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Décryptage

Ecocide : 5 choses à savoir sur ce crime introduit dans le droit européen

Marées noires, pollution toxique… Ces dommages à l'environnement seront bientôt sanctionnés par l'Union européenne. « Une victoire dans la lutte contre la criminalité environnementale », se réjouit la députée Marie Toussaint, porteuse du projet au Parlement européen.

Les Etats membres ont 24 mois pour mettre en oeuvre la Directive au niveau national.
Les Etats membres ont 24 mois pour mettre en oeuvre la Directive au niveau national. (Laurent Grandguillot/REA)

Par Lou Vincent

Publié le 17 nov. 2023 à 12:31Mis à jour le 17 nov. 2023 à 12:53

C'est une décision historique. Les instances de l'Union européenne ont entériné, jeudi 16 novembre, un accord sur la criminalité environnementale reconnaissant l'écocide comme infraction aggravée dans le droit européen.

Le 29 mars dernier, le Parlement européen avait déjà adopté un texte afin de réviser la directive datée de 2008 sur la protection de l'environnement. Après des mois de négociations avec les Etats membres, l'accord a finalement été trouvé hier et le vote officiel du texte aura lieu début 2024. Tour d'horizon des choses à savoir sur cette nouvelle infraction.

1. Qu'est-ce que le crime d'écocide ?

Littéralement, le terme « écocide » signifie « tuer sa maison ». En octobre 2020, la députée Marie Toussaint (Verts/ALE) fonde l'Alliance internationale de parlementaires pour la reconnaissance de l'écocide, afin de défendre l'inscription de ce crime dans le droit.

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Dans le texte européen voté hier, le terme « écocide » n'est pas défini en tant que tel. Mais la notion est rapportée à « une infraction dite qualifiée visant à incriminer les atteintes graves à l'environnement - la destruction, ou des dommages étendus et substantiels qui sont soit irréversibles, soit durables - conduisant à des conséquences environnementales catastrophiques ».

Le texte adopté peut ouvrir un nouvel âge du contentieux environnemental en Europe

Marie Toussaint Députée européenne

L'Union européenne est la première instance internationale à avoir reconnu ce crime. « Il revient désormais aux Etats membres de porter la reconnaissance du crime d'écocide au sein du Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale, dont ils représentent près d'un quart des membres », affirme l'élue.

2. Qu'est-ce que cela concerne ?

Feux de forêts massifs, marées noires, pollution causée par les navires ou encore prélèvements illicites d'eau… La liste des comportements considérés comme « illicites » est longue et a d'ailleurs été élargie « afin de garantir que les auteurs d'infraction puissent être poursuivis même s'ils disposaient d'une autorisation pour exercer leurs activités, notamment lorsque l'autorisation a été obtenue frauduleusement ou par la corruption, l'extorsion ou la coercition », rapporte la députée.

Pour rappel, la criminalité environnementale est la troisième plus grande activité criminelle au monde. D'après les données du Conseil de l'Union européenne, elle entraîne entre 110 et 281 milliards de dollars de pertes chaque année, alors que son rythme ne cesse d'augmenter (entre +5 % et +7 % par an).

3. Qu'est-ce que l'on risque ?

Les sanctions proposées mêlent à la fois des peines d'emprisonnement et des amendes, en fonction de la gravité des faits. Une peine de dix ans d'emprisonnement est prévue pour les individus (y compris les représentants d'entreprises) ayant commis des infractions environnementales entraînant la mort.

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Le nombre d'années de prison qu'encourt un individu pour crime d'écocide

« Cela peut sembler faible en ce qui concerne les infractions qualifiées, mais pour la première fois ces sanctions sont harmonisées et élevées : cela reste une victoire », se réjouit Marie Toussaint.

Du côté des amendes, les entreprises se verront infliger, dans les cas les plus graves, des amendes représentant 5 % de leur chiffre d'affaires mondial annuel ou 40 millions d'euros (3 % du chiffre d'affaires ou 24 millions d'euros pour les autres infractions). Egalement, elles pourront être privées de financements publics et seront tenues de réparer les dommages et d'indemniser les victimes.

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4. Qui reconnaît déjà l'écocide ?

Dans le monde, une dizaine de pays ont déjà reconnu dans leur droit interne le crime d'écocide : le Vietnam en premier lieu, notamment pour qualifier les crimes durant la guerre avec l'usage de « l'agent orange » (herbicide) utilisée par l'armée américaine.

D'autres pays ont sauté le pas, dont beaucoup ne sont pas des démocraties : la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, la Géorgie, la Biélorussie, l'Ukraine, la Moldavie et l'Arménie, la Belgique et l'Ukraine - cette dernière réclamant notamment que l'écocide soit reconnu comme un crime de guerre de Vladimir Poutine.

5. Et la France ?

En France, dans la loi Climat et résilience, le « délit d'écocide » est mentionné . La Convention citoyenne pour le climat réclamait initialement un « crime d'écocide ». Dans les textes, l'infraction relève du « délit de mise en danger de l'environnement, qui viendra sanctionner la mise en danger délibérée de l'environnement par des violations délibérées d'une obligation ».

« Globalement, la loi française cite l'écocide mais pas avec la bonne définition, et du côté de l'UE c'est l'inverse », explique Marie Toussaint. Les Etats membres ont maintenant 24 mois pour adapter leur législation à la nouvelle directive européenne.

Lou Vincent

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