité, la Chine n’a jamais condamné l’invasion russe ni lâché la Russie. Et d’ailleurs, Xi Jinping a invité Vladimir Poutine à venir rapidement à Pékin. Façon de montrer qu’il ne tient aucun compte du mandat d'arrêt que vient de lancer la Cour pénale internationale contre le président russe, vendredi dernier. Vladimir Poutine est désormais considéré comme un criminel de guerre par la justice internationale, pas par son ami Xi Jinping.

Et la diplomatie chinoise veut aussi intervenir sur d’autres dossiers chauds. Le 10 mars, l'Iran et l'Arabie saoudite ont rétabli leurs relations diplomatiques. C’est un événement majeur, la réconciliation des chiites et des sunnites, qui brise l’isolement de l’Iran et qui s’est fait dans le dos des Américains et des Israéliens. Et où cet accord a-t-il été négocié et signé ? À Pékin, sous l'égide de la Chine. Cet accord il y a 15 jours et cette visite à Moscou aujourd’hui montrent bien que Xi Jinping a décidé de peser sur les affaires du monde.

Nicolas Poincaré