À la fin, c’est toujours Harvard qui gagne. Pour la vingt-et-unième fois consécutive, l’université américaine arrive en tête du classement 2023 établi par l’organisation Shanghai Ranking Consultancy. Ce palmarès distingue depuis 2003 les 1000 meilleures universités au monde. Sans surprise, donc, les États-Unis confirment leur hégémonie. Comme l’an passé, les universités de Stanford et le MIT (Massachusetts Institute of Technology) complètent le podium, respectivement deuxième et troisième. Les universités françaises, elles, reprennent globalement des couleurs après une légère perte de vitesse lors du classement de Shanghai 2022.

Le top 10 est identique à celui de l’édition 2022: anglo-saxon. Seuls deux établissements britanniques, les traditionnels rivaux Cambridge (4e) et Oxford (7e), se font une place entre les mastodontes américains: Berkeley (5), Princeton University (6), Columbia (8), la California Institute of Technology (9e) et l’université de Chicago (10e).

Bon 15e, Paris-Saclay gagne une place

Il faut descendre au quinzième rang pour voir poindre un établissement non anglo-saxon. L’université française Paris-Saclay gagne donc une place par rapport à l’année dernière. Un bon signal, alors que l’institution avait perdu trois places entre les classements 2021 (13e) et 2022. «Il faut aussi souligner deux distinctions qui ont mis la lumière sur notre établissement cette année: le prix Nobel de physique d’Alain Aspect et la médaille Fields d’Hugo Duminil-Copin, deux de nos chercheurs. Cependant, les résultats sont à analyser sur le long terme. Entre le moment où les travaux débutent et la publication d’une thèse, plusieurs années s’écoulent», décrypte Estelle Iacona, présidente de l’université Paris-Saclay, dans un interview au Figaro Etudiant. Autrefois dirigé par l’actuelle ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Sylvie Retailleau, cet établissement public expérimental né en 2020 regroupe notamment différentes écoles comme CentraleSupélec et AgroParisTech, mais aussi les instituts universitaires technologiques (IUT) de Cachan, Orsay et Sceaux. Depuis 2020, le classement thématique de Shanghaï distingue son département de mathématiques comme le meilleur au monde.

Davantage d’universités françaises dans le top 500

Comme en 2022, trois autres universités françaises se font une place dans le top 50: Paris Sciences et Lettres (PSL) - composé de onze établissements dont Dauphine, Mines Paris ou l’École normale supérieure (ENS) - arrive en 41e position et perd une place par rapport à la précédente édition du classement de Shanghai. La Sorbonne Université est quant à elle 46e et perd trois places. Rien de nouveau non plus dans le top 100, où figurent au total quatre établissements français. Paris-Cité, issue de la fusion des anciennes Descartes et Diderot, se place 68e et gagne 10 places par rapport à 2022.

En revanche, il y a de quoi se réjouir puisque 18 établissements français sont présents dans le top 500, soit deux de plus que l’an passé. Toutefois, au total, ils ne sont que 27 dans le top 1000, c’est-à-dire un de moins qu’à la précédente édition du classement: l’Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, présente l’an passé, est un établissement associé à Paris-Saclay, et l’université de Tours, elle, disparaît complétement du classement. De son côté, l’université de Poitiers intègre le palmarès.

La France est ainsi la septième nation la plus représentée. Loin, très loin, derrière les États-Unis, la Chine et le Royaume-Uni. Et au coude à coude avec l’Australie, le Canada et l’Allemagne. À noter que pour la première fois de l’histoire du classement, les universités chinoises sont les plus représentées: 214 établissements au total, contre 187 pour les États-Unis. Mais le pays d’Amérique du Nord conserve un avantage écrasant au niveau du top 100: 38, contre 11 pour l’empire du Milieu.

La méthodologie avantage les universités américaines

Le classement de Shanghai est réalisé à partir de six critères: le nombre de prix Nobel et de médailles Fields parmi les anciens élèves et les enseignants, la quantité de professeurs les plus cités dans leur discipline, le nombre de publications dans les revues scientifiques Nature et Science ou indexés dans le Science Citation Index-Expanded et le Social Science Citation Index, ainsi qu’une pondération par rapport à la taille de l’institution.

Ce classement a été créé pour comprendre la performance des universités américaines afin que les établissements chinois puissent s’en inspirer. 

Yassine Lacknech, président du conseil de la recherche de France Universités

Il faut donc prendre du recul pour expliquer la faible présence française sur les cimes de ce palmarès qui se base sur des facteurs quantitatifs et qui mesure l’excellence de la recherche. Pas question ici de qualité pédagogique, d’insertion professionnelle des diplômés ou encore des efforts des établissements en matière d’écologie.

Des indicateurs pourtant mesurés dans d’autres classements prestigieux comme le Quacquarelli Symonds (QS) ou celui du Times Higher education. «Pour comprendre ce palmarès, il faut se souvenir de son objectif: il a été créé par Shanghai pour comprendre la performance des universités américaines afin que les établissements chinois puissent s’en inspirer», note Yassine Lakhnech, président de l’université Grenoble Alpes et du conseil de la recherche de France Universités.

Le classement ignore les sciences sociales

De plus, le classement de Shanghai mesure surtout les performances des établissements tournés vers les sciences dures, ignorant de facto les sciences sociales. Enfin, en ne retenant quasiment que des publications anglo-saxonnes, se faire une place pour la recherche française est plus délicat. Les principaux organismes de recherche publics (CNRS, Inra, Ifremer...) n’apparaissent par exemple pas dans le classement.

À certains égards, cela confère un avantage aux grosses entités américaines, anciennes et particulièrement dotées financièrement. «Le système français reste complexe et surtout peu attractif: nos universités manquent de moyens et les conditions de travail pour les chercheurs sont loin d’être aussi intéressantes qu’aux États-Unis ou même en Allemagne», conclut Yassine Lakhnech de France Universités.