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Argentine : une grève générale pour dénoncer le programme d'austérité du président Javier Milei

Lancée par plusieurs syndicats, la grève générale a été suivie jeudi en Argentine, avec notamment une grande partie des transports en commun de Buenos Aires à l'arrêt. La mobilisation vise à dénoncer le programme d'austérité du président ultralibéral Javier Milei, au pouvoir depuis cinq mois. 

Les manifestants argentins bloqués par les forces de l'ordre sur le chemin vers la résidence présidentielle d'Olivos, en banlieue de Buenos Aires, mardi 7 mai 2024.
Les manifestants argentins bloqués par les forces de l'ordre sur le chemin vers la résidence présidentielle d'Olivos, en banlieue de Buenos Aires, mardi 7 mai 2024. © Luis Robayo, AFP
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L'Argentine a vécu, jeudi 9 mai, sa deuxième grève générale en à peine cinq mois de gouvernement Javier Milei, signe que la rue hausse le ton face au président ultralibéral, toujours droit dans son programme d'austérité, aux premiers résultats ambivalents.

Ni trains, ni bus, ni métro durant 24 heures : la capitale Buenos Aires devrait sonner creux sans une grande partie des 3 millions de personnes qui y transitent chaque jour, la majorité en transports en commun. Et les liaisons avec les provinces argentines s'annoncent également difficiles étant donné que 400 vols environ seront annulés, affectant 70 000 passagers, selon l'Association latino-américaine du transport aérien.

"La grève n'a pas de force", a clamé la ministre de la Sécurité Patricia Bullrich, qui a dénoncé des cas de caillassages de bus qui circulaient. Son homologue des Transports a affirmé que les transports publics fonctionnaient à 40 %.

Le gouvernement a aussi cité l'étude d'une université privée, UADE, selon laquelle les 24 h de grève auront coûté un demi-milliard de dollars à l'économie.

"La grève leur a fait mal", son "succès montre que le gouvernement doit prendre note", a rétorqué la CGT, puissant syndicat péroniste co-organisateur de la grève "contre une politique d'ajustement qui nous pousse aux extrêmes".

Davantage suivie que la grève du 24 janvier

Très soutenue dans le secteur public, plus diversement dans le privé, la grève de 24 h paraissait bien plus suivie que celle du 24 janvier, un semi-échec raillé alors par le gouvernement comme la grève "la plus rapide de l'histoire", annoncée en décembre 18 jours après l'investiture de Javier Milei.

Cette fois encore, la présidence a dénoncé une grève "strictement politique" et des syndicats "battant des records de rapidité et du nombre de grèves", face à un gouvernement "à peine entré en fonction". Syndicats qui vont "à l'encontre de ce que les gens ont voté il y a cinq mois". "Ce gouvernement a eu plus de grèves que de réformes, c'est assez extravagant", a ironisé le porte-parole présidentiel.

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De fait, le dernier mois a vu des journées d'action ou manifestations quasi quotidiennes à Buenos Aires, quoique d'ampleur inégale : "la hausse de la conflictivité sociale", selon la CGT.

Pour autant, l'impact de la grève de jeudi paraît incertain. Moindre en tout cas que les grandes marches en défense de l'université publique du 24 avril (un million de manifestants dans le pays), plus forte mobilisation hostile à Javier Milei à ce jour, et "une leçon pour lui : la première fois qu'il a heurté un mur dans l'opinion publique, car ce qui était en jeu était un bien collectif, transversal", estime le politologue Gabriel Vommaro.

Des réformes dérégulatrices adoptées

De fait, malgré une légère inflexion en avril, plusieurs sondages récents voient Javier Milei osciller entre 45 et 50 % d'image positive – il avait été élu avec 56 %. Une forme de stabilité spectaculaire pour un gouvernant qui a infligé en peu de mois, entre dévaluation, prix libérés, dépenses et aides publiques "tronçonnées", "l'ajustement le plus grand de l'histoire de l'humanité", comme l'anarcho-capitaliste aime à rappeler.

En plus, le corrosif Milei, "sans pour autant changer sa personnalité et son discours agressif", est en train de vivre "un apprentissage politique", considère Rosendo Fraga, politologue de l’Académie des sciences morales et politiques.

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À ce titre, l'adoption fin avril (du moins à la Chambre basse) de son train de réformes dérégulatrices - un projet amendé, rétréci, raboté - est "importante" : elle montre un Milei "plus flexible dans la pratique, assouplissant l'idéologie", et qui "peut articuler une coalition pour gouverner, malgré sa faible force" de 37 députés sur 257.

Inflation en décélération, de 25 % pour le seul décembre à 9 % prédits pour avril, ou récession inquiétante, avec -3,2 % de recul d'activité sur un an ? "Exploit historique" (dixit Milei) d'un budget à l'excédent au premier trimestre, inédit depuis 2008, ou sombre record de la pauvreté (41,7 % officiellement), à des niveaux pas vus depuis 2006 ?

Une manifestante bloquée par les forces de sécurité sur le chemin de la résidence du président argentin Javier Milei, en banlieue de Buenos Aires, le 7 mai 2024.
Une manifestante bloquée par les forces de sécurité sur le chemin de la résidence du président argentin Javier Milei, en banlieue de Buenos Aires, le 7 mai 2024. © Luis Robayo, AFP

Selon qu'ils se focalisent sur l'équilibre des comptes, la baisse du risque-pays, ou sur l'impact micro-social, les pertes d'emplois, opposition et gouvernement s'envoient les indices à la figure : "Sacrifice inutile du peuple", dénonce l'ex-présidente Cristina Kirchner. "Notre plan fonctionne", claironne Javier Milei.

Mais des économistes, y compris libéraux, s'inquiètent de "l'après".

"Milei a (...) une seule variable en tête : l'inflation", estime Carlos Rodriguez, jadis proche du nouveau président. "Le plan d'ajustement est simplement de ne rien payer, avec ces premiers mois une réduction des coûts dans tous secteurs. Mais je ne vois pas de plan."

Au-delà de la grève, qui semble vouée à n'infléchir en rien la politique suivie, difficile de prédire qui, d'une reprise ou du ras-le-bol, se fera sentir le premier.

Avec AFP

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